NOTES
- Arrien, Anabase, III, 1, 4, trad. P. Savinel.
- Voir Diodore, XVII, 42, 7.
- Quinte-Curce, Histoire, IV, 1, 40.
- Au cours de sa marche vers Suse, avant de pénétrer dans la province de Sittacène, il est rejoint par les renforts envoyés par Antipater : « cinq cents cavaliers et six mille fantassins macédoniens, six cents cavaliers thraces, trois mille Tralliens, quatre mille fantassins et un peu moins de mille cavaliers péloponnésiens ». Et Diodore ajoute que de Macédoine « venaient cinquante fils d’Amis du Roi, envoyés par leurs pères pour servir comme gardes du corps » (XVII, 65, 1).
- « Peleton de cavalerie » ou plus littéralement « une tétrarchie de cavalerie » soit un ensemble de quatre unités de cavalerie.
- La note Budé précise justement qu’il ne s’agit pas de la ville elle-même mais de la « ville royale » avec le palais et la trésorerie. Derrière le délire dionysiaque qui accompagne la mise à sac apparaît donc une volonté politique cohérente. Pour Arrien (III, 8, 11-12) et Plutarque (Alexandre, 38,4) la destruction du palais royal est interprétée comme étant délibérée. Le rôle de la courtisane Thaïs sur lequel insiste par exemple Quinte-Curce (V, 7,11) n’est pas en contradiction avec l’autre version de l’événement.
- Cette description est d’autant plus intéressante que c’est la seule que nous possédons.
336-330 avant J.-C. De la Grèce à la Perse : la conquête d'Alexandre
Alexandre, nouveau maître de l’Egypte dans le respect proclamé de l’identité égyptienne
331. L’Égypte, à nouveau sous domination perse depuis Artaxerxès III, est soumise. Menphis lui est livrée par le satrape Mazacès. Ce dernier sait, en effet, l’hostilité des Égyptiens à l’égard de leurs maîtres qui avaient commis des sacrilèges à l’encontre de leurs temples et qui gouvernaient le pays avec dureté. Alexandre, au contraire, respecte la culture et les institutions locales, en laissant en place l’administration.
Aegyptii olim Persarum opibus infensi – quippe avare et superbe imperitatum sibi esse credebant – ad spem adventus eius erexerant animos, utpote qui Amyntam quoque transfugam et cum precario imperio venientem laeti recepissent. [2] Igitur ingens multitudo Pelusium, qua intraturus videbatur, convenerat. Atque ille septimo die, postquam a Gaza copias moverat, in regionem Aegypti, quam nunc Castra Alexandri vocant, pervenit. [3] Deinde pedestribus copiis Pelusium petere iussis ipse cum expedita delectorum manu Nilo amne vectus est. Nec sustinuere adventum eius Persae defectione quoque perterriti. [4] Iamque haud procul Memphi erat : in cuius praesidium Mazaces, praetor Darei, relictus sponte amne superato octingenta talenta Alexandro omnemque regiam supellectilem tradidit. [5] A Memphi eodem flumine vectus ad interiora Aegypti penetrat conpositisque rebus ita, ut nihil ex patrio Aegyptiorum more mutaret, adire Iovis Hammonis oraculum statuit.
[1] Les Égyptiens, depuis longtemps ennemis de la puissance des Perses, qu’ils accusaient de les gouverner d’une manière avare et tyrannique, avaient relevé leur courage à l’espérance de l’arrivée d’Alexandre. On les avait vus recevoir avec enthousiasme le transfuge Amyntas, se présentant chez eux avec une autorité toute précaire. [2] Aussi le peuple était-il accouru en foule à Péluse, par où l’on croyait que le roi devait entrer. Il y avait sept jours qu’il était parti de Gaza, lorsqu’il arriva dans la partie de l’Égypte que l’on appelle aujourd’hui le Camp d’Alexandre. [3] Il commanda alors à son infanterie de gagner Péluse par terre, et lui-même, avec une élite de troupes légères, s’embarqua sur le Nil. Les Perses, qu’effrayait déjà la défection des Égyptiens, n’attendirent pas son arrivée. [4] Il approchait de Memphis, lorsque Mazacès, à qui Darius avait laissé le commandement de la place vint lui remettre huit cents talents, avec tout l’ameublement royal. [5] De Memphis, continuant sa route sur le Nil, il pénétra dans l’intérieur de l’Égypte ; et, après avoir tout réglé sans rien changer aux coutumes nationales des Égyptiens, il forma le projet d’aller trouver l’oracle de Jupiter Hammon.
Quinte-Curce, Histoires, IV, 7, 1-5, trad. A. Trognon, E. Pessonneaux
[3, 3, 1] […] καὶ τὰ κατὰ τὴν Αἴγυπτον ἐνταῦθα ἐκόσμησε. δύο μὲν νομάρχας Αἰγύπτου κατέστησεν Αἰγυπτίους, Δολόασπιν καὶ Πέτισιν, καὶ τούτοις διένειμε τὴν χώραν τὴν Αἰγυπτίαν. Πετίσιος δὲ ἀπειπαμένου τὴν ἀρχὴν Δολόασπις ἐκδέχεται πᾶσαν. [3,3,2] φρουράρχους δὲ τῶν ἑταίρων ἐν Μέμφει μὲν Πανταλέοντα κατέστησε τὸν Πυδναῖον, ἐν Πηλουσίῳ δὲ Πολέμωνα τὸν Μεγακλέους Πελλαῖον.
[3, 3, 1] […] S’occupant ensuite du gouvernement de l’Égypte, il y établit deux satrapes égyptiens, Doloaspis et Petisis, auxquels il partagea tout le pays ; mais Petisis n’ayant point accepté, Doloaspis gouverna seul. [3,3,2] Alexandre tire des Hétaires, Pantaléon de Pydna, et Polémon de Pella, fils de Mégaclès, qu’il laisse avec garnison, l’un à Memphis, et l’autre à Péluse.
Arrien, Anabase, III, 5, 2-3
Il témoigne de son estime de la civilisation égyptienne en honorant les dieux : « il y offrit un sacrifice aux dieux et en particulier à Apis »1. Il est logiquement accueilli en libérateur par les prêtres. Après avoir consulté l’oracle de Zeus-Ammon, il fonde Alexandrie d’Égypte.
[4] Καθίδρυται δὲ τῆς ἀκροπόλεως ἐκτὸς οὐ μακρὰν ἕτερος ναὸς ῎Αμμωνος πολλοῖς καὶ μεγάλοις δένδροις σύσκιος. Τούτου δὲ πλησίον ὑπάρχει κρήνη διὰ τὸ συμβεβηκὸς ὀνομαζομένη ῾Ηλίου κρήνη· αὕτη δὲ τὸ ὕδωρ ἔχει συμμεταβαλλόμενον αἰεὶ ταῖς ἡμεριναῖς ὥραις παραδόξως. [5] Ἅμ’ ἡμέρᾳ γὰρ ἐξίησι τὴν πηγὴν χλιαράν, προϊούσης δὲ τῆς ἡμέρας τῇ προσθέσει τῶν ὡρῶν ἀνάλογον καταψύχεται, τοῦ μεσημβρινοῦ δὲ καύματος ἀκμάζει τῇ ψυχρότητι· πάλιν δὲ ἀνάλογον ἀπολήγει πρὸς τὴν ἑσπέραν καὶ τῆς νυκτὸς ἐπιλαβούσης ἀναθερμαίνεται μέχρι μέσων νυκτῶν καὶ τὸ λοιπὸν ἀπολήγει, μέχρι ἂν ἅμα τῷ φωτὶ πρὸς τὴν ἐξ ἀρχῆς ἀποκατασταθῇ τάξιν. [6] τὸ δὲ τοῦ θεοῦ ξόανον ἐκ σμαράγδων καί τινων ἄλλων πολυτελῶν λίθων περιέχεται καὶ τὴν μαντείαν ἰδιάζουσαν παντελῶς ποιεῖται. ἐπὶ νεὼς γὰρ περιφέρεται χρυσῆς ὑπὸ ἱερέων ὀγδοήκοντα : οὗτοι δ᾽ ἐπὶ τῶν ὤμων φέροντες τὸν θεὸν προάγουσιν αὐτομάτως ὅπου ποτ᾽ ἂν ἄγῃ τὸ τοῦ θεοῦ νεῦμα τὴν πορείαν. [7] συνακολουθεῖ δὲ πλῆθος παρθένων καὶ γυναικῶν παιᾶνας ᾀδουσῶν κατὰ πᾶσαν τὴν ὁδὸν καὶ πατρίῳ καθυμνούντων ᾠδῇ τὸν θεόν. [17, 51] τοῦ δ᾽ Ἀλεξάνδρου διὰ τῶν ἱερέων εἰσαχθέντος εἰς τὸν νεὼν καὶ τὸν θεὸν κατανοήσαντος ὁ μὲν προφητεύων ἀνὴρ πρεσβύτερος τὴν ἡλικίαν προσελθὼν αὐτῷ, χαῖρε, εἶπεν, ὦ παῖ : καὶ ταύτην παρὰ τοῦ θεοῦ ἔχε τὴν πρόσρησιν. [2] ὁ δ᾽ ὑπολαβών, δέχομαι, φησίν, ὦ πάτερ, καὶ τὸ λοιπὸν κεκλήσομαι σός. ἀλλ᾽ εἰπέ μοι εἴ μοι δίδως τὴν ἁπάσης τῆς γῆς ἀρχήν. τοῦ δὲ ἱερέως προσελθόντος τῷ σηκῷ καὶ τῶν ἀνδρῶν τῶν αἰρόντων τὸν θεὸν κινηθέντων τεταγμένοις τισὶ τῆς φωνῆς συμβόλοις ὁ μὲν ἀνεῖπεν βεβαίως αὐτῷ διδόναι τὸν θεὸν τὴν αἴτησιν, ὁ δ᾽ Ἀλέξανδρος ὑπολαβών, τὸ λοιπόν, εἶπεν, ὦ δαῖμον, ἀπόφηναί μοι τῶν ζητουμένων, εἰ πάντας ἤδη μετελήλυθα τοὺς γενομένους φονεῖς τοῦ πατρὸς ἤ τινες διαλελήθασιν. [3] ὁ δὲ προφήτης ἀνεβόησεν εὐφήμει : οὐδένα γὰρ ἀνθρώπων ὑπάρχειν τὸν δυνησόμενον ἐπιβουλεῦσαι τῷ γεννήσαντι αὐτόν, τοὺς δὲ τοῦ Φιλίππου φονεῖς ἅπαντας τετευχέναι τιμωρίας. τεκμήρια δ᾽ ἔσεσθαι τῆς ἐκ τοῦ θεοῦ γενέσεως τὸ μέγεθος τῶν ἐν ταῖς πράξεσι κατορθωμάτων : καὶ γὰρ πρότερον ἀήττητον αὐτὸν γεγονέναι καὶ μετὰ ταῦτ᾽ ἔσεσθαι διὰ παντὸς ἀνίκητον. [4] ὁ δ᾽ Ἀλέξανδρος ἡσθεὶς ἐπὶ τοῖς κεχρησμῳδημένοις καὶ τὸν θεὸν μεγαλοπρεπέσιν ἀναθήμασι τιμήσας ἐπανῆλθεν εἰς τὴν Αἴγυπτον.
