Bibliographie sommaire
Briard Jacques, Mythes et symboles de l'Europe préceltique, Les religions de l'âge du bronze, éditions Errance, 1987
Chantraine Pierre, Dictionnaire étymologique de la langue grecque, Klincksiecck, éd. 1977
Dunand Françoise, « Représentation de l'espace en Égypte tardive. De la représentation fonctionnelle à la représentation symbolique » in Dialogues d'histoire ancienne, vol 15 n°1, 1989, p.141-174
Eco Umberto, De l’arbre au labyrinthe, études historiques sur le signe et l’interprétation, Paris, 2012
Erlande-Brandenburg Alain et Erlande-Brandenburg Anne-Bénédicte, Histoire de l’architecture française, éditions du Patrimoine, 2003
Focillon Henri, Vie des formes, PUF, 1988
Grimal Nicolas, Histoire de l'Égypte ancienne, éd. Livre de poche, 1994
Treuil René, Darcque Pascal, Les civilisations égéennes, PUF, 1989
L'espace où se meut la vie est une donnée à laquelle elle se soumet, l'espace de l'art est matière plastique et changeante
Henri Focillon
Je méditais sur ma demeure. Toutes les parties de celle-ci sont répétées plusieurs fois. Chaque endroit est autre endroit. il n'y a pas un puits, une cour, un abreuvoir, une mangeoire ; les mangeoires, les abreuvoirs, les cours, les puits sont quatorze [sont en nombre infini]. La demeure a l'échelle du monde ou plutôt, elle est monde.
"La demeure d'Astérion" Jorge Luis Borges (traduction R. Caillois)
La figure du labyrinthe, profondément ancrée dans notre imaginaire, tirerait son nom du palais de Minos, espace clos et inquiétant où se joue le mythe du Minotaure. Hérodote cependant nous apprend que Dédale s'est lui-même inspiré d'un édifice religieux situé dans la région du Fayoum, en Égypte. Au Ier siècle, ces labyrinthes égyptien et crétois sont cités par Pline l’Ancien (Histoire Naturelle, XXVI 19) dans un inventaire qu'il complète par le labyrinthe de Lemnos, au nord de la mer Égée et par celui de Porsenna en Étrurie. Se dessine ainsi une aire géographique continentale et insulaire, sur les rives nord et sud de la Méditerranée. Appréhender le motif du labyrinthe dans l’espace méditerranéen nécessite donc de croiser des sources textuelles et matérielles dans une continuité temporelle aux origines mythiques et ouverte sur le présent. En faisant jouer l’espace et le temps, un réseau de filiations symboliques, architecturales et artistiques se construit à partir d’un ou deux exemples fondateurs. La représentation première du labyrinthe survit au passage de l’Antiquité païenne au Moyen Âge chrétien, dans une forme de syncrétisme vigoureux.
Au delà de la permanence des formes, l'oeil s'accoutume à leur variation. Nous entrons dans la symbolique du labyrinthe pour en interroger le sens dans un contexte culturel païen puis chrétien :
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le labyrinthe comme une représentation du détour, de la tromperie et de l'errance dans les méandres duquel se cache un danger : un dédale à proprement parler
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le labyrinthe comme une œuvre esthétique aux formes régulières, voire symétriques, une figuration du cosmos qui recèle en son coeur un trésor spirituel
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le labyrinthe, motif antique hérité, reproduit et adapté dans les édifices religieux du Moyen Âge.
Cette étude voudrait souligner le double intérêt que représente le labyrinthe en montrant comment la représentation d'un espace défini et fermé sur lui-même, à l’origine un édifice monumental, se nourrit, se transmet et s'amplifie dans les réécritures mythiques et artistiques dans l’espace méditerranéen.
Le labyrinthe crétois, construction remarquable et monumentale, a fourni un modèle à la création d’un motif artistique reproduit à plus petite échelle sur des tablettes, des pièces de monnaie, des mosaïques, des dallages. Ce motif est un témoignage de la diffusion de la culture gréco-romaine dans le bassin méditerranéen à travers l’hellénisation du monde romain et la romanisation de la Méditerranée. Christianisé, le symbole évolue vers d’autres significations.
1- Le labyrinthe : une merveille architecturale
Activité 1 :
Objectifs :
- étudier du vocabulaire de l’architecture en contexte
- se représenter un objet à partir d’une description
- situer dans l'espace et le temps les labyrinthes originels
1- Hérodote : le labyrinthe égyptien.
Selon Hérodote (Ve siècle avant J.C.) , le premier labyrinthe fut construit en Égypte dans la région du Fayoum, au sud du lac Moeris, par Amenemhat III sous le Moyen Empire (XIIIe siècle av. J.-C.). Au chapitre CXLVIII du livre II de l'Enquête, l'historien nous décrit cet édifice remarquable avec beaucoup de détails architecturaux, le plaçant même au-dessus des pyramides : « ὁ δὲ δὴ λαβύρινθος καὶ τὰς πυραμίδας ὑπερβάλλει ».
