Milan / Mediolanum - Une ville ouverte sur les empires romains d’Orient et d’Occident

La fondation mythologique de la cité

Plusieurs légendes président à la fondation de la cité Mediolanum :

  • Selon Caton l’Ancien, elle serait à attribuer à deux chefs étrusques, Medo et Olano qui, lors de l’expansion étrusque vers le Nord, dans la vallée du Pô, à partir du VIe siècle avant J.-C., voulaient fonder l’Etruria padana (Étrurie padane).
  • Selon Tite-Live, elle serait à l’initiative des Insubres, peuple celte, et daterait aussi du VIe siècle avant J.-C. La cité aurait occupé une superficie de douze hectares. Bellovesos, notable gaulois dont l’existence n’est pas avérée, aurait franchi les Alpes avec ses troupes pour aider les Phocéens à créer Massalia (Marseille). Ensuite, Bellovesos, guidé par la déesse celte Belisama, aurait aperçu un présage sous une aubépine, fleur symbolique de la déesse : une laie à moitié recouverte de poils ou de laine (medio-lanata) ; c’est pourquoi ses troupes se seraient fixées sur la terre des Étrusques et auraient fondé la cité de Mediolanum dont l’emblème serait devenu la truie. 
  • Polybe, dans ses Histoires, Strabon dans sa Géographie, Pline l’Ancien dans son Histoire naturelle, confirment tous trois que la cité aurait été fondée par les Insubres.

L’histoire de la cité

L’archéologie confirme relativement bien la datation adoptée par le récit de la fondation mythologique de la cité. On sait que la région est habitée depuis l’âge du Bronze, au deuxième millénaire avant J.-C. : les cités sont bâties le long d’importantes voies commerciales, à proximité des cours d’eau qui relient le Bassin méditerranéen à la région transalpine. Des migrations de populations – celtes en particulier – s’opèrent aux alentours du Ve-IVe siècles avant J.-C. C’est alors que se développe un véritable noyau urbain qui se déplace progressivement vers la plaine.

Le nom latin de la cité Mediolanum provient de l'évolution phonétique du toponyme gaulois Mediolanon, très fréquent en Gaule : on le retrouve dans les noms des villes appelées Mâlain, Maulain, Meillant, Meulan, Meulin, Melun, Miolans, Meylan, Moislains… soit une cinquantaine de cités au total. Quoi qu’il en soit, toutes les cités nommées Mediolanum ont en commun plusieurs caractéristiques :

  • elles sont localisées à un carrefour ;
  • elles sont perchées ;
  • elles se trouvent au voisinage des limites d'anciens diocèses ;
  • elles contiennent un oppidum (place forte) occupé à la Tène III (IIe-Ier siècles avant J.-C.), au voisinage du toponyme, parfois à son emplacement ;
  • elles présentent des substructions gallo-romaines à proximité qui associent au moins deux éléments : un temple et des thermes. 

Mediolanum est habituellement traduit par « plaine médiane » ou « plaine du milieu », le mot étant dérivé du Celtique insubrien *Medhu / Mid-lann (*medio-lanon), à rapprocher des mots latins medius (situé au milieu) et planus (plat). On peut retenir cette acception à condition de voir dans medio non seulement un centre géographique, mais aussi un centre religieux et politique où se réunissent les peuples pour traiter de leurs intérêts communs, peut-être dans une enceinte dominant un « plat pays » rural : la signification de mediolanum serait donc bien plus politique que géographique.

Pour Milan, en Lombardie, il s’agit d’un important carrefour de terroirs établi sur la ligne de contact d'une plaine inondable et d'une zone de collines sèches. Cela signifie qu'elle est née sur une portion de terre qui donnait sur un palus (marais asséché), lieu facilement défendable, et à la confluence de quatre fleuves : le Seveso, le Nirone (ou Acqualunga), l’Olona et le Lambro.

Depuis sa fondation, Mediolanon est la plus importante cité des Gaulois Insubres. En 222 avant J.-C. elle est conquise par les Romains. Malgré l’intervention du général carthaginois Hannibal, lors des Guerres puniques, pour aider les Insubres contre Rome, ceux-là n’ont pas d’autre choix que de se soumettre à la domination romaine contre les Étrusques : ils fondent alors l’oppidum (place forte) de Mediolanum, le protégeant d’une double muraille de forme elliptique, la cité étant elle-même construite en forme de cercle.