[4] À quelque distance du temple principal et hors de la citadelle, il y a un autre temple d’Hammon environné d’arbres touffus qui en dérobent presque la vue. Sous leur ombre est une fontaine, à laquelle un phénomène qui s’y passe régulièrement a fait donner le nom de fontaine du soleil. Elle fournit une eau qui passe par différents degrés de froid ou de chaud selon les différentes heures du jour. [5] Mais suivant un progrès tout autre que celui auquel on s’attendrait, elle est tiède au lever du soleil et se refroidissant à mesure que le soleil s’élève au-dessus de l’horizon, elle se trouve à midi à son plus haut degré de fraîcheur. Elle s’échauffe ensuite insensiblement jusqu’au coucher du soleil, où du même degré de tiédeur qu’elle avait à son lever, elle parvient à se trouver bouillante à minuit, pour revenir ensuite par degrés à la tiédeur ordinaire du matin. [6] La statue du dieu est d’un bronze où l’on a fait dissoudre des émeraudes et quelques autres pierres précieuses, et elle rend ses oracles d’une façon toute particulière. Quatre-vingts prêtres la posent dans une forme de nacelle d’or, et mettant cette nacelle sur leurs épaules, ils vont où ils croient que le dieu leur fait signe d’aller. [7] Ils sont suivis d’une grande multitude de femmes et de filles qui chantent pendant le chemin des hymnes anciennement composés. [17,51] À l’égard d’Alexandre qui avait été introduit dans le temple par les prêtres ; il contemplait la statue du dieu, lorsque le plus ancien d’entre eux l’aborda et lui dit d’un ton de prophète, ô mon fils ! recevez cette dénomination de la part du dieu. [2] Alexandre répondit : ô mon père, je la reçois et prendrai le nom de votre fils si vous me donnez l’empire de toute la terre. Le même prêtre s’avança aussitôt vers le sanctuaire et au signal de sa voix, les autres faisant quelques mouvements, comme pour enlever la statue, l’ancien prononça que le dieu lui accordait sa demande. Alexandre continua et dit, il me reste, ô Dieu, à vous demander si j’ai puni tous ceux qui ont eu part à l’assassinat de mon père Philippe et s’il n’en point échappé quelqu’un d’entre eux à mes recherches ! [3] La voix prophétique répliqua. Tenez-vous en repos sur cet article : aucun mortel ne peut attenter sur celui dont vous tenez le jour. Mais tous les assassins de Philippe ont été punis. Les grandes choses que vous ferez incessamment seront une preuve de votre véritable origine. Vous n’avez pas été vaincu jusqu’a ce jour, et vous ne pouvez jamais l’être dans la suite. [4] Alexandre charmé de ces réponses si glorieuses pour lui laissa des dons magnifiques dans le temple et s’en revint aussitôt en Égypte.
Diodore de Sicile, Bibliothèque historique, XVII, 50, 4 – 51, 4, trad. abbé Jean Terrasson
[3, 1, 1] ἐλθὼν δὲ ἐς Κάνωβον καὶ κατὰ τὴν λίμνην τὴν Μαρίαν περιπλεύσας ἀποβαίνει, ὅπου νῦν Ἀλεξάνδρεια πόλις ὤκισται, Ἀλεξάνδρου ἐπώνυμος. καὶ ἔδοξεν αὐτῷ ὁ χῶρος κάλλιστος κτίσαι ἐν αὐτῷ πόλιν καὶ γενέσθαι ἂν εὐδαίμονα τὴν πόλιν. πόθος οὖν λαμβάνει αὐτὸν τοῦ ἔργου, καὶ αὐτὸς τὰ σημεῖα τῇ πόλει ἔθηκεν, ἵνα τε ἀγορὰν ἐν αὐτῇ δείμασθαι ἔδει καὶ ἱερὰ ὅσα καὶ θεῶν ὧντινων, τῶν μὲν Ἑλληνικῶν, Ἴσιδος δὲ Αἰγυπτίας, καὶ τὸ τεῖχος ἧ περιβεβλῆσθαι. καὶ ἐπὶ τούτοις ἐθύετο, καὶ τὰ ἱερὰ καλὰ ἐφαίνετο.
[3, 1, 1] il passe à Canope, tourne les Palus Maréotides, et aborde au lieu où il devait bâtir Alexandrie. L’emplacement lui parut propre à fonder une ville dont il présage dès lors la prospérité future. Avide d’en jeter les premiers fondements, il commença par en dresser le plan, par y marquer les points principaux d’une place publique, et des temples qu’il voulait consacrer aux divinités grecques, et à l’Isis égyptienne ; après avoir déterminé l’étendue de l’enceinte des murs, il sacrifie pour le succès de son entreprise, et obtient les augures les plus favorables.
Arrien, Anabase, III, 1, 1, trad. François-Charles Liskenne et Jean-Baptiste Sauvan, Anselin, 1835
Les débuts de l’anabase : l’ambitieuse conquête de l’empire perse
C’est en Égypte, sans doute, qu’Alexandre a perçu la possibilité de prendre possession de l’Empire des Achéménides. Un audacieux projet politico-militaire nourri par les conditions nouvelles créées par ses victoires militaires, commence à voir le jour. En attendant, l’anabase peut commencer. Mais il ne s’agit plus seulement d’une simple expédition guerrière. Désormais stratégie, tactique et projets politiques sont étroitement liés. La conquête lui a montré que les opérations militaires doivent avoir des prolongements politiques. Ainsi, l’occupation des sites stratégiques par des garnisons macédoniennes – à Menphis, Péluse, Suse, Babylone ou Persépolis – dont le rôle est de maintenir la continuité de l’autorité royale, et la participation des vaincus au nouvel ordre des choses, a été organisée savamment. Cela annonce la mise en place d’un État sous le contrôle d’un prince au pouvoir despotique, utilisant habilement les structures administratives existantes, comme celles, par exemple, du système satrapique. Alexandre y mêle, d’une manière subtile et réaliste, en fonction des circonstances ou de la situation géographique et culturelle, un personnel macédonien.
[3, 3, 5] Αὐτὸς δὲ ἤδη ἄνω ὡρμᾶτο ὡς ἐπὶ Θάψακόν τε καὶ τὸν Εὐφράτην ποταμόν, ἐν Φοινίκῃ μὲν ἐπὶ τῶν φόρων τῇ ξυλλογῇ καταστήσας Κοίρανον Βεροιαῖον, Φιλόξενον δὲ τῆς Ἀσίας τὰ ἐπὶ τάδε τοῦ Ταύρου ἐκλέγειν. τῶν ξὺν αὑτῷ δὲ χρημάτων τὴν φυλακὴν ἀντὶ τούτων ἐπέτρεψεν Ἁρπάλῳ τῷ Μαχάτα ἄρτι ἐκ τῆς φυγῆς ἥκοντι. […] [3,3,6] […] ἐς Λυδίαν δὲ σατράπην Μένανδρον ἐκπέμπει τῶν ἑταίρων. ἐπὶ δὲ τοῖς ξένοις, ὧν ἡγεῖτο Μένανδρος, Κλέαρχος αὐτῷ ἐτάχθη. ἀντὶ δὲ Ἀρίμμα σατράπην Συρίας Ἀσκληπιόδωρον τὸν Εὐνίκου ἀπέδειξεν, ὅτι Ἀρίμμας βλακεῦσαι ἐδόκει αὐτῷ ἐν τῇ παρασκευῇ, ἥντινα ἐτάχθη παρασκευάσαι τῇ στρατιᾷ κατὰ τὴν ὁδὸν τὴν ἄνω.
[3, 3, 5] Pour lui, marchant en avant, il se dirige vers Thapsaque et l’Euphrate, après avoir laissé dans la Phénicie Coeranos de Beroea, pour y percevoir les tributs ; Philoxène a la même commission en Asie, en deçà du Taurus. Harpale de Machatas, revenu depuis peu de son exil, leur succède dans l’administration du trésor royal. […] [3,3,6] […] Ménandre, l’un des Hétaires, fut envoyé satrape en Lydie, et Cléarque lui succéda dans le commandement des troupes étrangères. Asclépiodore remplaça, dans le gouvernement de la Syrie, Arimnas déposé pour avoir usurpé la prérogative royale, alors qu’il fut chargé de faire les préparatifs pour la marche de l’armée au centre de l’Égypte.
Arrien, Les Expéditions d’Alexandre, trad., François-Charles Liskenne et Jean-Baptiste Sauvan, Anselin, 1835
La bataille de Gaugamèles : la revanche manquée de l’armée perse
331. Les îles de la mer Égée se sont ralliées. Milet et Halicarnasse ont capitulé. Alexandre arrive à Thapsaque. Mazaios, le gendre de Darius, satrape de Transeuphratène, qui avait été chargé par le Roi de garder l’Euphrate, s’enfuit à l’arrivée des troupes d’Alexandre. Le roi franchit le fleuve.