Τοῦ [γὰρ] Δυώδεκα μὲν εἰσὶ αὐλαὶ κατάστεγοι, ἀντίπυλοι ἀλλήλῃσι, ἓξ μὲν πρὸς βορέω ἓξ δὲ πρὸς νότον τετραμμέναι, συνεχέες· τοῖχος δὲ ἔξωθεν ὁ αὐτός σφεας περιέργει. Οἰκήματα δ᾽ ἔνεστι διπλᾶ, τὰ μὲν ὑπόγαια τὰ δὲ μετέωρα ἐπ᾽ ἐκείνοισι, τρισχίλια ἀριθμόν, πεντακοσίων καὶ χιλίων ἑκάτερα. Τὰ μέν νυν μετέωρα τῶν οἰκημάτων αὐτοί τε ὡρῶμεν διεξιόντες καὶ αὐτοὶ θεησάμενοι λέγομεν, τὰ δὲ αὐτῶν ὑπόγαια λόγοισι ἐπυνθανόμεθα· οἱ γὰρ ἐπεστεῶτες τῶν Αἰγυπτίων δεικνύναι αὐτὰ οὐδαμῶς ἤθελον, φάμενοι θήκας αὐτόθι εἶναι τῶν τε ἀρχὴν τὸν λαβύρινθον τοῦτον οἰκοδομησαμένων βασιλέων καὶ τῶν ἱερῶν κροκοδείλων.
οὕτω τῶν μὲν κάτω πέρι οἰκημάτων ἀκοῇ παραλαβόντες λέγομεν, τὰ δὲ ἄνω μέζονα ἀνθρωπηίων ἔργων αὐτοὶ ὡρῶμεν· αἵ τε γὰρ διέξοδοι διὰ τῶν στεγέων καὶ οἱ ἑλιγμοὶ διὰ τῶν αὐλέων ἐόντες ποικιλώτατοι θῶμα μυρίον παρείχοντο ἐξ αὐλῆς τε ἐς τὰ οἰκήματα διεξιοῦσι καὶ ἐκ τῶν οἰκημάτων ἐς παστάδας, ἐς στέγας τε ἄλλας ἐκ τῶν παστάδων καὶ ἐς αὐλὰς ἄλλας ἐκ τῶν οἰκημάτων. Ὀροφὴ δὲ πάντων τούτων λιθίνη κατά περ οἱ τοῖχοι, οἱ δὲ τοῖχοι τύπων ἐγγεγλυμμένων πλέοι, αὐλὴ δὲ ἑκάστη περίστυλος λίθου λευκοῦ ἁρμοσμένου τὰ μάλιστα. Τῆς δὲ γωνίης τελευτῶντος τοῦ λαβυρίνθου ἔχεται πυραμὶς τεσσερακοντόργυιος, ἐν τῇ ζῷα μεγάλα ἐγγέγλυπται· ὁδὸς δ᾽ ἐς αὐτὴν ὑπὸ γῆν πεποίηται.
Il est composé de douze cours environnées de murs, dont les portes sont à l'opposé l'une de l'autre, six au nord et six au sud, toutes contiguës ; une même enceinte de murailles, qui règne en dehors, les renferme ; les appartements en sont doubles ; il y en a quinze cents sous terre, quinze cents au-dessus, trois mille en tout. J'ai visité les appartements d'en haut, je les ai parcourus ainsi j'en parle avec certitude et comme témoin oculaire. Quant aux appartements souterrains, je ne sais que ce qu'on m'en a dit. Les Égyptiens gouverneurs du labyrinthe ne permirent point qu'on me les montrât, parce qu'ils servaient, me dirent-ils, de sépulture aux crocodiles sacrés, et aux rois qui ont fait bâtir entièrement cet édifice. Je ne parle donc des logement souterrains que sur le rapport d'autrui : quant à ceux d'en haut, je les ai vus, et les regarde comme ce que les hommes ont jamais fait de plus grand. On ne peut en effet se lasser d'admirer la variété des passages tortueux qui mènent des cours à des corps de logis et des issues qui conduisent à d'autres cours. Chaque corps de logis a une multitude de chambres qui aboutissent à des portiques. Au sortir de ces portiques, on passe dans d'autres bâtiments , dont il faut traverser les chambres pour entrer dans d'autres cours. Le toit de tous ces corps de logis est de pierre ainsi que les murs, qui sont partout décorés de figures en bas-relief. Autour de chaque cour règne une colonnade de pierres blanches parfaitement jointes ensemble. À l'angle où finit le labyrinthe s'élève une pyramide de cinquante orgyies, sur laquelle on a sculpté en grand des figures d'animaux. On s'y rend par un souterrain.