L’histoire de Mediolanon celtique et de la première Mediolanum romaine est relativement méconnue avant 89 avant J.-C., date à laquelle le consul Cnaeus Pompeius Strabo, père du Grand Pompée, octroie à la cité le statut de colonie romaine appartenant à la province de la Gallia citerior (Gaule cisalpine). C’est pour cette raison qu’en 77 avant J.-C., le consul Lépide prend le parti des révoltés milanais dont les terres sont confisquées par le consul Sylla qui veut y installer les vétérans de son armée. Après la mort de Sylla, Lépide brigue un second consulat pour tenter de mener à bien son action politique et de rétablir les droits des tribuns de la Plèbe afin de redistribuer les terres. Mais le Sénat le proclame « ennemi public » ; un senatus consultum ultimum (décret ultime du Sénat) est voté contre lui et il est poursuivi par Pompée, le fils de Cnaeus Pompeius Strabo. Vaincu, il doit se rendre et se réfugier en Sardaigne où il meurt peu de temps après. La rébellion de Lépide et des notables milanais est réprimée dans le sang.

Lors de la Guerre des Gaules, de 58 à 50 avant J.-C., la cité de Mediolanum et ses environs fournissent à César les XIIIe et XIVe légions qui lui resteront fidèles lors de la Guerre civile contre Pompée. Mediolanum devient alors la cité la plus importante de la Gaule Cisalpine, aussi bien sur le plan politique, économique que militaire et reçoit, en 49 avant J.-C., grâce à la Lex Roscia, le statut de municipium civium romanorum (municipe romain, terme qui la différencie de la colonie par son origine étrangère) : cela renforce son attachement à Rome et à César, en particulier. C’est pourquoi Strabon qualifie Mediolanum d’ἀξιόλογος πόλις (axiologos polis, cité digne d’intérêt) et la classe au-dessus de toutes les autres villes de la région de la Gaule cisalpine, au même titre que Patavium (Padoue).

À partir du Ier siècle avant J.-C., la cité ne cesse de se développer car elle se situe à proximité des frontières de l’Empire, notamment la Rhétie (actuelles Suisse et Ouest de l’Autriche) et la Norique (partie Est de l’Autriche). Selon Tacite (Histoires, I, 70), pour lutter contre les Germains, une partie de l’armée romaine choisit son général en chef Vitellius pour prendre le pouvoir alors qu’Othon vient tout juste d’être nommé Empereur et, « pour offrir son présent au nouveau prince, elle lui donna les meilleures places du pays au-delà du Pô, Milan, Novarre, Ivrée, Verceilles » (et ut donum aliquod novo principi firmissima transpadanae regionis municipia, Mediolanum ac Novarium et Eporediam et Vercellas, adjunxere). À l’issue de la bataille, Othon, vaincu, se suicide et Vitellius prend le pouvoir. 

Au IIe siècle après J.-C., Mediolanum devient colonie impériale et voit la naissance de quelques Empereurs qui font un passage éclair dans l’histoire romaine : Didius Julianus qui ne règne que quelques mois en 193, laissant la place à Septime Sévère ; peut-être Geta, le fils de Septime Sévère, dont le lieu de naissance est contesté ; peut-être enfin Carus, Empereur romain de 282 à 283 après J.-C., dont le lieu de naissance n’est pas non plus avéré.

À partir du IIIe siècle après J.-C., Mediolanum voit déferler les hordes barbares, notamment les Alamans. En 259-260 après J.-C., l’Empereur Gallien, après la bataille de Mediolanum, est vainqueur. La cité en sort plus forte sur le plan économique et obtient la création d’un atelier monétaire. C’est alors que l'un de ses chefs d'origine gauloise, Postumus, impose son autorité sur la Germanie notamment, se fait proclamer Empereur des Gaules de 260 à 269, repousse les attaques de Gallien de 261 à 266 et étend son territoire aux Champs Décumates, région située à l’extrême Sud-Ouest de la Germanie. De 264 à 268 après J.-C., Gallien, étant dans l’incapacité de lutter sur toutes les frontières de l’Empire romain à la fois, décide de créer à Mediolanum une réserve militaire stratégique constituée essentiellement de cavalerie lourde, plus rapide que l’infanterie et plus puissante que les troupes auxiliaires. Gallien revient à Mediolanum en 267 pour évincer l’usurpateur Aureolus, l’un de ses anciens généraux, qui est censé prévenir une éventuelle attaque de Postumus mais qui veut détourner le pouvoir à son profit. C’est alors que Gallien est assassiné par les troupes d’Aureolus et Claude II le Gothique, qui a été choisi par Gallien, prend la succession. Claude II poursuit le siège de Milan avec succès, et Aureolus est à son tour assassiné, soit par ses propres soldats soit par ceux de Claude.