[3, 4, 2] Ἔνθεν δὲ ἐχώρει ἄνω, ἐν ἀριστερᾷ ἔχων τὸν Εὐφράτην ποταμὸν καὶ τῆς Ἀρμενίας τὰ ὄρη, διὰ τῆς Μεσοποταμίας καλουμένης χώρας. οὐκ εὐθεῖαν δὲ ἐπὶ Βαβυλῶνος ἦγεν ἀπὸ τοῦ Εὐφράτου ὁρμηθείς, ὅτι τὴν ἑτέραν ἰόντι εὐπορώτερα τὰ ξύμπαντα τῷ στρατῷ ἦν, καὶ χιλὸς τοῖς ἵπποις καὶ τὰ ἐπιτήδεια ἐκ τῆς χώρας λαμβάνειν καὶ τὸ καῦμα οὐχ ὡσαύτως ἐπιφλέγον. ἁλόντες δέ τινες κατὰ τὴν ὁδὸν τῶν ἀπὸ τοῦ Δαρείου στρατεύματος κατασκοπῆς ἕνεκα ἀπεσκεδασμένων ἐξήγγειλαν, ὅτι Δαρεῖος ἐπὶ τοῦ Τίγρητος ποταμοῦ κάθηται ἐγνωκὼς εἴργειν Ἀλέξανδρον, εἰ διαβαίνοι. καὶ εἶναι αὐτῷ στρατιὰν πολὺ μείζονα ἢ ξὺν ἧ ἐν Κιλικίᾳ ἐμάχετο. ταῦτα ἀκούσας Ἀλέξανδρος ἤει σπουδῇ ὡς ἐπὶ τὸν Τίγρητα. ὡς δὲ ἀφίκετο, οὔτε αὐτὸν Δαρεῖον καταλαμβάνει οὔτε τὴν φυλακήν, ἥντινα ἀπολελοίπει Δαρεῖος, ἀλλὰ διαβαίνει τὸν πόρον, χαλεπῶς μὲν δι’ ὀξύτητα τοῦ ῥοῦ, οὐδενὸς δὲ εἴργοντος.
[3, 4, 2] Il s’avance à travers la Mésopotamie, laissant à sa gauche l’Euphrate et les montagnes d’Arménie, ne marchant point de l’Euphrate vers Babylone par la route directe, mais choisissant celle qui, plus facile, fournissait abondamment des vivres, des fourrages, et où les chaleurs étaient plus tolérables. On rencontra quelques éclaireurs de l’armée de Darius qui s’étaient avancés trop avant, on les fit prisonniers : ils annoncèrent que Darius était campé sur les bords du Tigre, dont il se préparait à défendre le passage avec une armée plus nombreuse que celle qui avait combattu dans la Cilicie. Sur ce récit, Alexandre se porte en hâte vers le Tigre. Arrivé sur ses bords, il ne trouve ni Darius ni aucun corps pour l’arrêter ; il passe le fleuve sans autre obstacle que la rapidité de son cours.
Arrien, Les Expéditions d’Alexandre, trad., François-Charles Liskenne et Jean-Baptiste Sauvan, Anselin, 1835
331. À Gaugamèles, près des ruines de l’ancienne Ninive, l’armée du Grand Roi compte, selon Arrien, 40 000 cavaliers, 1 million de fantassins, environ deux cents chars à faux et quelques éléphants.
[III, 8] [7] Ξὺν ταύτῃ τῇ δυνάμει ἐστρατοπεδεύκει Δαρεῖος ἐν Γαυγαμήλοις πρὸς ποταμῷ Βουμήλῳ, ἀπέχων Ἀρβήλων τῆς πόλεως ὅσον ἑξακοσίους σταδίους, ἐν χώρῳ ὁμαλῷ πάντῃ. καὶ γὰρ καὶ ὅσα ἀνώμαλα αὐτοῦ ἐς ἱππασίαν, ταῦτα δὲ ἐκ πολλοῦ οἱ Πέρσαι τοῖς τε ἅρμασιν ἐπελαύνειν εὐπετῆ πεποιήκεσαν καὶ τῇ ἵππῳ ἱππάσιμα. ἦσαν γὰρ οἳ ἀνέπειθον Δαρεῖον ὑπὲρ τῆς πρὸς Ἰσσῷ γενομένης μάχης, ὅτι ἄρα ἐμειονέκτησε τῶν χωρίων τῇ στενότητι. καὶ Δαρεῖος οὐ χαλεπῶς ἐπείθετο. […] Δαρεῖος δὲ καὶ ὁ ξὺν Δαρείῳ στρατὸς οὕτως ὅπως τὴν ἀρχὴν ἐτάξαντο ἔμειναν τῆς νυκτὸς ξυντεταγμένοι, ὅτι οὔτε στρατόπεδον αὐτοῖς περιεβέβλητο ἀκριβὲς καὶ ἅμα ἐφοβοῦντο μή σφισι νύκτωρ ἐπιθοῖντο οἱ πολέμιοι. καὶ εἴπερ τι ἄλλο, καὶ τοῦτο ἐκάκωσε τοῖς Πέρσαις ἐν τῷ τότε τὰ πράγματα, ἡ στάσις ἡ πολλὴ ἡ ξὺν τοῖς ὅπλοις καὶ τὸ δέος, ὅ τι περ φιλεῖ πρὸ τῶν μεγάλων κινδύνων γίγνεσθαι, οὐκ ἐκ τοῦ παραυτίκα σχεδιασθέν, ἀλλ’ ἐν πολλῷ χρόνῳ μελετηθέν τε καὶ τὰς γνώμας αὐτοῖς δουλωσάμενον. […] Ἀλεξάνδρῳ δὲ ἡ στρατιὰ ἐκοσμήθη ὧδε. τὸ μὲν δεξιὸν αὐτῷ εἶχον τῶν ἱππέων οἱ ἑταῖροι, ὧν προετέτακτο ἡ ἴλη ἡ βασιλική, ἧς Κλεῖτος ὁ Δρωπίδου ἰλάρχης ἦν, ἐπὶ δὲ ταύτῃ ἡ Γλαυκίου ἴλη, ἐχομένη δ’ αὐτῆς ἡ Ἀρίστωνος, ἐπὶ δὲ ἡ Σωπόλιδος τοῦ Ἑρμοδώρου, ἐπὶ δὲ ἡ Ἡρακλείδου τοῦ Ἀντιόχου. […] Φιλώτας ἦρχεν ὁ Παρμενίωνος. τῆς δὲ φάλαγγος τῶν Μακεδόνων ἐχόμενον τῶν ἱππέων πρῶτον τὸ ἄγημα ἐτέτακτο τῶν ὑπασπιστῶν καὶ ἐπὶ τούτῳ οἱ ἄλλοι ὑπασπισταί. ἡγεῖτο δὲ αὐτῶν Νικάνωρ ὁ Παρμενίωνος. τούτων δὲ ἐχομένη ἡ Κοίνου τοῦ Πολεμοκράτους τάξις ἦν, μετὰ δὲ τούτους ἡ Περδίκκου τοῦ Ὀρόντου, […]. τὸ δὲ εὐώνυμον τῆς φάλαγγος τῶν Μακεδόνων ἡ Κρατεροῦ τοῦ Ἀλεξάνδρου τάξις εἶχε, καὶ αὐτὸς Κρατερὸς ἐξῆρχε τοῦ εὐωνύμου τῶν πεζῶν. καὶ ἱππεῖς ἐχόμενοι αὐτοῦ οἱ ξύμμαχοι, ὧν ἡγεῖτο Ἐριγύϊος ὁ Λαρίχου. τούτων δὲ ἐχόμενοι ὡς ἐπὶ τὸ εὐώνυμον κέρας οἱ Θεσσαλοὶ ἱππεῖς, ὧν ἦρχε Φίλιππος ὁ Μενελάου. ξύμπαν δὲ τὸ εὐώνυμον ἦγε Παρμενίων ὁ Φιλώτα, καὶ ἀμφ’ αὐτὸν οἱ τῶν Φαρσαλίων ἱππεῖς οἱ κράτιστοί τε καὶ πλεῖστοι τῆς Θεσσαλικῆς ἵππου ἀνεστρέφοντο. [3,5,4] Ἡ μὲν ἐπὶ μετώπου τάξις Ἀλεξάνδρῳ ὧδε κεκόσμητο. ἐπέταξε δὲ καὶ δευτέραν τάξιν ὡς εἶναι τὴν φάλαγγα ἀμφίστομον. καὶ παρηγγέλλετο τοῖς ἡγεμόσι τῶν ἐπιτεταγμένων, εἰ κυκλουμένους τοὺς σφῶν πρὸς τοῦ Περσικοῦ στρατεύματος κατίδοιεν, ἐπιστρέψαντας ἐς τὸ ἔμπαλιν δέχεσθαι τοὺς βαρβάρους. ἐς ἐπικαμπὴν δέ, εἴ που ἀνάγκη καταλαμβάνοι ἢ ἀναπτύξαι ἢ ξυγκλεῖσαι τὴν φάλαγγα, κατὰ μὲν τὸ δεξιὸν κέρας ἐχόμενοι τῆς βασιλικῆς ἴλης τῶν Ἀγριάνων ἐτάχθησαν οἱ ἡμίσεες, ὧν ἡγεῖτο Ἄτταλος, καὶ μετὰ τούτων οἱ Μακεδόνες οἱ τοξόται, ὧν Βρίσων ἦρχεν, ἐχόμενοι δὲ τῶν τοξοτῶν οἱ ἀρχαῖοι καλούμενοι ξένοι καὶ ἄρχων τούτων Κλέανδρος. προετάχθησαν δὲ τῶν τε Ἀγριάνων καὶ τῶν τοξοτῶν οἵ τε πρόδρομοι ἱππεῖς καὶ οἱ Παίονες, ὧν Ἀρέτης καὶ Ἀρίστων ἡγοῦντο. ξυμπάντων δὲ προτεταγμένοι ἦσαν οἱ μισθοφόροι ἱππεῖς, ὧν Μενίδας ἦρχε. τῆς δὲ βασιλικῆς ἴλης καὶ τῶν ἄλλων ἑταίρων προτεταγμένοι ἦσαν τῶν τε Ἀγριάνων καὶ τῶν τοξοτῶν οἱ ἡμίσεες, καὶ οἱ Βαλάκρου ἀκοντισταί. οὗτοι κατὰ <τὰ> ἅρματα τὰ δρεπανηφόρα ἐτετάχατο. Μενίδᾳ δὲ καὶ τοῖς ἀμφ’ αὐτὸν παρήγγελτο, εἰ περιϊππεύοιεν οἱ πολέμιοι τὸ κέρας σφῶν, ἐς πλαγίους ἐμβάλλειν αὐτοὺς ἐπικάμψαντας. τὰ μὲν ἐπὶ τοῦ δεξιοῦ κέρως οὕτως ἐτέτακτο Ἀλεξάνδρῳ. κατὰ δὲ τὸ εὐώνυμον ἐς ἐπικαμπὴν οἵ τε Θρᾷκες ἐτετάχατο, ὧν ἡγεῖτο Σιτάλκης, καὶ ἐπὶ τούτοις οἱ ξύμμαχοι ἱππεῖς, ὧν ἦρχε Κοίρανος, ἐπὶ δὲ οἱ Ὀδρύσαι ἱππεῖς, ὧν ἡγεῖτο Ἀγάθων ὁ Τυρίμμα. ξυμπάντων δὲ ταύτῃ προετάχθη ἡ ξενικὴ ἵππος ἡ τῶν μισθοφόρων, ὧν Ἀνδρόμαχος ὁ Ἱέρωνος ἦρχεν. ἐπὶ δὲ τοῖς σκευοφόροις οἱ ἀπὸ Θρᾴκης πεζοὶ ἐς φυλακὴν ἐτάχθησαν. <ἦν δὲ> ἡ πᾶσα στρατιὰ Ἀλεξάνδρου ἱππεῖς μὲν ἐς ἑπτακισχιλίους, πεζοὶ δὲ ἀμφὶ τὰς τέσσαρας μυριάδας.