Traduction d’après P.H. Larcher, 1842
Cet extrait peut servir de support à l'analyse du vocabulaire architectural : « τοῦτον οἰκοδομησαμένων βασιλέων καὶ τῶν ἱερῶν κροκοδείλων. » : l'édifice, « τὸ οἴχημα », serait un temple dépendant d'un complexe architectural et funéraire dédié aux rois et aux crocodiles sacrés dont dépendrait la pyramide mentionnée à la fin de l'extrait : «Τῆς δὲ γωνίης τελευτῶντος τοῦ λαβυρίνθου ἔχεται πυραμὶς τεσσερακοντόργυιος ». Elle serait reliée au temple par un souterrain : «ὁδὸς δ᾽ ἐς αὐτὴν ὑπὸ γῆν πεποίηται». Les parties dont se composent le temple sont scrupuleusement énumérées par Hérodote : ἡ ἀυλὴ (la cour), ὁ τοῖχος (le mur), ἡ διέξοδος (la sortie), τὸ στέγος (le tombeau), ἡ στέγη (la chambre), ἡ παστάς (le portique). Le texte se prête également à la présentation des adjectifs composés, identiques au masculin et au féminin : κατάστεγος, ος, ον (couvert d'un toit), ὑπόγαιος, ος, ον (souterrain), μετέωρος, ος, ον (dans la partie supérieure). Les informations sont complétées par des données chiffrées : χίλιοι,αι,α (mille), τρισχίλιοι,αι,α (trois mille), πεντακοσίοι, αι, α (cinq cents).
En tant que géographe, Hérodote oriente le temple selon un axe Nord/Sud (ὁ βορέας, ου, le nord ; ὁ νότος, ου, le sud) aux extrémités duquel viennent se placer respectivement six portes. Sa description repose sur un travail d'observation « αὐτοί τε ὡρῶμεν », « αὐτοὶ θεησάμενοι λέγομεν » et sur le recueil des témoignages, « λόγοισι ἐπυνθανόμεθα », « ἀκοῇ ». Ainsi nous livre-t-il sa méthode d'investigation et éclaire-t-il le titre de son ouvrage, l'Enquête.
Ce labyrinthe, comme tout temple égyptien, se conçoit comme une image du monde : il en est la réplique. Hormis le texte d'Hérodote dont la précision crée un effet visuel nécessaire à la valeur documentaire de son œuvre, nous ne disposons ni de plan ni de représentation picturale.
2- Pline l’Ancien et les 4 labyrinthes originels.
Au livre XXXVI de l’Histoire naturelle, Pline l’Ancien consacre l’intégralité du chapitre XIX à l’inventaire des quatre labyrinthes connus. Il s’en réfère à Hérodote pour dater l’ouvrage (opus) le plus ancien, le labyrinthe égyptien dont la fonction est indéterminée. Il se rallie à l’opinion commune : un monument dédié au soleil : « soli sacrum exstructum ».
Le deuxième est le labyrinthe crétois construit par Dédale, puis vient celui de Lemnos, enfin le labyrinthe de Porsenna situé en Italie. Tous sont faits de pierre, en marbre, et couverts de toits : « omnes lapide polito fornicibus tecti ».
Pline s’attarde longuement à décrire le labyrinthe égyptien à la composition complexe et étendue : des divisions administratives, des temples, des souterrains. Les indications qu’il donne sur les ornementations et sur les sons inquiétants qui s’en échappent seront repris par Isidore de Séville au VIIe siècle.
Les réparations effectuées en 500 ans avant Alexandre, introduisent une borne chronologique.
Le labyrinthe de Lemnos fait l’objet d’une description plus succincte. Seule une prouesse technique arrête Pline l’Ancien : la suspension des fûts de colonne et la maniabilité du tour à la portée d’un enfant. À l’instar de Dédale, les trois architectes de Lemnos sont cités : Zmilis, Rhoecus et Théodorus.
Bien que le labyrinthe de Porsenna ait disparu, Pline s’appuie sur le témoignage de Varron pour clore son inventaire. Le monument est funéraire, sur plusieurs niveaux, associant globe et pyramides. Deux allusions remarquables associe le labyrinthe italien à la culture grecque : le peloton de fil « glomere lini » que le lecteur reconnaît comme le fil d’Ariane, et l’allusion au sanctuaire de Dodone « ut Dodonae olim factum », haut-lieu de la religion grecque.