Quelques années plus tard, de 270 à 275, Aurélien, proclamé Empereur par l’armée et le Sénat, affronte une nouvelle invasion germanique, celle des Marcomans, qui ont déjà mené des raids dans la région en 271. Il restaure l’autorité de l’Empire face aux Barbares, les repousse au-delà du limes (frontière de l’Empire romain) puis fait de Mediolanum la cité la plus importante de la province d’Aemilia et de Liguria, chargée de veiller sur le front occidental de l’Empire. 

En 285, après une succession d’usurpateurs, devenu le seul successeur possible, Dioclétien met fin à l’Anarchie militaire et inaugure la Tétrarchie. Il partage le pouvoir entre deux « Augustes », Maximien Hercule en 286 et lui-même, assistés par deux « Césars » en 293, respectivement Constance Chlore et Galère. Chaque Empereur règne ainsi sur un quart de l'Empire : l’Orient est gouverné par Dioclétien et l’Occident par Maximien Hercule. Mediolanum devient alors la capitale et la résidence du coempereur Maximien.

En 306, le fils de Maximien Hercule, Maxence, et celui de Constance Chlore, Constantin, revendiquent le pouvoir ; Dioclétien et Maximien doivent abdiquer. S’ensuivent alors plusieurs guerres de succession dont le siège se situe à Mediolanum : Sévère en 307 prépare une expédition contre Maxence, mais ses troupes, qui ont servi sous le commandement de Maximien Hercule, refusent de combattre Maxence et se rallient à lui. Maxence doit ensuite lutter contre Constantin qui s’impose comme le seul maître de l’Empire. Constantin évince Maxence en 312 puis Licinius – son coempereur de 308 à 324 et rival potentiel – en lui donnant en mariage sa demi-sœur, Flavia Julia Constantia.

En 313, l’Empereur Constantin fait promulguer l’Edit de Milan qui autorise la liberté de culte individuel et met fin aux persécutions des Chrétiens. En 315 et en 326, Constantin séjourne par deux fois à Mediolanum pour régler des affaires religieuses. 

De 340 à 348, après le conflit mortel entre Constantin II et Constant Ier, deux des fils de Constantin, Constance II, le troisième héritier, poursuit la politique de son père et séjourne plusieurs fois à Mediolanum pour des raisons politiques, religieuses ou même personnelles, se mariant en 354 avec Eusébie, au retour d’une campagne victorieuse contre les Alamans.

Sans successeur, Constance II choisit d’abord un cousin, Constantius Gallus, qu’il fait exécuter pour sa brutalité puis le frère de Gallus, Julien, qui se marie avec Hélène à Mediolanum puis qu’il envoie en Gaule en 355. Constance II revient plusieurs fois à Mediolanum jusqu’en 357, veille de sa mort.

En 364-365, Valentinien Ier choisit la cité comme capitale et y demeure à plusieurs reprises entre 368 et 374 alors que son frère, Valens, est le coempereur d’Orient à la tête de Constantinople.

En 374, Ambroise devient évêque de Mediolanum et ami de l’Empereur Gratien qui séjourne souvent dans la cité chrétienne à partir de 379, année où est proclamé un édit abolissant les tolérances envers les hérétiques.

De 383 à 392, les Empereurs Valentinien II puis Théodose Ier établissent la résidence impériale à Mediolanum, éliminant plusieurs usurpateurs qui tentent de s’emparer du trône. En 386, Saint Augustin se convertit au christianisme et est baptisé par l’évêque Ambroise à Mediolanum. En 395, l’évêque Ambroise prononce l’éloge funèbre de Théodose Ier qui meurt à Mediolanum. C’est une période très prospère pour la cité qui devient le centre de l’Eglise d’Occident. En 397, l’Empereur Flavius Honorius fait célébrer dans la cité – non à Rome, comme c’est l’usage – les fêtes solennelles de son quatrième consulat.

En 402, l’un des principaux généraux de Théodose Ier, Stilicon, libère Mediolanum du siège des Wisigoths. En 452, les Huns pillent la ville mais ne l’incendient pas.