[III, 8] [7] Darius vint camper avec toutes ces troupes dans la plaine de Gaugamèles, près du fleuve Bumèle, à six cents stades de la ville d’Arbèles, en rase campagne. Il avait eu le soin de faire aplanir toutes les inégalités du terrain qui auraient pu empêcher la manœuvre des chars ou de la cavalerie. En effet, ses courtisans attribuaient la défaite d’Issos à la difficulté des lieux ; Darius les crut facilement. […] Darius resta rangé en bataille toute la nuit. Il avait négligé de fortifier son camp, et il craignait une surprise. Rien ne nuisit davantage à son parti que cette longue attente sous les armes. Cette crainte qui se réveille à l’approche d’un grand combat, avait depuis longtemps pénétré dans le cœur de ses troupes. […] Alexandre disposa son armée dans l’ordre suivant : sa droite était composée de la cavalerie des Hétaires ; au premier rang la compagnie royale, sous les ordres de Clitus, fils de Dropidès : ensuite celles de Glaucias, d’Ariston, de Sopolis, fils d’Hermodore, d’Héraclide, fils d’Antiochus, […]. Philotas, fils de Parménion, eut le commandement général de cette cavalerie. Elle était appuyée sur l’infanterie, formée de la phalange macédonienne : on y distinguait l’Agéma, les Hypaspistes conduits par Nicanor, fils de Parménion ; les bataillons de Coenos, de Perdiccas de Méléagre, fils d’Oronte, […]. À la gauche de la phalange, la troupe de Cratère, fils d’Alexandre. Il commandait toute l’infanterie de cette aile, et Parménion en dirigeait toute la cavalerie composée des alliés sous les ordres d’Érigyos, fils de Larichos et des chevaux Thessaliens sous ceux de Philippe, fils de Ménélas. Parménion, fils de Philotas, avait autour de lui l’élite thessalienne, les Pharsaliens. [3, 5, 4] Tel était le front de la bataille. Derrière s’étendait une seconde ligne mobile dont les chefs avaient ordre de faire volte-face, si les Perses tentaient d’envelopper l’armée ; ils devaient étendre ou resserrer leur phalange au besoin. À la droite, près les compagnies royales, étaient disposés la moitié des Agrianes sous les ordres d’Attale, ensuite les archers macédoniens sous ceux de Brison, soutenus des vieilles bandes étrangères conduites par Cléandre. Devant les Agrianes on avait jeté la cavalerie légère et les Péoniens, commandés par Arétès et Ariston, et en avant était la cavalerie étrangère sous Ménidas. Le front de l’aile droite était couvert par l’autre moitié des Agrianes, des hommes de traits et des frondeurs sous Balacre, en face des chars armés de faux. Ménidas et sa troupe eurent l’ordre de prendre l’ennemi en flanc, s’il cherchait à les tourner. Telle était la disposition de l’aile droite. À la pointe de l’aile gauche, sur un front oblique, les Thraces de Sitalcès, la cavalerie alliée conduite par Coéranos, et celle des Odrisiens par Agathon ; en avant la cavalerie des étrangers à la solde, sous Andromaque ; l’infanterie thracienne couvrait les bagages. Toute l’armée d’Alexandre montait à sept mille chevaux et quarante mille hommes de pied.
Arrien, III, 8, 7-12, 5, Les Expéditions d’Alexandre, trad. François-Charles Liskenne et Jean-Baptiste Sauvan, 1835
La bataille fut décisive. Alexandre prend Arbèles et s’empare d’immenses trésors. Darius doit s’enfuir vers les Hautes Satrapies. Parvenu à Ecbatane, il recueille ceux qui ont survécu à la débâcle et arme les non-combattants. Il est rejoint par la cavalerie de Bessus et 2 000 mercenaires grecs.
En Grèce, la reprise de l’offensive de Sparte contre la Macédoine
En Europe, Agis III de Sparte pense le moment favorable pour une intervention militaire.
62. […] ἐπὶ δὲ τούτων εἰς τὴν Ἑλλάδα τῆς περὶ Ἄρβηλα μάχης διαδοθείσης πολλαὶ τῶν πόλεων ὑφορώμεναι τὴν αὔξησιν τῶν Μακεδόνων ἔγνωσαν, ἕως ἔτι τὰ Περσῶν πράγματα διαμένει, τῆς ἐλευθερίας ἀντέχεσθαι : [2] βοηθήσειν γὰρ αὐτοῖς Δαρεῖον καὶ χρημάτων τε πλῆθος χορηγήσειν πρὸς τὸ δύνασθαι ξενικὰς μεγάλας δυνάμεις συνίστασθαι καὶ τὸν Ἀλέξανδρον μὴ δυνήσεσθαι διαιρεῖν τὰς δυνάμεις. [3] εἰ δὲ περιόψονται τοὺς Πέρσας καταπολεμηθέντας, μονωθήσεσθαι τοὺς Ἕλληνας καὶ μηκέτι δυνήσεσθαι φροντίσαι τῆς ἑαυτῶν ἐλευθερίας. [4] προεκαλέσατο δὲ πρὸς τὴν ἀπόστασιν τοὺς Ἕλληνας καὶ ὁ περὶ τὴν Θρᾴκην νεωτερισμὸς κατὰ τοὺς ὑποκειμένους καιροὺς γενόμενος : [5] Μέμνων γὰρ ὁ καθεσταμένος στρατηγὸς τῆς Θρᾴκης, ἔχων δύναμιν καὶ φρονήματος ὢν πλήρης, ἀνέσεισε μὲν τοὺς βαρβάρους, ἀποστάτης δὲ γενόμενος Ἀλεξάνδρου καὶ ταχὺ μεγάλης δυνάμεως κυριεύσας φανερῶς ἀπεκαλύψατο πρὸς τὸν πόλεμον. [6] διόπερ Ἀντίπατρος πᾶσαν ἀναλαβὼν τὴν δύναμιν προῆλθε διὰ Μακεδονίας εἰς Θρᾴκην καὶ διεπολέμει πρὸς τὸν Μέμνονα. τούτου δὲ περὶ ταῦτ᾽ ὄντος οἱ Λακεδαιμόνιοι καιρὸν ἔχειν ὑπολαβόντες τοῦ παρασκευάσασθαι τὰ πρὸς τὸν πόλεμον παρεκάλουν τοὺς Ἕλληνας συμφρονῆσαι περὶ τῆς ἐλευθερίας.
[17,62] […] La nouvelle de la victoire d’Arbèles s’étant répandue dans la Grèce, plusieurs villes de la nation qui craignaient déjà l’accroissement des Macédoniens, songèrent à maintenir leur liberté, avant que la puissance des Perses fût absolument anéantie. [2] Ils espéraient encore que Darius qui avait amassé tant de trésors pour cette guerre, leur pourrait fournir de quoi lever des soldats étrangers qu’Alexandre ne voudrait pas séparer ses troupes pour venir s’opposer à eux : [3] qu’ainsi ils ne devaient pas souffrir que le vainqueur achevât la destruction d’un Empire, qui les laisserait seuls à défendre leur liberté. Une révolution arrivée en ce même temps dans une province considérable de leur voisinage, les soutenait encore dans le dessein qu’ils avaient de se mettre en armes. [5] Memnon établi pour commandant dans la Thrace se voyant une escorte considérable et cherchant lui-même à se distinguer, fit révolter les barbares de ces cantons, et se déclarant contré Alexandre, il lui fit une guerre ouverte. [6] Antipater chargé de défendre la Macédoine, passa aussitôt dans la Thrace et s’opposa aux entreprises de ce rebelle. En ce même temps les Lacédémoniens croyant l’occasion favorable se disposèrent aussi à la guerre, en invitant les autres Grecs à recouvrer leur liberté.