2- Le labyrinthe crétois et le Minotaure : mythe et réalité
1- Rappel étymologique
Activité 2 :
Objectifs:
- étudier les mots clefs de l’objet d’étude
- comparer des synonymes
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Le labyrinthe
Le mot figure dans les archives mycéniennes en linéaire B à Cnossos. La tablette KN Gg 702 mentionne une déesse du labyrinthe, honorée dans le palais. La finale en ινθος caractérise un nom préhellénique. Le signe de la double hache correspond également au signe 3 des hiéroglyphes crétois
Selon Plutarque, le mot labrus lydien signifie la hache. Le palais de Cnossos serait le palais de la double hache. Cette interprétation s'appuie sur l’observation d’une réalité archéologique : le grand nombre de doubles haches gravées sur les pierres du palais. Sur les fresques et l’ornementation des sarcophages, la double hache est utilisée dans les cérémonies de sacrifice du taureau.
Paul Faure, quant à lui, estime que le labyrinthe serait à l'origine un complexe de cavernes comme il s'en trouve un grand nombre en Crète.
Si on admet cette étymologie, il est possible de reconstituer l’évolution sémantique suivante :
- le palais de la double hache, « le labyrinthe », est un édifice dont les nombreuses salles reliées par des couloirs et des cours intérieurs constituent un bâtiment au plan complexe où il est aisé de se perdre.
- le nom propre « labyrinthe » devient un nom commun par antonomase pour désigner un édifice aux parcours sinueux et enchevêtré. Il est employé dans ce sens par Hérodote.
- Au sens figuré, il sert à qualifier une situation complexe ou un raisonnement tortueux.
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Le dédale
Le nom commun dédale issu de Dédale, nom de l’architecte bâtisseur du labyrinthe a subi la même évolution. Il puise son origine dans le verbe grec δαιδἀλλω : façonner, travailler avec art. Le nom prend une connotation négative. Un dédale forme un ensemble d’éléments (salles ou couloir) dans lequel il est difficile de s’orienter. Ses impasses et ses fausses routes entraînent pertes et erreurs.
2- Lire le mythe à travers les auteurs grecs et latins
Activité 3 :
Objectifs :
- lire et comprendre un texte antique
- étudier les réécritures du mythe
- établir une première filiation entre l’espace culturel et géographique égyptien avec le monde crétois.
Le mythe du Minotaure, enfermé dans le labyrinthe, nous inscrit dans un contexte crétois antérieur à la guerre de Troie. Ces textes ne sont pas contemporains des palais crétois car nous ne déchiffrons que partiellement le linéaire A et ne disposons pas à proprement parler de textes narratifs appartenant à la civilisation minoenne.
Le texte d'Ovide extrait des Métamorphoses, livre VIII, est l'un des textes antiques les plus développés sur ce thème. Il retrace l'ensemble du mythe depuis la naissance du Minotaure jusqu'à la mort d'Icare. Nous ne retenons ici que les éléments susceptibles de décrire le labyrinthe.
Destinat hunc Minos thalamo removere pudorem
multiplicique domo caecisque includere tectis.
Daedalus ingenio fabrae celeberrimus artis
ponit opus turbatque notas et lumina flexu
ducit in errorem variarum ambage viarum.
Non secus ac liquidus Phrygiis Maeandros in arvis
ludit et ambiguo lapsu refluitque fluitque
occurensque sibi venturas aspicit undas
et nunc ad fontes, nunc ad mare versus apertum
incertas exercet aquas ita Daedalus implet
in numerosas errore vias vixque ipse reverti
ad limen potuit : tanta est fallacia tecti.
Minos veut dérober au monde la honte de son hymen : il enferme le Minotaure dans l'enceinte profonde, dans les détours obscurs du palais. Le plus célèbre des architectes, Dédale, en a tracé les fondements. L'oeil s'égare dans des sentiers infinis, sans terme et sans issue, qui se croisent, se mêlent, se confondent entre eux. Tel le Méandre se joue dans les champs de Phrygie : dans sa course ambiguë, il suit sa pente ou revient sur ses pas, et détournant ses ondes vers leur source, ou les ramenant vers la mer, en mille détours il égare sa route, et roule ses flots incertains. Ainsi Dédale confond tous les sentiers du labyrinthe. À peine lui-même il peut en retrouver l'issue, tant est grande la tromperie de l'édifice.
Traduction adaptée de G.T. Villenave 1806
Les textes offrent des échos de l'un à l'autre et des images permanentes : «multiplicique domo », « flexu », la sinuosité, repris par « ambage », le détour. Notons « caecis tectis », les toits aveugles, et l'absence de lumière « lumina flexu ducit ». La très belle comparaison avec le fleuve Méandre (d'où provient notre nom commun : le méandre) confirme l'hypothèse selon laquelle chez Ovide le labyrinthe est courbe et sans angles droits. La répétition « errorem » « errore » auquel répond le nom « fallacia » ne laisse pas de doute sur la volonté délibérée de perdre toute personne qui se risquerait sur ces chemins interdits. Il est remarquable qu'Ovide n'emploie pas le terme de labyrinthe pourtant en usage chez les poètes. Virgile use du mot « labyrinthe » dans le chant V de l'Énéide, v 588-591 dans sa description des jeux funèbres en l'honneur d'Anchise.