L’architecture de la cité antique

 

Plan

Carte de Mediolanum romaine, III-Ve siècle après J.-C., © Wikipédia commons

Les traces du sanctuaire celtique

D’après le tracé actuel de la ville, on peut repérer les limites originelles de la cité – deux ellipses insérées l’une dans l’autre – qui ont plusieurs rôles :

  • délimiter l’espace profane de l’espace sacré de la cité ;
  • protéger le centre de la cité des eaux qui envahissent la région, très marécageuse ;
  • fonder, par son orientation astronomique alignée sur les étoiles, un sanctuaire celte.

De cette époque celte, aucun témoignage n’est conservé ; on a cependant fait l’hypothèse que le temple romain dédié à Minerve, situé sous le Duomo actuel de Milan, était à l’origine un temple dédié à la déesse celte de la lumière, Belisama. On a aussi retrouvé une inscription sur les murs augustéens de la cité, au Sud, où est écrit le nom de la ville, de droite à gauche, en lépontique, une langue celtique disparue.

Les monuments romains

« À Mediolanum, tout est merveille : abondance de biens, maisons nombreuses, élégantes, hommes distingués par le génie, l'éloquence, et la douceur de leurs mœurs. Un double mur agrandit l'aspect de la ville, où s'élèvent, un cirque, les délices du peuple ; un théâtre fermé, où s'échelonnent d'immenses gradins ; puis des temples, le Palais et ses remparts, et l'opulent hôtel de Moneta, et le quartier célèbre sous le nom de Bains d'Hercule, et partout des péristyles ornés de statues de marbre, et des murailles entourées de fossés en forme de circonvallation (anneau de remblais fortifiés). Tous ces ouvrages semblent, par leurs vastes formes, rivaliser de magnificence, et ne sont point écrasés par le voisinage de Rome. »

Et Mediolani mira omnia, copia rerum, / innumerae cultaeque domus, facunda virorum / ingenia et mores laeti, tum duplice muro / amplificata loci species populique voluptas / circus, et inclusi moles cuneata theatri, / templa Palatinaeque arces opulensque moneta / et regio Herculei celebris sub honore lavacri ; / cunctaque marmoreis ornata peristyla signis / moeniaque in valli formam circumdata limbo. / Omnia quae magnis operum velut aemula formis / excellunt nec iuncta premit vicinia Romae. 

écrit Ausone en 388-390 après J.-C. dans le chapitre VII de son poème Ordo urbium nobilium (Ordre des villes célèbres), récit de voyage qu’il a fait à travers les provinces de l’Empire romain.

Cette description élogieuse reflète bien la réalité de la cité à l’époque romaine. En effet, à partir de l’occupation romaine, Mediolanum se dote, comme toute cité romaine, d’édifices publics caractéristiques de sa romanisation et nécessaires à une époque où la ville comptait environ 25 000 habitants. 

Les murs d’enceinte de la cité sont construits en deux étapes : 

  • l’enceinte républicaine, datant de 49 avant J.-C., mesure environ 4 mètres d’épaisseur, a approximativement la forme d’un carré mesurant 700 mètres de côté, est percée de sept portes principales et est doublée de profonds fossés défensifs ; l’une d’elles, la Porta romana, conduit à Rome via un important réseau de routes pavées ;
  • l’enceinte de Maximien Hercule, après 291 après J.-C., lorsque la cité devient capitale de l’Empire romain d’Occident, mesure 4,5 kilomètres et enserre une cité de 100 hectares. Elle contient en son sein les thermes d’Hercule, à l’Est, et jouxte l’amphithéâtre, à l’Ouest. Trois portes sont ajoutées à l’enceinte.

Au Ier siècle après J.-C., Auguste embellit la ville. La cité de Mediolanum se dote d’un théâtre romain pouvant accueillir entre 7000 et 9000 spectateurs, qui est agrémenté d’un mur de scène haut de 20 m, décoré de statues et d’une cavea (gradins) de 95 mètres de diamètre. Il est situé au Sud-Ouest de la cité dans le prolongement du decumanus (axe Est-Ouest), axe qui mène au cœur de la cité : le forum. Le théâtre est utilisé jusqu’en 399 après J.-C. – date d’une naumachie connue – à une époque où l’Empereur chrétien Théodose interdit les jeux du cirque et les représentations théâtrales. Le monument est détruit en 1162 lors de la prise de Milan par Frédéric Barberousse, Empereur du Saint-Empire romain germanique. Les vestiges du théâtre sont actuellement enfouis sous d’autres bâtiments plus récents et sont visitables dans le sous-sol de la chambre de commerce.