Diodore de Sicile, Bibliothèque historique, XVII, 62, 1-6, trad. abbé Jean Terrasson
Agis réunit huit mille Grecs qui s’étaient enfuis de Cilicie pour regagner leurs cités. Avec eux, il prépare la guerre contre le préfet de Macédoine Antipater. Il assiège Mégalopolis en Arcadie, où il trouve la mort face à Antipater en 330. Les Athéniens, prudents, ne sont pas intervenus : « ils recevaient d’Alexandre plus de distinctions que les autres Grecs »2. Mais, pour Quinte-Curce, il ne s’agit là que de « luttes accessoires »3, l’essentiel est, en effet, ailleurs, en Asie, où le devenir du monde est en jeu.
Les prises de Babylone et Suse : le ralliement des grands satrapes au conquérant macédonien
331-330. Babylone, hostile aux Achéménides, accueille les Macédoniens en libérateurs. L’abondance des approvisionnements et l’hospitalité de la cité incitent Alexandre de rester trente jours pour laisser son armée récupérer des épreuves. Il entre ensuite à Suse. Les centres névralgiques du pouvoir perse sont occupés.
[3,6,2] […] Ἀλέξανδρος γὰρ ἐξ Ἀρβήλων ὁρμηθεὶς τὴν ἐπὶ Βαβυλῶνος εὐθὺς προὐχώρει. ἤδη τε οὐ πόρρω Βαβυλῶνος ἦν καὶ τὴν δύναμιν ξυντεταγμένην ὡς ἐς μάχην ἦγε, καὶ οἱ Βαβυλώνιοι πανδημεὶ ἀπήντων αὐτῷ ξὺν ἱερεῦσί τε σφῶν καὶ ἄρχουσι, δῶρά τε ὡς ἕκαστοι φέροντες καὶ τὴν πόλιν ἐνδιδόντες καὶ τὴν ἄκραν καὶ τὰ χρήματα. Ἀλέξανδρος δὲ παρελθὼν εἰς τὴν Βαβυλῶνα τὰ ἱερά, ἃ Ξέρξης καθεῖλεν, ἀνοικοδομεῖν προσέταξε Βαβυλωνίοις, τά τε ἄλλα καὶ τοῦ Βήλου τὸ ἱερόν, ὃν μάλιστα θεῶν τιμῶσι Βαβυλώνιοι. σατράπην δὲ κατέστησε Βαβυλῶνος Μαζαῖον, Ἀπολλόδωρον δὲ τὸν Ἀμφιπολίτην στρατηγὸν τῶν μετὰ Μαζαίου ὑπολειπομένων στρατιωτῶν, καὶ Ἀσκληπιόδωρον τὸν Φίλωνος τοὺς φόρους ἐκλέγειν. κατέπεμψε δὲ καὶ ἐς Ἀρμενίαν Μιθρήνην σατράπην, ὃς τὴν ἐν Σάρδεσιν ἀκρόπολιν Ἀλεξάνδρῳ ἐνέδωκεν. ἔνθα δὴ καὶ τοῖς Χαλδαίοις ἐνέτυχεν, καὶ ὅσα ἐδόκει Χαλδαίοις ἀμφὶ τὰ ἱερὰ τὰ ἐν Βαβυλῶνι ἔπραξε, τά τε ἄλλα καὶ τῷ Βήλῳ καθ’ ἃ ἐκεῖνοι ἐξηγοῦντο ἔθυσεν. [3,6,3] Αὐτὸς δὲ ἐπὶ Σούσων ἐστέλλετο. καὶ ἐντυγχάνει αὐτῷ κατὰ τὴν ὁδὸν ὅ τε παῖς τοῦ Σουσίων σατράπου καὶ παρὰ Φιλοξένου ἐπιστολεύς. Φιλόξενον γὰρ εὐθὺς ἐκ τῆς μάχης ἐπὶ Σούσων ἐστάλκει Ἀλέξανδρος. τῇ δὲ ἐπιστολῇ τῇ παρὰ Φιλοξένου ἐνεγέγραπτο, ὅτι τήν τε πόλιν οἱ Σούσιοι παραδεδώκασιν καὶ τὰ χρήματα πάντα σῶά ἐστιν Ἀλεξάνδρῳ. ἀφίκετο δὲ ἐς Σοῦσα Ἀλέξανδρος ἐκ Βαβυλῶνος ἐν ἡμέραις εἴκοσι. καὶ παρελθὼν ἐς τὴν πόλιν τά τε χρήματα παρέλαβεν ὄντα ἀργυρίου τάλαντα ἐς πεντακισμύρια καὶ τὴν ἄλλην κατασκευὴν τὴν βασιλικήν. πολλὰ δὲ καὶ ἄλλα κατελήφθη αὐτοῦ, ὅσα Ξέρξης ἀπὸ τῆς Ἑλλάδος ἄγων ἦλθε, τά τε ἄλλα καὶ Ἁρμοδίου καὶ Ἀριστογείτονος χαλκαῖ εἰκόνες. καὶ ταύτας Ἀθηναίοις ὀπίσω πέμπει Ἀλέξανδρος, καὶ νῦν κεῖνται Ἀθήνησιν ἐν Κεραμεικῷ αἱ εἰκόνες, ἧ ἄνιμεν ἐς πόλιν, καταντικρὺ μάλιστα τοῦ Μητρῴου, <οὐ> μακρὰν τῶν Εὐδανέμων τοῦ βωμοῦ. ὅστις δὲ μεμύηται ταῖν θεαῖν ἐν Ἐλευσῖνι, οἶδε τοῦ Εὐδανέμου τὸν βωμὸν ἐπὶ τοῦ δαπέδου ὄντα.
[3,6,2] […] Alexandre en sortant d’Arbelles marcha sur Babylone. Près de ses murs il range son armée en bataille. Tous les habitants sortent à sa rencontre, précédés des prêtres et des magistrats, et lui livrant la ville et la citadelle, apportent des présents, des trésors. Le conquérant entre dans Babylone il ordonne de relever les temples détruits par Xerxès, particulièrement celui de Bélus, auquel les Babyloniens rendent un culte spécial. Mazée est nommé satrape ; Apollodore d’Amphipolis, commandant des troupes. Asclépiodore est chargé du recouvrement des tributs ; Mythrinès, qui avait livré la ville de Sardes, obtient le gouvernement de l’Arménie. Alexandre a des conférences avec les mages, les consulte sur tout ce qui concerne la restauration des temples, et sacrifie, d’après leurs conseils, à Bélus. [3,6,3] Il marche vers Suse. Le fils du satrape vient à sa rencontre avec un courrier, de Philoxène qu’Alexandre avait dépêché à l’issue du combat vers cette ville, lequel lui annonce que Suse et ses trésors sont en son pouvoir. Alexandre arrive en cette ville le vingtième jour de marche4 ; il s’empare des trésors ; l’argent seul montait à cinquante mille talents. Parmi les meubles de prix, on trouva plusieurs objets que Xerxès avait enlevés de la Grèce entre autres les statues d’airain d’Harmodius et d’Aristogiton. Alexandre les renvoya aux Athéniens : on les voit encore aujourd’hui dans le Céramique, du côté où l’on monte vers la ville, vis-à-vis le temple de Cybèle ; près l’autel des Eudanemiens qui s’élève dans le portique connu de tous les initiés aux mystères d’Éleusis.
Arrien, Les Expéditions d’Alexandre, trad., François-Charles Liskenne et Jean-Baptiste Sauvan, Anselin, 1835
[5] εἰς δὲ τὴν Σουσιανὴν καταντήσας ἀκινδύνως παρέλαβε τὰ περιβόητα ἐν Σούσοις βασίλεια, ἑκουσίως Ἀβουλεύτου τοῦ σατράπου παραδόντος αὐτῷ τὴν πόλιν, ὡς μὲν ἔνιοι γεγράφασι, προστάξαντος Δαρείου τοῖς πεπιστευμένοις ὑπ᾽ αὐτοῦ. τοῦτο δὲ πρᾶξαι τὸν βασιλέα τῶν Περσῶν, ὅπως ὁ μὲν Ἀλέξανδρος εἰς περισπασμοὺς ἀξιολόγους καὶ παραλήψεις ἐπιφανεστάτων πόλεων καὶ θησαυρῶν μεγάλων ἐμπεσὼν ἐν ἀσχολίαις ὑπάρχῃ, ὁ δὲ Δαρεῖος τῇ φυγῇ λαμβάνῃ χρόνον εἰς τὴν τοῦ πολέμου παρασκευήν.
[5] A peine fut-il entré dans la Susiane, que le satrape Abulete lui livra de son propre mouvement la ville et surtout le magnifique palais de Suse. Quelques-uns néanmoins ont écrit que ce gouverneur avait suivi en cette occasion les ordres secrets de Darius, dont l’intention était qu’Alexandre se laissant séduire par des acquisitions si magnifiques et par la vue de tant de trésors qui lui coûtaient si peu, tombât insensiblement dans la mollesse et ne songeât plus à la guerre ; pendant que Darius travaillerait de son côté à se relever de sa chute et à rétablir son empire.
Diodore de Sicile, Bibliothèque historique, XVII, 65, 5, trad. abbé Jean Terrasson
Le passage des Portes Persiques : une étape décisive vers le cœur de l’empire perse
Ariobarzane tient les Portes Persiques avec quarante mille fantassins et sept cents cavaliers. Le défilé est bloqué par un rempart.