Tous les épisodes du mythe sont transmis par Apollodore (Ier-IIe siècle) (Bibliothèque, Livre III, 1, 3). Il insiste sur la faute du roi Minos commise à l'égard de Poséidon et sur les conditions de la naissance du Minotaure. Dédale est cité comme le constructeur du labyrinthe. Sa description est très succincte mais contient les aspects essentiels du mythe:
Μίνως δὲ ἐν τῷ λαβυρίνθῳ κατά τινας χρησμοὺς κατακλείσας αὐτὸν ἐφύλαττεν. Ἦν δὲ ὁ λαβύρινθος, ὃν Δαίδαλος κατεσκεύασεν, οἴκημα καμπαῖς πολυπλόκοις πλανῶν τὴν ἔξοδον.
D'après quelques oracles, Minos le garda enfermé dans le Labyrinthe. Ce Labyrinthe, que Dédale avait construit, était un édifice avec des courbes présentant de nombreux détours, de façon qu'il était impossible d'en trouver l'issue.
L'expression «οἴκημα καμπαῖς πολυπλόκοις » insiste sur les lignes courbes revenant sur elles-mêmes ; « οἴκημα » se trouve déjà dans le texte d'Hérodote. Apollodore décrit un labyrinthe de forme circulaire.
3- Les realia crétoises
Activité 4 : étude des formes et composition d’un portfolio sur les représentations antiques et contemporaines du labyrinthe.
Objectifs :
- construire une présentation diachronique d’un même motif artistique
- s’exprimer à l’oral à partir de travaux de recherche personnels
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Sources archéologiques
Les sources de natures différentes permettent de confronter textes et archéologie. L’élément premier est l'emblématique palais de Cnossos. Le mythe nous le présente comme la résidence du roi Minos à une époque où les palais sont à la fois des centres économiques, politiques et religieux. S'y concentrent de nombreuses activités dans un agrégat de quartiers aux fonctions définies.
La comparaison des trois principaux palais crétois, Cnossos, Malia et Phaistos auxquels on peut ajouter le palais de Zakros, est éloquente. Dans la seconde phase des palais, le plan général tend à s'uniformiser vraisemblablement sur le modèle de Cnossos. Tous les palais possèdent la même cour intérieure, rectangulaire, vers laquelle convergent toutes les voies de circulation. La disposition des multiples quartiers (salle du trône, bassins lustraux, magasins, appartements privés) organisés autour de la vaste cour et les différentes entrées ou sorties ménagées en périphérie contribuent à la création d'une architecture repliée sur elle-même, tournée vers un espace ouvert sur le ciel mais inaccessible directement par l'extérieur. La lumière ne devait pas pénétrer dans toutes les zones de l’édifice. On imagine combien impressionnant devait paraître cet enchevêtrement de salles et de couloirs au modeste berger venu rendre compte de son troupeau ou aux ouvrières venues travailler pour un salaire composé de figues et d'orge.
Les disparités sont frappantes entre les détails des descriptions littéraires où l'accent est mis sur la sinuosité des chemins, et les angles droits, les couloirs rectilignes de Cnossos. On constate une distorsion entre la réalité archéologique et la leçon des mythes montrant le délicat rapprochement entre l'une et l'autre. L’architecture palatiale est complexe mais son dessein n’est pas de perdre ceux qui traversent ou habitent l’édifice.
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Sources épigraphiques
Les tablettes d'argile rédigées en linéaire B sont des archives comptables ; il serait vain d'y chercher une description des palais. Toutefois, deux tablettes attirent notre attention. La tablette Kn Gg 702 mentionne le nom d'une déesse du labyrinthe. Sur le continent, dans le monde mycénien où les plans des palais sont sensiblement différents, nous disposons d'une tablette d'argile rédigée en linéaire B présentant un graffito de labyrinthe au verso de la tablette pylienne Py Cn 1287. En l'absence de données complémentaires, il n'est pas possible de savoir si ce dessin est une allusion au palais crétois de Cnossos. L'indication Cn indique que la tablette comptabilise au recto des troupeaux. Les hypothèses sur le sens de cette inscription (jeu, brouillon, schéma...) ne peuvent être validées en l’absence d’autres sources épigraphiques à corréler avec le document.
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Numismatique crétoise
La numismatique s'avère une source d'une grande richesse. À partir du Ve siècle av. J.-C., nous disposons d'un large choix de statères crétois présentant le Minotaure ou Thésée au recto et une forme labyrinthique au verso.Les représentations graphiques (concentriques, carrées, ou cruciformes) répondent aux nécessités du support étroit et circonscrit. Le centre est toujours symbolisé de manière explicite. Le mythe est vivace. La cité crétoise émettrice des monnaies en use comme d'un symbole capable de définir son identité. Sa fonction est double : politique et esthétique.