C’est aussi sous Auguste que l’on construit le premier forum romain, à l’intersection du cardo (axe Nord-Sud) et du decumanus (axe Est-Ouest), qui n’a cessé de se développer jusqu’au IIIe siècle après J.-C. et qui a ensuite été délaissé au profit du palais de l’archevêque lorsque la cité est devenue capitale de l’Empire romain d’Occident. À l’origine, la place mesure 160 mètres de long sur 55 mètres de large. Elle est entourée d’édifices importants :

  • le temple capitolin, dédié à Jupiter, Junon et Minerve, indiquant que la cité est une colonie romaine ;
  • la basilique, lieu économique et juridique ;
  • la curie, lieu de réunions politiques ;
  • le macellum (marché), lieu économique capital ;
  • les tabernae, boutiques de différents commerçants ;
  • l’atelier où l’on frappait la monnaie (zecca sur le plan), bâtiment dont la datation et l’emplacement sont encore discutés.

Autour du forum, on a retrouvé les vestiges d’un canal de pierre servant à drainer l’eau de pluie ainsi que des marches permettant d’accéder aux boutiques situées sous les arcades du forum. Actuellement, le forum se situe sous la bibliothèque d’Ambroise.

Le canal Vettabia, construit au Ier siècle après J.-C., recueille les eaux de la rivière Seveso, au Nord-Est de la cité, et du torrent Molia, au Sud de Mediolanum. L'origine de son nom provient du Latin vectabilis (capable de transporter), car il était navigable à l’époque antique. Ce canal s’ouvre sur un petit port fluvial, large de 7 mètres et profond d' 1,5 mètre, permettant ainsi le développement du commerce de la cité.

Aux IIe et IIIe siècles après J.-C., pour satisfaire aux besoins de la population, on construit, près de la porte Sud-Ouest, un amphithéâtre aux dimensions imposantes, qui arrive en troisième position, concernant sa taille, après le Colisée à Rome : 155 par 125 mètres pour le bâtiment et 71 par 41 mètres pour l’arène. Il est capable d’accueillir 20000 à 350000 spectateurs selon les époques. Il est utilisé jusqu’au Ve siècle après J.-C., lorsque les Chrétiens interdisent les importations d’animaux et les spectacles. Situé à l’extérieur des murailles de la ville, il devient très vulnérable : il sert de carrière de pierres puis est démoli au Ve siècle après J.-C. pour que les Barbares ne l’utilisent pas comme une place forte.

Sous Maximien, à la fin du IIIe siècle après J.-C., à l’Ouest de la cité, est construit le cirque romain. Orienté Nord-Sud, sa disposition est conditionnée par le fleuve voisin. La piste du cirque mesure 460 mètres de long et 68 mètres de large ; il peut accueillir 25000 spectateurs. L'empereur Théodose, juste avant sa mort, y fait donner des jeux en 395 afin de célébrer sa victoire sur l'usurpateur Eugène. L’édifice survit aux invasions barbares et est probablement détruit en 1162 lors du siège de Milan. On conserve aujourd’hui du bâtiment une des deux tours latérales des carceres (stalles de départ des chevaux).

Bâtis à partir de la fin du IIIe siècle après J.-C., les thermes d’Hercule sont construits sous l’Empereur Maximien Hercule, en son honneur, au Nord-Ouest de la cité, dans une politique d’extension de la cité. Ils sont endommagés lors des invasions barbares au Ve siècle après J.-C. puis définitivement détruits lors du siège de Milan en 1162. Le complexe thermal est impressionnant par ses dimensions : mesurant 127 par 112 m, occupant une superficie de 14500 m2, ses murs mesurent jusqu’à 1,5 mètre d’épaisseur. Les thermes sont alimentés par le canal de l’Acqualunga, au Nord-Est, et la rivière Seveso ; nul besoin d’aqueduc dans cette région parsemée par les eaux. Les thermes sont aussi notables par leur luxe : ils sont décorés de statues de marbres polychromes venus de tout l’Empire romain (Grèce, Egypte, Carthage notamment). Comme les autres édifices, ils subissent les invasions barbares et sont abandonnés au Ve siècle après J.-C. Plus tard, les murs des thermes servent à reconstruire d’autres édifices. En revanche, on a conservé des colonnes des thermes dont certaines ont été réemployées pour décorer, au Moyen-Âge, la place de la basilique San Lorenzo, au Sud de la ville. 