[3,6,9] Τότε μὲν δὴ αὐτοῦ κατεστρατοπεδεύσατο. τῇ δὲ ὑστεραίᾳ ξυντάξας τὴν στρατιὰν ἐπῆγε τῷ τείχει. ὡς δὲ ἄπορόν τε διὰ δυσχωρίαν ἐφαίνετο αἱρεθῆναι καὶ πολλὰς πληγὰς οἱ ἀμφ’ αὐτὸν ἐλάμβανον ἐξ ὑπερδεξίου τε χωρίου καὶ ἀπὸ μηχανῶν βαλλόμενοι, τότε μὲν ἀποχωρεῖ ἐς τὸ στρατόπεδον. τῶν δὲ αἰχμαλώτων φρασάντων ἄλλην ὁδὸν περιάξειν αὐτόν, ὡς εἴσω παρελθεῖν τῶν πυλῶν, ἐπεὶ τραχεῖαν τὴν ὁδὸν καὶ στενὴν ἐπύθετο, Κρατερὸν μὲν αὐτοῦ καταλείπει ἐπὶ στρατοπέδου τήν τε αὑτοῦ τάξιν ἔχοντα καὶ τὴν Μελεάγρου καὶ τῶν τοξοτῶν ὀλίγους καὶ τῶν ἱππέων ἐς πεντακοσίους, καὶ προστάττει αὐτῷ, ἐπειδὰν ἐκπεριεληλυθότα αὑτὸν αἴσθηται καὶ προσάγοντα ἤδη τῷ στρατοπέδῳ τῶν Περσῶν [αἰσθήσεσθαι δὲ οὐ χαλεπῶς, σημανεῖν γὰρ αὐτῷ τὰς σάλπιγγας], τότε δὲ προσβαλεῖν τῷ τείχει. αὐτὸς δὲ προὐχώρει νύκτωρ καὶ διελθὼν ὅσον ἑκατὸν σταδίους ἀναλαμβάνει τοὺς ὑπασπιστὰς καὶ τὴν Περδίκκου τάξιν καὶ τῶν τοξοτῶν τοὺς κουφοτάτους καὶ τοὺς Ἀγριᾶνας καὶ τῶν ἑταίρων τὴν ἴλην τὴν βασιλικὴν καὶ τετραρχίαν πρὸς ταύτῃ μίαν ἱππικήν, καὶ ξὺν τούτοις ἤει ἐπικάμψας ὡς ἐπὶ τὰς πύλας, ἵν’ οἱ αἰχμάλωτοι ἦγον. [3,6,10] Ἀμύνταν δὲ καὶ Φιλώταν καὶ Κοῖνον τὴν ἄλλην στρατιὰν ὡς ἐπὶ τὸ πεδίον ἄγειν καὶ τὸν ποταμόν, ὃν ἐχρῆν περᾶσαι ἰόντα ἐπὶ Πέρσας, γεφυροῦν ἐκέλευσεν. αὐτὸς δὲ ἤει ὁδὸν χαλεπὴν καὶ τραχεῖαν καὶ ταύτην δρόμῳ τὸ πολὺ ἦγε. τὴν μὲν δὴ πρώτην φυλακὴν τῶν βαρβάρων πρὶν φάους ἐπιπεσὼν διέφθειρε καὶ τῶν δευτέρων τοὺς πολλούς. τῆς τρίτης δὲ οἱ πλείους διέφυγον, καὶ οὐδὲ οὗτοι ἐς τὸ στρατόπεδον τὸ Ἀριοβαρζάνου ἔφυγον, ἀλλ’ αὐτόθεν ὡς εἶχον ἐς τὰ ὄρη πεφοβημένοι, ὥστε ἔλαθεν ὑπὸ τὴν ἕω ἐπιπεσὼν τῷ στρατοπέδῳ τῶν πολεμίων. καὶ ἅμα μὲν προσέβαλλε τῇ τάφρῳ, ἅμα δὲ αἱ σάλπιγγες ἐσήμαινον τοῖς ἀμφὶ Κρατερόν, καὶ Κρατερὸς προσῆγε τῷ προτειχίσματι.
[3,6,9] Alexandre campe aux pieds, et dès le lendemain entreprend l’attaque. La position du lieu la rendait difficile ; les Macédoniens étaient criblés de blessures par les traits ou par le jeu des machines. Alexandre fit suspendre l’action. Quelques-uns des prisonniers lui promettent alors de le mener par un chemin détourné. Instruit de la difficulté de ce passage, il laisse Cratèros dans le camp avec la troupe qu’il commande, celle de Méléagre, quelques archers et cinq cents chevaux. Il lui ordonne de livrer l’assaut, dès qu’il sera instruit par le son des trompettes du passage effectué, et de l’attaque qu’il livrera aux Perses. Lui-même, à la tête des Hypaspistes, des troupes de Perdiccas, des plus habiles archers, de la première compagnie de ses Hétaires, renforcée par un peloton de cavalerie5, s’avance pendant la nuit à cent stades, fait un détour et s’approche des Pyles. [3,6,10] Amyntas, Philotas et Coenus conduisent le reste de l’armée par la plaine. Ils doivent jeter un pont sur le fleuve qui leur ferme l’entrée de la Perse. Alexandre poursuit sa route rapidement et presque toujours à la course, malgré les difficultés. Arrivé avant le jour au premier poste des Barbares, il égorge les gardes avancées, traite, de même le second poste ; ceux du troisième fuient à son approche, non dans le camp d’Ariobarzane, mais sur les hauteurs où la crainte les pousse ; de sorte qu’au point du jour Alexandre attaque à l’improviste le camp de l’ennemi. À peine on parut devant les retranchements, que Cratérus, averti par l’éclat des trompettes, donne l’assaut.
Arrien, III, 18, 3-7, Les Expéditions d’Alexandre, trad., François-Charles Liskenne et Jean-Baptiste Sauvan, 1835
L’incendie du palais de Pasagardès : l’affirmation du conquérant et la vengeance des Grecs
Le dernier verrou a sauté. La route de Persépolis est ouverte. Il y arrive sans laisser le temps à la garnison de piller le trésor. À Pasagardès, là où se trouve le tombeau de Cyrus Ier, il met le feu au palais royal malgré les conseils de Parménion. Pour Alexandre, fin politique, le message destiné aux Grecs est clair : l’incendie de l’Acropole est vengé.
[3] σφόδρα γὰρ ἀλλοτρίως ἔχων πρὸς τοὺς ἐγχωρίους ἠπίστει τε αὐτοῖς καὶ τὴν Περσέπολιν εἰς τέλος ἔσπευδε καταφθεῖραι. οὐκ ἀνοίκειον δ᾽ εἶναι νομίζομεν περὶ τῶν ἐν ταύτῃ τῇ πόλει βασιλείων διὰ τὴν πολυτέλειαν τῆς κατασκευῆς βραχέα διελθεῖν. [4] οὔσης γὰρ ἄκρας ἀξιολόγου περιείληφεν αὐτὴν τριπλοῦν τεῖχος, οὗ τὸ μὲν πρῶτον ἀναλήμματι πολυδαπάνῳ κατεσκεύαστο καὶ τὸ ὕψος εἶχε πηχῶν ἑκκαίδεκα ἐπάλξεσι κεκοσμημένον, [5] τὸ δὲ δεύτερον τὴν μὲν ἄλλην κατασκευὴν ὁμοίαν ἔχει τῷ προειρημένῳ, τὸ δ᾽ ὕψος διπλάσιον. ὁ δὲ τρίτος περίβολος τῷ σχήματι μέν ἐστι τετράπλευρος, τὸ δὲ τούτου τεῖχος ὕψος ἔχει πηχῶν ἑξήκοντα, λίθῳ σκληρῷ καὶ πρὸς διαμονὴν αἰωνίαν εὖ πεφυκότι κατεσκευασμένον. [6] ἑκάστη δὲ τῶν πλευρῶν ἔχει πύλας χαλκᾶς καὶ παρ᾽ αὐτὰς σταυροὺς χαλκοῦς εἰκοσιπήχεις, οὓς μὲν πρὸς τὴν ἐκ τῆς θέας κατάπληξιν, ἃς δὲ πρὸς ἀσφάλειαν ἡρμοσμένας. [7] ἐν δὲ τῷ πρὸς ἀνατολὰς μέρει τῆς ἄκρας τέτταρα πλέθρα διεστηκὸς ὄρος ἐστὶν τὸ καλούμενον βασιλικόν, ἐν ᾧ τῶν βασιλέων ὑπῆρχον οἱ τάφοι. πέτρα γὰρ ἦν κατεξαμμένη καὶ κατὰ μέσον οἴκους ἔχουσα πλείονας, ἐν οἷς σηκοὶ τῶν τετελευτηκότων ὑπῆρχον, πρόσβασιν μὲν οὐδεμίαν ἔχοντες χειροποίητον, ὑπὸ ὀργάνων δέ τινων χειροποιήτων ἐξαιρομένων τῶν νεκρῶν δεχόμενοι τὰς ταφάς. [8] κατὰ δὲ τὴν ἄκραν ταύτην ἦσαν καταλύσεις βασιλικαὶ καὶ στρατηγικαὶ πλείους πολυτελεῖς ταῖς κατασκευαῖς καὶ θησαυροὶ πρὸς τὴν τῶν χρημάτων παραφυλακὴν εὐθέτως κατεσκευασμένοι. [72] ὁ δ᾽ Ἀλέξανδρος ἐπινίκια τῶν κατορθωμάτων ἐπιτελῶν θυσίας τε μεγαλοπρεπεῖς τοῖς θεοῖς συνετέλεσεν καὶ τῶν φίλων λαμπρὰς ἑστιάσεις ἐποιήσατο. καὶ δή ποτε τῶν ἑταίρων εὐωχουμένων καὶ τοῦ μὲν πότου προβαίνοντος, τῆς δὲ μέθης προϊούσης κατέσχε λύσσα ἐπὶ πολὺ τὰς ψυχὰς τῶν οἰνωμένων. [2] ὅτε δὴ καὶ μία τῶν παρουσῶν γυναικῶν, ὄνομα μὲν Θαΐς, Ἀττικὴ δὲ τὸ γένος, εἶπεν κάλλιστον Ἀλεξάνδρῳ τῶν κατὰ τὴν Ἀσίαν πεπραγμένων ἔσεσθαι, ἐὰν κωμάσας μετ᾽ αὐτῶν ἐμπρήσῃ τὰ βασίλεια καὶ τὰ Περσῶν περιβόητα γυναικῶν χεῖρες ἐν βραχεῖ καιρῷ ποιήσωσιν ἄφαντα. [3] τούτων δὲ ῥηθέντων εἰς ἄνδρας νέους καὶ διὰ τὴν μέθην ἀλόγως μετεωριζομένους, ὡς εἰκός, ἄγειν τις ἀνεβόησε καὶ δᾷδας ἅπτειν καὶ τὴν εἰς τὰ τῶν Ἑλλήνων ἱερὰ παρανομίαν ἀμύνασθαι παρεκελεύετο. [4] συνεπευφημούντων δὲ καὶ ἄλλων καὶ λεγόντων μόνῳ τὴν πρᾶξιν ταύτην προσήκειν Ἀλεξάνδρῳ καὶ τοῦ βασιλέως συνεξαρθέντος τοῖς λόγοις πάντες ἀνεπήδησαν ἐκ τοῦ πότου καὶ τὸν ἐπινίκιον κῶμον ἄγειν Διονύσῳ παρήγγειλαν. [5] ταχὺ δὲ πλήθους λαμπάδων ἀθροισθέντος καὶ γυναικῶν μουσουργῶν εἰς τὸν πότον παρειλημμένων μετ᾽ ᾠδῆς καὶ αὐλῶν καὶ συρίγγων προῆγεν ὁ βασιλεὺς ἐπὶ τὸν κῶμον, καθηγουμένης τῆς πράξεως Θαΐδος τῆς ἑταίρας. [6] αὕτη δὲ μετὰ τὸν βασιλέα πρώτη τὴν δᾷδα καιομένην ἠκόντισεν εἰς τὰ βασίλεια : καὶ τῶν ἄλλων ταὐτὰ πραξάντων ταχὺ πᾶς ὁ περὶ τὰ βασίλεια τόπος κατεφλέχθη διὰ τὸ μέγεθος τῆς φλογὸς καὶ τὸ πάντων παραδοξότατον, τὸ Ξέρξου τοῦ Περσῶν βασιλέως γενόμενον ἀσέβημα περὶ τὴν ἀκρόπολιν τῶν Ἀθηναίων μία γυνὴ πολῖτις τῶν ἀδικηθέντων ἐν παιδιᾷ πολλοῖς ὕστερον ἔτεσι μετῆλθε τοῖς αὐτοῖς πάθεσιν.