4- Rémanence du motif labyrinthique en Méditerranée : l’exemple de la mosaïque du labyrinthe de Thysdrus (El Jem, Tunisie)
Activité 5 : rédiger un paragraphe sur les témoignages architecturaux de la romanisation.
Objectifs :
- convoquer ses connaissances historiques et artistiques
- se situer dans l’espace méditerranéen
- produire un écrit de synthèse
Les particuliers expriment dans l'aménagement de leurs maisons leurs goûts influencés par les orientations culturelles de leur époque. Un bel exemple se situe à Paphos, sur l’île de Chypre, où un haut fonctionnaire romain a commandé, à la fin du IIIe siècle ou au début du IVe siècle, une mosaïque de Thésée et le Minotaure. En Tunisie, la mosaïque mise au jour à Thysdrus illustre aussi cette forme d'art décoratif. C’est une œuvre d'agrément, le pavement de la demeure d'un citoyen romain d'Afrique du Nord dans une pièce plutôt modeste. Sa fonction n'a pas été déterminée. Réalisée au IIIe ap. J.-C., la mosaïque d'à peu près 3,05x 3,03 m, est lacunaire mais la partie principale du labyrinthe et sa périphérie sont bien conservées. Selon l’archéologue Hédi Slim, la mosaïque de Thysdrus prend modèle sur le grand amphithéâtre d'El Jem en Tunisie. À la référence culturelle au mythique monument crétois se superposerait la référence directe à un monument contemporain.
La ville moderne d'El Jem s'est construite à l'emplacement de la ville antique de Thysdrus. La mosaïque serait un rappel de l'édifice magistral. À la proximité du lieu s'ajoute deux arguments majeurs : les tourelles et le triple mur d'enceinte ainsi qu'un élément architectural remarquable, la construction des portes en voussoir représentée sur la mosaïque. Bien que le dessin, endommagé en son centre, ne semble pas reproduire explicitement le combat de Thésée et du Minotaure, il est aisé d'imaginer un lien symbolique entre les combats de l'arène et le combat mythique du héros contre le monstre.
L’amphithéâtre d’El Jem rivalise en taille avec le Colisée. Sur la mosaïque, les éléments architecturaux sont stylisés : trois rangées d'arches, une entrée monumentale, un espace central clairement détaché du reste de la structure. Pour des raisons pratiques, le mosaïste n'a pas respecté la forme ovoïde de l'amphithéâtre dont on ne retrouve pas non plus les quatre tours.
Comment interpréter les méandres du labyrinthe. Symbolisent-ils les gradins ? Les sous-sols ? Selon cette dernière hypothèse, l'entrée du labyrinthe de la mosaïque correspondrait à l'entrée des gladiateurs dans l'arène. La comparaison avec la partie inférieure du Colisée romain répond à la description du labyrinthe par les auteurs antérieurs : un édifice aux murs aveugles dont la lumière est arrêtée par de multiples détours.
5- La valeur symbolique du labyrinthe antique
Activité 6 : rédiger un paragraphe sur la portée symbolique du labyrinthe.
Objectifs :
- convoquer ses connaissances historiques et artistiques
- interpréter et justifier son interprétation
- engager sa sensibilité de lecteur et développer sa sensibilité esthétique
Tel le minotaure dont la nature est double, mi-homme mi-bête, le labyrinthe est bivalent. Création de l'architecte Dédale peut-être d'après un modèle égyptien, il n'est pas un produit de la nature mais du génie humain. Cependant, pour qui s'y trouve enfermé, il présente les dangers d'un lieu que le regard ne peut embrasser, demeurant désespérément inconnu. Espace organisé et dessiné, sa symétrie est précisément source d'une confusion propre à perdre celui qui s'y engage. La régularité du tracé, au lieu de baliser un chemin, interdit tout repère. Pourtant les chemins convergent vers un centre qui n'est pas sans rappeler les cours centrales des palais minoens où devaient se dérouler des jeux tauromachiques.
Les labyrinthes des monnaies en forme de svastikas, variantes esthétiques et peut-être religieuses, mettent l'accent sur la partie centrale, reproduite dans leurs bras en autant de fausses pistes et d'impasses. Le dynamisme de la forme et son mouvement de rotation achève de nous désorienter totalement si tant est que nous en ayons trouvé l'entrée.
Le labyrinthe nous mène en son centre, lieu d'une rencontre ou d'un combat puis nous oblige à revenir sur nos pas. Parfois, il nous contraint à trouver une nouvelle sortie pour déboucher peut-être de l'autre côté du labyrinthe, peut-être simplement de l'autre côté de l'entrée.
Le motif, décliné sous des formes et des supports artistiques multiples, symbolise le chemin de la vie, ses épreuves, une quête où l'accomplissement d'un destin se révèle au fur et à mesure des détours. Quant au centre ? Est-ce un lieu de plénitude atteint au terme de grands efforts ou le lieu dangereux de la confrontation avec l'inconnu ?
