- L'autochtonie et l'isogonie

Dans les textes anciens, on trouve rarement le mot Ἀθῆναι (Athènes) pour désigner la cité. Le terme le plus fréquemment employé est οἱ Ἀθηναῖοι (les Athéniens), comme on disait οἱ Λακεδαιμόνιοι (les Lacédémoniens), οἱ Θηβαῖοι (les Thébains) ou οἱ Κορίνθιοι (les Corinthiens). Ces emplois révèlent une conception de la cité très différente de la nôtre. Les Athéniens n'habitent pas Athènes, ils sont Athènes. Les mythes fondateurs leur enseignent qu'ils sont fils de la terre d'Attique et que c'est leur groupe humain, issu d'ancêtres communs qui constitue la cité. Cette certitude nous permet de mieux appréhender deux notions complexes qui constituent un des fondements de la citoyenneté athénienne : l'autochtonie et l'isogonie.

L'autochtonie :

Il est difficile de l'analyser avec des concepts politiques modernes. Pour un Grec, l'attachement à sa terre de naissance est un lien vital, aussi fort que celui qui le lie à sa famille. Il est, comme une plante, le produit de sa terre. Dans le Ménexène de Platon, il est dit qu'une "bonne terre" produit "des hommes de bonne qualité" et une "mauvaise terre" "des hommes de piètre valeur". De cette conception religieuse découle à Athènes une conséquence politique : le pouvoir appartenant à l'ensemble des citoyens, ne peuvent diriger le destin de la cité que ceux qui en sont issus, les autochtones (οἱ αὐτόχθονες), c'est-à-dire, au sens propre, ceux qui sont nés tout à la fois de la terre même et de la même terre.
On voit donc que la citoyenneté, à Athènes, ne dépend ni d'un "droit du sol" ni d'un "droit du sang" comme dans les démocraties modernes, mais bien des deux à la fois. C'est le sens de l'autochtonie, qui ne fera que se renforcer tout au long du V° siècle. Voilà pourquoi, pour être citoyen, il faut être né athénien, et, à partir de 451, de père et de mère athéniens.

L'isogonie (ἡ ἰσογονία) :

L' "égalité de naissance" ne signifie nullement que les citoyens soient égaux, les Athéniens du V° et du IV° siècle admettant les inégalités de nature et de fortune. Ll'isogonie signifie simplement que tous les autochtones ont les mêmes droits à la citoyenneté, quelles que soient ces inégalités. Elle ne garantit pas même une égalité complète dans l'exercice des droits politiques, certaines charges étant, en principe, réservées et attribuées en fonction de l'appartenance à des classes censitaires. Faut-il y voir une restriction ? Oui, si l'on considère qu'au V° siècle, les thètes n'ont pas le droit d' être archontes, ou que seuls les plus riches peuvent servir dans la cavalerie. Non, si l'on veut bien prendre en compte que la citoyenneté athénienne confère non seulement des droits mais aussi des devoirs extrêmement contraignants, en particulier sur le plan financier. Dès lors, on peut tout aussi bien dire que les citoyens pauvres se trouvent non pas privés mais exemptés de certaines charges que, de fait, ils seraient dans l'impossibilité de remplir.
Il reste que l'isogonie permet à tous les citoyens, sans aucune exception ni restriction, d'être jugés selon les mêmes lois, et de participer à part égale à l'assemblée générale souveraine dans laquelle ils ont le droit individuel de débattre et de voter

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