Les Athéniens se considéraient tous comme des Erechtéides, c'est-à-dire des descendants d'Erechtée, le héros éponyme dont le temple constitua toujours, sur l'Acropole, le lieu de son culte.
Les origines mythiques
Les variantes de la légende sont nombreuses, Erechtée étant fils tantôt de Cécrops, tantôt d' Erichtonios, lui-même confondu parfois avec Erechtée, mais toutes ont un point commun fondamental : elle attribuent à ces rois fondateurs une origine chtonienne (ἡ χθών "la terre").
Selon la version la plus couramment admise, Héphaïstos rattrapa sur l'acropole Athéna, qu'il poursuivait de ses assiduités, mais celle-ci lui résistant, le dieu laissa échapper son sperme sur la cuisse de la déesse. Athéna nettoya la souillure à l'aide d'une boule de laine qu'elle arracha à son péplos et jeta ensuite sur le sol. De cette fécondation naquit Erichtonios (ou Erechtée ou Cécrops). II en garda une double nature : la partie supérieure de son corps était humaine mais il possédait une queue de serpent, ce qui, comme tous les autres monstres possédant le même attribut, fait incontestablement de lui un γη-γενής, gegenès, un "fils de la terre". Pour les Athéniens, il est non seulement le premier roi mais le héros fondateur, le père, l'ancêtre commun à tous. Sur le fronton d'un temple de la période archaïque, les dieux serpents rappelllent à tous les citoyens qu'ils ne sont pas de simples résidents habitant la terre de l'Attique mais qu'ils en sont les enfants, les fruits, au même titre que les olives de l'arbre planté par Athéna sur l'Acropole. De cette certitude découle une notion fondamentale dans la citoyenneté athénienne : l'autochtonie.
La dimension héroïque
Ces fondements mythiques permettent aussi de mieux comprendre pourquoi le politique et le religieux ont toujours été aussi étroitement liés à Athènes. Des fêtes nombreuses rappellent tout au long de l'année les origines de la cité. Elles honorent non seulement les dieux mais aussi les héros et les glorieux ancêtres.
Parmi les héros, la figure de Thésée se détache au point qu'elle incarne à elle seule la cité. Dans Œdipe à Colone de Sophocle ou les Suppliantes d'Euripide, c'est l'Athènes du Vè siècle qui parle par la bouche du roi mythique et proclame haut et fort la force de l'idéal démocratique et la primauté du droit et de la raison dans la gestion des affaires humaines.
Mais Thésée n'est pas qu'un symbole. Il représente un idéal héroïque que les Athéniens, comme tous les Grecs, portent en eux et qui leur est transmis par le fond mythologique qui constitue la base de leur éducation d'homme et de citoyen. Entre la conception de l'honneur de l'époque homérique et celle des cités, il n'y a pas de rupture mais un simple transfert. L'héroïsme ne concerne plus seulement quelques guerriers d'exception comme Achille, Ajax, Ulysse... ou Hector mais tous les citoyens. On comprend mieux dès lors l'importance des oraisons funèbres prononcées rituellement au cimetière du Céramique. Elles ne sont pas seulement un hommage aux soldats morts pour la patrie, mais aussi un exemple proposé à l'admiration des vivants. Ces discours ont une fonction aussi religieuse que politique ; ils sont un des éléments du culte des ancêtres dont l'idéal héroïque constitue le ciment de la citoyenneté.