Monde fermé et enténébré, le labyrinthe se représente, de préférence, d'un point de vue surplombant pour en dévoiler la beauté née de la complexité. L'entrée et le centre s'offrent au regard, comme une évidence, mais le chemin qui relie ce point à cet autre, trompe la vue pour nous perdre.
6- le labyrinthe médiéval
Activité 7
Objectifs :
- se situer dans l’espace et le temps
- apprécier les permanences et les ruptures culturelles, la manifestation du syncrétisme religieux
- lire des textes authentiques littéraire et épigraphique
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transmission textuelle
La symbolique chrétienne a gardé en héritage la figure du labyrinthe crétois. L’abondance des représentations iconographiques et la force du mythe de Thésée et du Minotaure participent à sa pérennité. La connaissance que les lettrés ont conservée de Virgile et d’Ovide, amplement commentés par les scholiastes, n’y est pas étrangère non plus. Même si le récit connaît des variantes, la transmission du mythe de l’Antiquité au Moyen Âge est ininterrompue. Le clerc Isidore de Séville (VIIe siècle) en est un jalon lorsqu’au livre XV, 36 des Étymologies, il décrit les différents types de bâtiments et reprend l’inventaire de Pline l’Ancien.
Labyrinthus est perplexis parietibus aedificium, qualis est apud Cretam a Daedalo factus, ubi fuit Minotaurus inclusus; in quo si quis introierit sine glomere lini, exitum invenire non valet. Cuius aedificii talis est situs ut aperientibus fores tonitruum intus terribile audiatur : descenditur centenis ultra gradibus; intus simulacra et monstrificae effigies, in partes diversas transitus innumeri per tenebras, et cetera ad errorem ingredientium facta, ita ut de tenebris eius ad lucem venire inpossibile videatur. Quattuor sunt [autem] labyrinthi; primus Aegyptius, secundus Creticus, tertius in Lemno, quartus in Italia; omnes ita cunstructi ut dissolvere eos nec saecula quidem possint.
Le labyrinthe est un édifice aux murs enchevêtrés, comme l’est celui que Dédale a construit en Crète où était enfermé le Minotaure ; si l’on y entre sans une pelote de fil, il est impossible de trouver la sortie. La construction de l’édifice est tel que ceux qui en ouvrent les portes entendent un tonnerre terrible à l’intérieur ; on y descend par plus de cent marches ; à l’intérieur se trouvent des statues et des représentations de monstres, d’innombrables passages conduisant à travers les ténèbres vers des parties opposées, et d’autres dispositions faites pour tromper qui y entre, de sorte qu’il paraît impossible de revenir de ses ténèbres à la lumière. Il y a quatre labyrinthes : le premier est celui d’Égypte, le deuxième celui de Crète, le troisième est à Lemnos, le quatrième en Italie ; tous construits de telle sorte que même les siècles ne peuvent les détruire.
À l'époque du haut Moyen Âge, le labyrinthe est un thème apprécié sur les enluminures. Alors qu'Apollodore précisait explicitement que Pasiphaé avait donné naissance au Minotaure, nommé Astérion, qu'il possèdait une tête de taureau sur un corps d'homme (Bibliothèque, III, 1, 4),
"ἡ δὲ Ἀστέριον ἐγέννησε τὸν κληθέντα Μινώταυρον. οὗτος εἶχε ταύρου πρόσωπον, τὰ δὲ λοιπὰ ἀνδρός·",
il est remarquable que le Minotaure médiéval, à l’inverse du Minotaure antique, soit composé d’une tête et d’un buste d’homme sur un corps de taureau.
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Les édifices religieux
Le labyrinthe le plus ancien date du IVe siècle. L’église d’Orléansville, El Asnam en Algérie, construite sur la ville romaine Castellum Tingitanum, possède un pavage avec motif à deux entrées. En entrant par la première, le parcours est partiel ; en entrant par la seconde, le parcours est total à l’intérieur du labyrinthe. Aucune figuration de Thésée ou du Minotaure n’a été retrouvée en son centre.
Au XIe et au XIIe siècle en Italie puis au XIIe et au XIIIe siècle en France, de nombreux édifices religieux se parent de labyrinthes. La mosaïque murale de l’église San Michele Maggiore de Pavie (XIIe siècle) est accompagnée de la mention suivante :
« Theseus intravit monstrumque biforme necavit ».
Thésée entra et tua le monstre à la double nature.
Le Minotaure est encore visible.
Nul Minotaure à Lucques en Toscane mais cette inscription :
Hic quem Creticus edit Daedalus est laberinthus de quo nullus vadere quivit qui fuit intus ni Theseus gratis Ariane stamine jutus.