[3] Mais il n’en voulut pas laisser la moindre chose à Persépolis dont il haïssait les habitants, auxquels il ne se fiait en aucune forte et dont il voulait même détruire la ville de fond en comble6. Nous croyons au reste devoir faire ici quelque détail qui fasse connaître quelle était la magnificence de Persépolis7. [4] La citadelle qui était très grande était environnée d’un triple mur, dont le premier ou l’extérieur n’avait dû être construit qu’avec des frais immenses. Il avait seize coudées de haut et il était accompagné de toutes les défenses convenables. [5] Le second était exactement semblable au premier, excepté qu’il était d’une hauteur exactement double. Le dernier enfin était de forme carrée et de la hauteur de soixante coudées, et tout entier d’une pierre très dure et propre à résister à la durée de tous les siècles. [6] Chacun de ces quatre côtés avait des partes d’airain et des palissades de même métal de la hauteur de vingt coudées, qui les défendaient et qui étaient capables seules d’inspirer de la terreur à ceux qui auraient voulu les attaquer. [7] Du côté de l’orient, il y avait à quatre cents pieds de la ville une montagne qu’on appelait le mont royal. [8] Là étaient les tombeaux des Rois. On n’y arrivait par aucun chemin tracé. Mais les corps étaient portés à leur place par des machines de suspension faites exprès. Dans la citadelle de ce lieu, il y avait des logements pour le Roi et pour tous les gens de guerre ; ces logements étaient fournis de toutes les commodités de la vie ; et on y avait ménagé des caves propres à enfermer des trésors. [72] Alexandre fit offrir là aux dieux des sacrifices de victoire pour leur rendre grâce de ses succès, et il y traita magnifiquement ses amis et ses officiers. Enfin tous les conviés étant rassasiés et le vin ayant pris le dessus dans toutes les têtes, on en vint jusqu’à la fureur et à la rage. [2] Une des courtisanes qui avaient été de leur repas, nommée Thaïs, et Athénienne de naissance, s’avisa de dire que la plus belle chose qu’Alexandre pût faire en Asie était qu’a la fin d’un repas où il avait admis des femmes à sa table, il fit brûler et disparaître par leurs mains en un moment le plus fameux édifice de la Perse. [3] Cette proposition présentée à de jeunes gens à qui le vin avait déjà fait perdre la tête, leur fit demander des flambeaux allumés pour venger, disaient-ils, l’impiété commise auparavant par les Perses à l’égard des temples de la Grèce. [4] Ils vinrent même à dire que c’était à Alexandre lui-même à commencer cette expédition. Le roi, flatté de ce discours, les fit tous lever de table et se mit à leur tête : ils disaient entre eux qu’ils allaient offrir à Dionysos une libation de victoire. [5] En un moment un grand nombre de flambeaux furent allumés, les femmes tinrent lieu de musiciens : et le roi guidé par la courtisane Thaïs, marcha au son des fifres et des flûtes comme à une Bacchanale. [6] Thaïs jeta d’abord après le roi son flambeau dans le palais, et tout le reste de la troupe ayant suivi son exemple, le palais entier fut bientôt embrasé par l’étendue qu’on avait donnée à cet incendie volontaire. Ainsi par un événement remarquable, une femme de la plus vile profession conduite uniquement par un esprit de débauche vengea la ville d’Athènes où elle était née, du sacrilège commis autrefois et bien des années auparavant, par le roi Xerxès dans le temple de Minerve.
Diodore de Sicile, Bibliothèque historique, XVII, 71, 3 –72, 6, trad. abbé Jean Terrasson
Voici la version d’Arrien.
[3, 6, 11] […] σατράπην μὲν δὴ Περσῶν κατέστησε Φρασαόρτην τὸν Ῥεομίθρου παῖδα. τὰ βασίλεια δὲ τὰ Περσικὰ ἐνέπρησε, Παρμενίωνος σώζειν ξυμβουλεύοντος, τά τε ἄλλα καὶ ὅτι οὐ καλὸν αὑτοῦ κτήματα ἤδη ἀπολλύναι καὶ ὅτι οὐχ ὡσαύτως προσέξουσιν αὐτῷ οἱ κατὰ τὴν Ἀσίαν ἄνθρωποι, ὡς οὐδὲ αὐτῷ ἐγνωκότι κατέχειν τῆς Ἀσίας τὴν ἀρχήν, ἀλλὰ ἐπελθεῖν μόνον νικῶντα. ὁ δὲ τιμωρήσασθαι ἐθέλειν Πέρσας ἔφασκεν ἀνθ’ ὧν ἐπὶ τὴν Ἑλλάδα ἐλάσαντες τάς τε Ἀθήνας κατέσκαψαν καὶ τὰ ἱερὰ ἐνέπρησαν, καὶ ὅσα ἄλλα κακὰ τοὺς Ἕλληνας εἰργάσαντο, ὑπὲρ τούτων δίκας λαβεῖν. ἀλλ’ οὐδ’ ἐμοὶ δοκεῖ σὺν νῷ δρᾶσαι τοῦτό γε Ἀλέξανδρος οὐδὲ εἶναί τις αὕτη Περσῶν τῶν πάλαι τιμωρία.
[3, 6, 11] […] Alexandre établit Phrasaorte satrape des Perses, et brûle le palais des rois, contre l’avis de Parménion qui demande en vain qu’on l’épargne. C’était, disait-il, ruiner sans aucun avantage ses conquêtes ; c’était aigrir les Asiatiques qui s’imagineraient qu’Alexandre n’avait d’autre but que de ravager l’Asie sans vouloir la conserver. Mais celui-ci : « Une armée perse est venue en Grèce, a détruit Athènes, brûlé nos temples, dévasté tout le pays : je dois cette vengeance aux Grecs. » Alexandre en agit ici avec peu de prudence, et ne vengea nullement l’outrage que les anciens Perses avaient fait à la Grèce.
Arrien, Les Expéditions d’Alexandre, trad., François-Charles Liskenne et Jean-Baptiste Sauvan, Anselin, 1835
Fuite et mort de Darius : Alexandre devient le nouveau grand Roi d’Orient
330. À son approche d’Ecbatane il apprend que Darius, n’ayant pas reçu les renforts de ses alliés scythes et cadusies, ne peut l’affronter en bataille rangée. Le Roi s’est enfui avec le trésor de Médie (environ sept mille talents selon Arrien) et une armée (toujours selon Arrien) de trois mille cavaliers et six mille fantassins.
[3,7,3] Ἐλθὼν δὲ ἐς Ἐκβάτανα Ἀλέξανδρος τοὺς μὲν Θετταλοὺς ἱππέας καὶ τοὺς ἄλλους ξυμμάχους ἀποπέμπει ὀπίσω ἐπὶ θάλασσαν, τόν τε μισθὸν ἀποδοὺς αὐτοῖς ἐντελῆ τὸν ξυντεταγμένον καὶ δισχίλια παρ’ αὑτοῦ τάλαντα ἐπιδούς. ὅστις δὲ ἰδίᾳ βούλοιτο ἔτι μισθοφορεῖν παρ’ αὐτῷ, ἀπογράφεσθαι ἐκέλευσε. καὶ ἐγένοντο οἱ ἀπογραψάμενοι οὐκ ὀλίγοι. Ἐπόκιλλον δὲ τὸν Πολυειδοῦς ἔταξε καταγαγεῖν αὐτοὺς ὡς ἐπὶ θάλασσαν, ἱππέας ἄλλους ἔχοντα ἐς φυλακὴν αὐτῶν. οἱ γὰρ Θεσσαλοὶ τοὺς ἵππους αὐτοῦ ἀπέδοντο. ἐπέστειλε δὲ καὶ Μένητι, ἐπειδὰν ἀφίκωνται ἐπὶ θάλασσαν, ἐπιμεληθῆναι ὅπως ἐπὶ τριήρων κομισθήσονται ἐς Εὔβοιαν. [3,7,4] Παρμενίωνα δὲ προσέταξε τὰ χρήματα τὰ ἐκ Περσῶν κομιζόμενα εἰς τὴν ἄκραν τὴν ἐν Ἐκβατάνοις καταθέσθαι καὶ Ἁρπάλῳ παραδοῦναι. Ἅρπαλον γὰρ ἐπὶ τῶν χρημάτων ἀπέλιπε καὶ φυλακὴν τῶν χρημάτων Μακεδόνας ἐς ἑξακισχιλίους καὶ ἱππέας καὶ ψιλοὺς ὀλίγους. αὐτὸν δὲ Παρμενίωνα τοὺς ξένους ἀναλαβόντα καὶ τοὺς Θρᾷκας καὶ ὅσοι ἄλλοι ἱππεῖς ἔξω τῆς ἵππου τῆς ἑταιρικῆς παρὰ τὴν χώραν τὴν Καδουσίων ἐλαύνειν ἐς Ὑρκανίαν. Κλείτῳ δὲ τῷ τῆς βασιλικῆς ἴλης ἡγεμόνι ἐπέστειλεν, ἐπειδὰν ἐκ Σούσων εἰς Ἐκβάτανα ἀφίκηται, κατελέλειπτο γὰρ ἐν Σούσοις ἀρρωστῶν, ἀναλαβόντα τοὺς Μακεδόνας τοὺς ἐπὶ τῶν χρημάτων τότε ὑπολειφθέντας ἰέναι τὴν ἐπὶ Παρθυαίους, ἵνα καὶ αὐτὸς ἥξειν ἔμελλεν.