Au IIIe siècle après J.-C., Maximien fait construire, entre le cirque et le forum, le palais impérial (area del palazzo imperiale sur le plan) où il réside avec sa cour : ce complexe architectural est composé de divers bâtiments d’apparat et bâtiments administratifs. Les palais ont un accès direct au cirque, ce qui permet à l'Empereur de s'y rendre sans sortir dans la rue. 

À l’époque Maximien probablement, au Nord de la cité, est construit un grand horreum (grenier à blé), mesurant 18 mètres par 68 mètres, constitué de quatre nefs et servant à entreposer l’annona militaris, l’approvisionnement en blé pour l’armée.

À l’extérieur des murailles, l’Empereur Valentinien, au IVe siècle après J.-C., fait bâtir son mausolée en marbre égyptien, qui abritera ensuite toute la dynastie des Valentiniens qui règnent de 364 à 455 après J.-C. À l’origine, cet endroit est une nécropole païenne qui est ensuite christianisée et où l’on enterre les martyrs chrétiens. Plus tard, ce mausolée abrite les corps des premiers évêques milanais. Transformé en chapelle au Moyen-Âge, il est ensuite détruit pour être remplacé par une église au XVIe siècle. 

Au IVe siècle après J.-C., la cité est entièrement réorganisée. Dans le prolongement du decumanus, au-delà de la Porta romana, on construit une longue rue à portiques abritant des boutiques, mesurant 600 mètres de long et 9 mètres de large, équipée d’un tout-à-l’égout pour évacuer les eaux usées. La longue rue se termine par un arc de triomphe à trois baies, servant de porte à la cité pour se déplacer de / vers Rome. À mi-chemin de cette rue, se dresse la basilique chrétienne San Nazaro in Brolo selon les souhaits de l’évêque Ambroise et de l’Empereur Gratien en 382 après J.-C. La rue est détruite par les Barbares au Ve siècle après J.-C. et l’arc de triomphe aussi, au moment du siège de Milan en 1162. 

À partir de l’époque où Ambroise devient évêque de la cité, les monuments romains sont tous peu à peu détruits ou réemployés pour servir à la construction d’églises ou basiliques chrétiennes.

Mediolanum aujourd’hui ?

De nos jours, Milan est moins connue pour ses vestiges romains que pour sa fresque La Cène de Léonard de Vinci qui se trouve dans le couvent dominicain de Santa Maria delle Grazie.

En dehors des colonnes de la basilique San Lorenzo provenant en partie des anciens thermes romains, il ne reste de l’époque romaine que peu de traces, souvent situées en sous-sol : quelques vestiges du cirque, de l’amphithéâtre et des thermes ainsi qu’une partie des murs d’enceinte. En revanche, de nombreuses inscriptions épigraphiques témoignent de l'intense activité économique et artisanale de la cité à l’époque romaine.

Ce qu’en dit Strabon : 

 

Ἴνσουβροι δὲ καὶ νῦν εἰσί. Μεδιολάνιον δ´ ἔσχον μητρόπολιν, πάλαι μὲν κώμην (ἅπαντες γὰρ ᾤκουν κωμηδόν), νῦν δ´ ἀξιόλογον πόλιν, πέραν τοῦ Πάδου, συνάπτουσάν πως ταῖς Ἄλπεσι. Πλησίον δὲ καὶ Ὀυήρων, καὶ αὕτη πόλις μεγάλη. Ἐλάττους δὲ τούτων Βριξία καὶ Μάντουα καὶ Ῥήγιον καὶ Κῶμον· αὕτη δ´ ἦν μὲν κατοικία μετρία.

 

Plus heureux, les Insubres1 se sont maintenus jusqu'à présent : Mediolanum, de tout temps leur capitale, mais qui n'avait été dans le principe qu'un simple bourg (tous les peuples celtes vivaient alors dispersés dans des bourgades ouvertes), se trouve être actuellement une ville considérable de la Transpadane. Elle touche en quelque sorte aux Alpes et a dans son voisinage une autre grande ville, Vérone, sans compter Brixia, Mantoue, Rhegium et Côme, qui n'ont pas tout à fait la même étendue. 

Strabon, Géographie, V,1,6, traduit par Amédée Tardieu, 1867

1 Peuple celte d’Italie du Nord

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