C'est le labyrinthe que bâtit le crétois Dédale, duquel personne, une fois entré, ne put sortir excepté Thésée, aidé du fil d'Ariane
En France, les labyrinthes sont principalement des labyrinthes de pavement. Ils occupent la nef principale, l’entrée se trouve près du portail ouest symbole d’ombre et de mort. Le pèlerin regarde vers l’est où se trouve le paradis selon la Genèse. Il progresse suivant les sinuosités du labyrinthe, à genoux, comme un pénitent parcourrait les ténèbres trompeuses du monde réel. « Tanta est fallacia tecti », écrit Ovide. Le combat de Thésée figurerait la victoire du Christ sur le mal.
Les voies du labyrinthe reproduisent aussi la montée du Christ au calvaire et le chemin vers Jérusalem. Il est, pour celui qui ne peut se déplacer, un substitut au véritable voyage en terre sainte.
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Le labyrinthe de la cathédrale de Chartres
Ce labyrinthe allie symboliques païenne et chrétienne. Il occupe la largeur de la nef principale. Ses 11 couloirs sinueux dessinent le signe de la croix. Or, un témoignage atteste qu’en son centre était scellée une plaque de cuivre illustrée d’une minotauromachie. Cet élément a disparu au XVIIe siècle.
Le syncrétisme entre mythologie païenne et religion chrétienne combine des réalités matérielles au premier abord contradictoires : le chemin du labyrinthe ne comporte ni impasse ni fausse route. Il donne l’impression de s’éloigner du centre alors qu’il s’en approche. Pourtant, à 1,20 m de l’entrée était fiché dans la pierre un anneau où accrocher le fil d’Ariane comme il est représenté sur tableaux et gravures. "Si on 'déroulait' le labyrinthe unicursal, écrit Umberto Eco, il nous resterait dans les mains un unique fil, ce fil d'Ariane que la légende présente comme le moyen (étranger au labyrinthe) de sortir du labyrinthe, alors qu'il n'était en réalité rien d'autre que le labyrinthe lui-même." U. Eco, De l'arbre au labyrinthe, p. 84-85
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Évolution de la symbolique du labyrinthe
À Amiens et à Reims, le système symbolique du labyrinthe se déplace de Thésée vers Dédale, patron des architectes. À partir d’un même récit mythique composé de deux épisodes chronologiquement distincts - la construction du labyrinthe par Dédale et le combat de Thésée contre le Minotaure - les architectes médiévaux retiennent une figuration monumentale majeure : le labyrinthe. Le motif perdure mais le message change. D’une célébration de la victoire d’un Christ-Thésée sur le mal à destination des fidèles et des pèlerins, il devient un hommage aux bâtisseurs de cathédrale, religieux et hommes de l’art.
- Le labyrinthe d’Amiens, détruit en 1825 et reconstruit en 1894, est de forme octogonale. Sa pierre centrale comporte une inscription où sont nommés les maîtres d’oeuvre :
« En l’an de grâce 1220, cette oeuvre fut commencée. L’évêque béni de ce diocèse était alors Évrard et le roi de France Louis, fils de Philippe le Sage. Celui qui était maître d’oeuvre était nommé maître Robert et surnommé De Luzarches. Après lui vint maître Thomas de Cormont et après celui son fils maître Renaut qui fit mettre, à cet endroit-ci, cette inscription en l’an de l’Incarnation. »
- Le labyrinthe de Reims a aujourd'hui disparu. Il nous est connu grâce au relevé du chanoine Cocquaut effectué avant sa destruction à la fin du XVIIIe siècle. Les monuments historiques en ont fait leur logo.
Au centre se trouvait Aubry de Humbert, l’archevêque à l’initiative de la construction de la cathédrale et dans les angles les quatre premiers maîtres d’oeuvre.
Qu’ils soient devenus un lieu de récréation des enfants ou que la décision fût prise de les détruire pour cette même raison, les labyrinthes ont fini par perdre leur symbolique première et leur usage liturgique.
7- Prolongements artistiques et culturels
Activité 8 : réaliser un portfolio textuel
Confronter :
- une œuvre antique
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Les Métamorphoses d’Ovide, livre VIII,
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Le mythe du Minotaure dans la Bibliothèque d’Apollodore (livre III, 1)
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- une œuvre contemporaine
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L’aleph, « La demeure d’Astérion », Jorge Luis Borges
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Piste de réflexion : comparer les éléments du mythe, les changements dans les voix narratives. Interroger la monstruosité et l’humanité de chaque acteur du mythe.
Activité 9 : réaliser un portfolio iconographique
Confronter :
- une représentation antique
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sur un vase
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sur une mosaïque
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- une représentation contemporaine
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un dessin de Pablo Picasso
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Piste de réflexion : comparer les choix graphiques de la représentation du monstre, la mise en scène ou l’absence de combat.