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Les thermes : un espace fondamental du mode de vie "à la romaine"
Les thermes sont l’une des commodités indispensables que la ville doit procurer à ses habitants, un signe et un instrument de civilisation et de bien-être. C’est en effet un lieu de sociabilité et un lien fondamental qui construit l’identité civique et municipale : nus et partageant le même bain, les citoyens se côtoient de manière indifférenciée. Les bains sont souvent peu chers, et occasionnellement gratuits.
Fondés par les empereurs (Néron, Titus, Trajan, Caracalla, entre autres) qui veulent se donner l’image de bienfaiteurs, les thermes sont conçus comme des palais du "peuple-roi". Leur décoration et leur entretien sont aussi l’occasion d’actes d’évergétisme (un notable fait profiter ses concitoyens de sa richesse). Les gouvernants se livrèrent ainsi à une compétition à distance qui suscita une surenchère dans le gigantisme. On sait que les thermes de Trèves furent les plus grands jamais bâtis hors de Rome.
Les thermes impériaux
À sa période la plus florissante, Trèves disposait de trois balnea ou thermae, établissements de bains publics (voir le plan général).
Les plus récents, appelés "thermes impériaux", ont été commencés au début du IVe siècle : par leur dimension, ils devaient compter au nombre des thermes les plus importants de l’empire romain, sur le modèle de ceux de Caracalla à Rome (début du IIIe siècle).
Cependant, ces thermes n'ont probablement jamais été mis en service : les modifications apportées à l’ensemble architectural dans la seconde moitié du IVe siècle laissent penser qu’il s’agissait sans doute d’ériger un très vaste forum impérial, comme en témoignent les vestiges impressionnants encore visibles aujourd’hui.
Le site fut aménagé vers l’an 300 en tant qu’ensemble monumental dédié à l’empereur Constance Chlore et à son fils Constantin, qui avaient fait de Trèves leur résidence (voir la Tétrarchie). Il comportait entre autres une halle autoportante semblable à la Basilique de Constantin et de taille voisine.
Conformément aux normes romaines pour des bains publics aussi importants, on aménagea de nombreuses galeries souterraines pour le chauffage et la vidange de l’eau.
Galerie souterraine dans les Thermes impériaux de Trèves, © Odysseum, photo A. Collognat
En étudiant ces souterrains et ces infrastructures d’exploitation, on a pu établir que les bains des thermes n'ont jamais fonctionné car, après le transfert du palais de Constantin à Constantinople, ces bâtiments demeurèrent désaffectés, jusqu'à ce que l’empereur Valentinien les convertisse en caserne en 360 (elle pouvait recevoir entre 800 et 1 000 hommes de la garde impériale).
La halle autoportante géante, à l’Ouest, fut rasée et les hypocaustes du bâtiment Ouest comblés. Seul subsista le caldarium primitif (bain chaud), c'est-à-dire la halle orientale avec ses trois absides et son entrée, une basilique à colonnes utilisée par la suite comme tribunal.
Les Thermes impériaux de Trèves, vue vers l'espace du caldarium, © Odysseum, photo A. Collognat
Au Moyen Âge, l’ensemble architectural fut intégré en partie aux remparts comme porte fortifiée (l'une des fenêtres de l’abside méridionale ménageait le passage à l'intérieur de la ville) ; il fit office de carrière, comme tous les autres grands monuments romains de la ville.
Ce n’est qu'en 1808, alors qu’on abattait les anciennes fortifications de la cité, qu’on tomba sur les fondations des bains antiques, bien plus étendus que la porte médiévale.
En prévision des commémorations du jubilé des 2000 ans de la ville de Trèves, on a réhabilité les thermes impériaux (avant 1984).
Au début des travaux, seuls les bandeaux voûtés des fenêtres des absides étaient visibles ; des rouleaux supérieurs de l’arcature ne subsistaient que des moellons détachés. Une partie des travaux de rénovation consista à réparer ces voûtes pour les consolider. Entre 2005 et 2006, un hall d’accueil pour les visiteurs a été édifié à l'emplacement des ruines au Nord : il sert aussi pour les animations saisonnières (des concerts, des spectacles de reconstitutions antiques).
Cependant, certains spécialistes considèrent que ces travaux, destinés à attirer les touristes, ont durablement défiguré les ruines.
Lorsqu’on pénètre dans l’espace dit des thermes impériaux, on arrive tout d'abord dans le caldarium : cette ancienne salle d’eau chaude offre actuellement suffisamment de places assises pour accueillir 650 personnes lors de représentations théâtrales.Depuis le caldarium, on peut descendre dans les couloirs de service souterrains.
L'eau froide devait être chauffée dans six salles de chauffe : quatre d'entre elles sont encore visibles aujourd'hui. L'eau, chauffée à 40°, était ensuite dirigée vers les trois bassins disposés en demi-cercle et maintenue chaude par un chauffage au sol, qui servait également à chauffer le reste de l'espace voûté.
Vestiges du dispositif de l'hypocauste (chauffage par le sol) dans les Thermes impériaux de Trèves, © Odysseum, photo A. Collognat
Le dôme qui surplombe le tepidarium, construit en maçonnerie de blocage (opus caementicium), a un diamètre de 16, 45 mètres.
Les absides préservées présentent encore leur appareil original de pierres blanches et de briques rouges (opus mixtum), réputé pour sa solidité et son aspect esthétique.
L'appareil de construction dans les Thermes impériaux de Trèves, © Odysseum, photos A. Collognat
La grande palestre (gymnase à ciel ouvert) dans la partie Ouest des thermes, est aujourd'hui une aire engazonnée, ouverte au public, encore parsemée par endroits de ruines hautes de près d’un mètre.