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Alcibiade : vers 450 avant J.-C. - 404 avant J.-C.
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Guerre du Péloponnèse
431 : première phase de la guerre (Guerre d’Archidamas)
430 : épidémie de peste à Athènes
429 : mort de Périclès
421 : paix de Nicias
420 : Alcibiade stratège
415-413 : expédition de Sicile
415 : affaires de la mutilation des Hermès et de la parodie des Mystères
413-404 : deuxième phase de la guerre (Guerre de Décélie)
411 : établissement d’un régime oligarchique à Athènes (gouvernement des Quatre cents)
410 : bataille de Cyzique
407-406 : défaite de Notion
404 : bataille d’Aigos-Potamos : défaite d’Athènes.
Mort d’Alcibiade
- Thucydide dans L'Histoire de la guerre du Péloponnèse est une source essentielle pour connaître le personnage historique mais son récit s'arrête en 411. Dans Les Helléniques de Xénophon figurent les derniers années de la vie d'Alcibiade.
- Alcibiade jour un rôle important dans le Banquet de Platon, et deux autres dialogues portent son nom :
- Le premier Alcibiade ou l'Alcibiade majeur, sur la nature de l'homme.
- Le second Alcibiade, sur la prière dont l'authenticité est contestée
- Plutarque consacre l'une de ses Vies parallèles à Alcibiade face à celle de Coriolan.
- Pour aller plus loin :
- Jacqueline de Romilly, Alcibiade, Éditions de Fallois, Paris, 1995
- Sur Odysseum : O. Battistini, Alcibiade, l'Athénien
Éblouissant de beauté et d’intelligence, riche fils d’une noble famille, Alcibiade aurait pu se contenter de défrayer la chronique par son insolence et ses excès. Sa vie dispendieuse, ses conquêtes amoureuses, la victoire de ses écuries aux jeux Olympiques, sa brutalité parfois, en ont fait une des célébrités les plus sulfureuses de l’Athènes classique. Ce portrait serait néanmoins réducteur si on occultait le rôle de premier plan qu’il joua dans la politique athénienne à un moment crucial de son histoire, la guerre du Péloponnèse.
La jeunesse dorée d’un aristocrate brillant et provocateur
Alcibiade appartient à la famille des Eupatrides par son père Clinias lui même lié par le mariage aux Alcméonides. À la mort de son père, Périclès l’adopte et poursuit son éducation. Devenu l’un des intimes de Socrate, il est initié à sa philosophie mais sa vie, marquée par les scandales, reflète bien peu cet enseignement. L’ambition d’Alcibiade le pousse sur la scène politique aux côtés des démocrates. Dès le début de la guerre du Péloponnèse, il montre un courage et une audace dont il ne se départira pas.
La guerre d’Archidamos et la paix de Nicias
Alcibiade combat à la bataille de Potidée aux côtés de Socrate puis à la bataille de Délion. Quand le conflit marque une pause lors de la paix dite de Nicias en 421, Alcibiade se place dans le camp adverse. En 420, il est élu stratège. Partisan de l’impérialisme athénien, il oeuvre personnellement pour le rapprochement d’Athènes avec Argos restée neutre jusque là et étend son influence vers les terres. Cet impérialisme assumé et plébiscité par le peuple athénien trouve son accomplissement dans l’expédition de Sicile. Pour Alcibiade, la primauté d’Athènes ne peut perdurer dans l’immobilisme. Elle doit s’imposer par son esprit de conquête. Contre l’avis de Nicias, Alcibiade parvient à convaincre les Athéniens de tourner leurs velléités vers la Sicile sous prétexte d’aider les cités amies mais en vérité pour prendre pied dans une région riche et stratégique pour le contrôle de la Méditerranée.
L’expédition de Sicile
En 415, ce sont cent trente quatre trières et deux navires rhodiens qui prennent la mer pour attaquer la Sicile. Alcibiade aurait dû prendre durablement la tête d’une expédition qu’il avait montée depuis l’origine mais deux affaires religieuses le rattrapent : la mutilation des Hermès et une parodie des Mystères d’Éleusis. À ce moment précis de la vie d’Alcibiade, les affaires intérieures de la cité viennent croiser sa politique extérieure.
Tandis que l’expédition de Sicile s’organise, les Athéniens découvrent les statues des Hermès situées aux carrefours des routes et aux limites des propriétés systématiquement mutilées. Seuls des hommes organisés ont pu perpétrer ce délit. Le sacrilège n’est pas tolérable et semble menacer la démocratie au moment où elle s’engage dans une entreprise guerrière périlleuse. Un climat de délation gagne la cité. Alcibiade est nommément accusé d’avoir joué les hiérophantes lors d’une fausse cérémonie des Mystères. Or on ne se rit pas des dieux. Les manifestations d’impiété pourraient menacer le succès de l’expédition de Sicile.
Concernant la première affaire, la culpabilité d’Alcibiade ne peut être prouvée. Il est jugé pour la seconde alors qu’il a déjà pris la mer pour la Sicile. Afin d'échapper à la peine de mort, il prend la fuite et trouve refuge chez l’ennemi, à Sparte.