[3,7,3] Arrivé à Ecbatane, Alexandre renvoie vers les côtes la cavalerie thessalienne et des autres alliés, sous la conduite d’Epocillus, escortés de quelques chevaux, parce qu’il retint les leurs. Il ajouta deux mille talents à leur solde, et ne garda près de lui que ceux d’entre eux qui voulurent y rester ; ils se trouvèrent en assez grand nombre. Il écrit à Menés de fournir aux autres les bâtiments nécessaires pour les conduire vers l’Eubée. [3,7,4] Il donne ordre à Parménion de rassembler tous les trésors de la Perse dans le fort d’Ecbatane, sous la garde d’Harpalus, et de plusieurs affidés qui défendraient la place avec six mille Macédoniens et quelques chevaux ; Parménion doit passer ensuite en Hyrcanie par le territoire des Cadusiens avec les étrangers, les Thraces et le reste de la cavalerie, excepté celle des Hétaires. Alexandre écrit à Clitus, commandant les compagnies royales, et qu’une maladie retenait à Suse, de venir le rejoindre chez les Parthes, en prenant à son passage les Macédoniens laissés à Ecbatane.
Arrien, Anabase, Les Expéditions d’Alexandre, trad., François-Charles Liskenne et Jean-Baptiste Sauvan, 1835
Le Roi fuit vers la mer Caspienne. Ses derniers fidèles sont des mercenaires grecs. Alexandre marche contre Darius. Une course poursuite vertigineuse commence. Comme il avançait à grande vitesse, beaucoup de soldats furent laissés en arrière, à bout de force, et beaucoup de chevaux mouraient. Il franchit les Portes Caspiennes et avance jusqu’aux limites des territoires habités. Il apprend alors, en Parthiène, que Darius est prisonnier de Bessus, satrape de Bactriane, et de Barsaentès, satrape de d’Arachosie et de Drangiane.
[3,7,7] Ταῦτα ἀκούσαντι Ἀλεξάνδρῳ ἀνὰ κράτος διωκτέα ἐφαίνετο. καὶ ἤδη μὲν ἐξέκαμνον οἵ τε ἄνδρες καὶ οἱ ἵπποι ὑπὸ τῇ ταλαιπωρίᾳ τῇ ξυνεχεῖ. ἀλλὰ καὶ ὣς ἦγε, καὶ διελθὼν ὁδὸν πολλὴν τῆς τε νυκτὸς καὶ τῆς ἐπὶ ταύτῃ ἡμέρας ἔστε ἐπὶ μεσημβρίαν ἀφικνεῖται ἔς τινα κώμην, ἵνα τῇ προτεραίᾳ ἐστρατοπεδεύκεσαν οἱ Δαρεῖον ἄγοντες. ἐνταῦθα ἀκούσας ὅτι νυκτὸς ποιεῖσθαι τὴν πορείαν ἐγνωσμένον εἴη τοῖς βαρβάροις, ἤλεγχε τοὺς προσχώρους, εἰ δή τινα εἰδεῖεν ἐπιτομωτέραν ὁδὸν ἐπὶ τοὺς φεύγοντας. οἱ δὲ εἰδέναι μὲν ἔφασαν, ἐρήμην δὲ εἶναι τὴν ὁδὸν δι’ ἀνυδρίαν. ὁ δὲ ταύτην ἄγειν ἐκέλευσε. καὶ γνοὺς ὅτι οὐχ ἕψονται οἱ πεζοὶ αὐτῷ σπουδῇ ἐλαύνοντι τῶν μὲν ἱππέων ἐς πεντακοσίους κατεβίβασεν ἀπὸ τῶν ἵππων, τοὺς ἡγεμόνας δὲ τῶν πεζῶν καὶ τῶν ἄλλων ἐπιλεξάμενος τοὺς κρατιστεύοντας ἐπιβῆναι τῶν ἵππων ἐκέλευσεν οὕτως ὅπως οἱ πεζοὶ ὡπλισμένοι ἦσαν. Νικάνορα δὲ τὸν τῶν ὑπασπιστῶν ἡγεμόνα καὶ Ἄτταλον τὸν τῶν Ἀγριάνων κατὰ τὴν ὁδόν, ἥντινα οἱ ἀμφὶ Βῆσσον προὐκεχωρήκεσαν, τοὺς ὑπολειφθέντας ἄγειν ἐκέλευσε, καὶ τούτους ὡς κουφότατα ἐσταλμένους, τοὺς δὲ ἄλλους πεζοὺς ἐν τάξει ἕπεσθαι. αὐτὸς δὲ ἀμφὶ δείλην ἄγειν ἀρξάμενος δρόμῳ ἡγεῖτο. διελθὼν δὲ τῆς νυκτὸς σταδίους ἐς τετρακοσίους ὑπὸ τὴν ἕω ἐπιτυγχάνει τοῖς βαρβάροις ἀτάκτως ἰοῦσι καὶ ἀνόπλοις, ὥστε ὀλίγοι μέν τινες αὐτῶν ὡς ἀμυνούμενοι ὥρμησαν, οἱ δὲ πολλοὶ εὐθὺς ὡς Ἀλέξανδρον αὐτὸν κατεῖδον οὐδὲ ἐς χεῖρας ἐλθόντες ἔφευγον. καὶ οἱ τραπέντες ἐς ἀλκὴν ὀλίγων πεσόντων καὶ οὗτοι ἔφυγον. Βῆσσος δὲ καὶ οἱ ξὺναὐτῷ τέως μὲν ἐφ’ ἁρμαμάξης Δαρεῖον μετὰ σφῶν ἐκόμιζον. ὡς δὲ ὁμοῦ ἤδη ἦν Ἀλέξανδρος, Δαρεῖον μὲνΣατιβαρζάνης καὶ Βαρσαέντης κατατρώσαντες αὐτοῦ ἀπέλιπον, αὐτοὶ δὲ ἔφυγον ξὺν ἱππεῦσιν ἑξακοσίοις. Δαρεῖος δὲ ἀποθνήσκει ὀλίγον ὕστερον ἐκ τῶν τραυμάτων πρὶν ὀφθῆναι Ἀλεξάνδρῳ.
[3,7,7] Cette nouvelle ranime l’ardeur d’Alexandre ; malgré les fatigues que ses troupes et ses chevaux avaient éprouvées dans une longue route, il force sa marche toute la nuit, et le jour suivant, à midi, il arrive près d’un bourg où les fuyards avaient campé la veille. Il apprend que les Barbares doivent marcher de nuit. Il peut les couper par un chemin plus court, mais il n’y trouvera point d’eau : n’importe, il s’y fait conduire. Son infanterie ne pourrait suivre les chevaux ; cinq cents cavaliers cèdent les leurs à autant de fantassins d’élite, et à leurs officiers qui les montent, sans changer d’armes. Nicanor, commandant les Hypaspistes, Attalus, chef des Agriens, et quelques autres légèrement armés, suivent la route qu’on prise les fuyards ; le reste de l’infanterie marche en bataillon carré. Alexandre part sur le soir, et court à toutes brides. Après un chemin de quatre cents stades, au point du jour il atteint les Barbares qui fuyaient en désordre et sans armes. Peu lui résistent : à son aspect, la plupart se sauvent sans combattre ; quelques-uns périssent dans l’action ; tout le reste prend la fuite. Cependant Bessus et ses complices entraînent Darius. Dès qu’ils se virent pressés par Alexandre, Satibarzane et Barzaente massacrent Darius, le laissent mourant, et s’échappent avec six cents chevaux. À l’arrivée d’Alexandre, Darius n’était plus.
Arrien, Anabase, Les Expéditions d’Alexandre, trad., François-Charles Liskenne et Jean-Baptiste Sauvan, Anselin, 1835
Le corps de Darius est envoyé en Perse avec ordre de l’ensevelir dans le tombeau de la dynastie, à Pasargadès. Il se proclame son successeur au trône de Darius. Il se fait appeler « Roi Alexandre » dissociant son nom de celui des Macédoniens. Il utilise le sceau de Darius pour les missives en direction des provinces asiatiques. Pour Alexandre il ne s’agit pas de livrer l’Asie au monde grec, mais, bien au contraire, de créer un espace politique nouveau capable de réunir sous un pouvoir absolu tous les peuples jusqu’à l’Indus. La fusion des peuples organisée sous l’égide d’Alexandre montre bien ses intentions de briser les barrières entre l’Occident et l’Orient, de trouver des solutions nouvelles. Les Asiatiques ne sont pas des « plantes ou des bêtes » comme le pense Aristote, ni des esclaves-nés comme le considéraient les Grecs. Au contraire, le génie hellénique ne peut que s’enrichir au contact de la somptuosité orientale, de la sombre splendeur de ses temples ou de ses nécropoles taillées dans le roc, à la rencontre de nouvelles valeurs culturelles. Les ors de Persépolis, Babylone, Ecbatane vont transformer l’art grec.