L’influence d’Alcibiade est telle qu’il devient conseiller des Spartiates. Ceux-ci apportent leur aide à Syracuse sous le commandement de Gylippe, rallient les cités restées en dehors du conflit et favorisent la victoire des Syracusains. Les Athéniens essuient une défaite sans précédent. L’expédition de Sicile se solde par un désastre total : 12 000 morts, les prisonniers réduits en esclavage dans les carrières de Syracuse (les Latomies). Nicias et son collègue Lamachos sont condamnés à mort.
La guerre de Décélie
Alcibiade poursuit la guerre contre Athènes, convainc les Spartiates d’envahir l’Attique et de fortifier Décélie. Athènes se voit donc directement menacée. Une nouvelle manoeuvre d’Alcibiade qui vise au rapprochement de Sparte avec les cités d’Ionie et la Perse fragilise encore la position d'Athènes. Toutefois, — est-ce pour freiner son ascension ou par défiance de la part des Spartiates ? —, Alcibiade échappe de peu à un complot commandité de très haut. Il aurait été, dit-on, l’amant de la reine de Sparte et un fils serait né de cette union adultère.
Il prend encore une fois la fuite et trouve refuge en Perse chez le satrape Tissapherne.
Alcibiade et les Perses
Nouveau retournement. C’est de la cour du satrape perse Tissapherne qu’Alcibiade prépare dès lors son retour à Athènes au prix de multiples manoeuvres diplomatiques. Il se présente comme celui qui pourra apporter forces et soutien de la part du puissant empire perse.
Parallèlement se met en place à Athènes, en 411, un gouvernement oligarchique, les Quatre Cents. Ce régime ne sera renversé qu’en 408.
Pour reconquérir sa place dans le jeu politique et militaire, Alcibiade traite notamment avec les Athéniens démocrates de l’île de Samos, restés fidèles à Athènes, et devient général de leur flotte. La victoire navale de Cyzique en 410 redonne son aura à Alcibiade auprès des troupes; aura confortée par la prise de Byzance si bien qu’en 407, élu stratège, il peut revenir triomphalement à Athènes.
Lysandre à la tête des armées spartiates et la défaite d’Athènes
Un nouvel homme fort, Lysandre, aussi brillant stratège qu’Alcibiade prend la tête des armée spartiates et obtient le soutien tant convoité de la Perse. La flotte athénienne, dirigée par Antiochos, un proche d’Alcibiade inexpérimenté et trop téméraire, est défaite à Notion provoquant la destitution d’Alcibiade. Il rejoint une place forte en Chersonèse.
Son ultime action mémorable est lié à la chute définitive d’Athènes à Aigos-Potamos. Le déséquilibre entre la flotte athénienne et celle de Lysandre est criant. Pour aider les siens, Alcibiade propose conseils et renforts mais cette fois-ci, il n’est pas écouté. Les Athéniens subissent un nouveau désastre et rendent les armes face à Sparte victorieuse.
Une mort héroïque
Pour la dernière fois de sa vie, Alcibiade cherche une terre d’accueil et, peut-être, un moyen de reconquérir le pouvoir. Il se tourne alors vers le satrape Pharnabaze en Bithynie. Ce sera son ultime tentative pour jouer un rôle sur la scène militaire et diplomatique. Il meurt en effet sous les flèches et les javelots en sortant courageusement de la maison incendiée où il se tenait avec sa concubine Timandre. Enroulant son manteau autour de son bras gauche, écrit Plutarque, il s'élança l'épée à la main pour se battre une dernière fois. Ses assassins, aux ordres, dit-on, de Pharnabaze allié de Lysandre, le frappèrent de loin n’osant pas l’affronter face à face. Plutarque suggère également qu’il aurait pu s’agir de la vengeance d’une famille déshonorée par les frasques amoureuses d’Alcibiade.
Ce qu'écrit Plutarque:
Ἐπιδόσεις γὰρ καὶ χορηγίαι καὶ φιλοτιμήματα πρὸς τὴν πόλιν ὑπερβολὴν μὴ ἀπολείποντα καὶ δόξα προγόνων καὶ λόγου δύναμις καὶ σώματος εὐπρέπεια καὶ ῥώμη μετ' ἐμπειρίας τῶν πολεμικῶν καὶ ἀλκῆς πάντα τἆλλα συγχωρεῖν ἐποίει καὶ φέρειν μετρίως τοὺς Ἀθηναίους, ἀεὶ τὰ πρᾳότατα τῶν ὀνομάτων τοῖς ἁμαρτήμασι τιθεμένους, παιδιὰς καὶ φιλοτιμίας.
À la vérité, ses dons, ses chorégies, sa munificence sans mesure envers la cité, la gloire de ses ancêtres, la force de son discours, sa beauté, la force de son corps, sa vigueur acquise bravement contre l'ennemi, faisaient que les Athéniens lui concédaient tout le reste et le supportaient avec mesure, donnant toujours à ses fautes les noms les plus doux, n'y voyant qu'enfantillages et rivalité.
Plutarque, Les Vies parallèles, Alcibiade, 16