A. La mosaïque de Préneste — (Document réalisé par Lionel Sanchez, dans le cadre d'un voyage organisé par Thalassa pour la CNARELA)
Mosaïque du Nil, Palestrina, Palais épiscopal (Ier siècle avant J.-C. - Ier siècle après J.-C.) Photo © Lionel Sanchez
La mosaïque de Préneste ornait le nymphée (bassin recevant une source considérée comme sacrée) de l’ancien sanctuaire de Préneste. Mesurant 5.85 m de large et 4.31 m de haut, sa datation reste encore sujette à discussion mais bon nombre de spécialistes s’accordent sur le fait qu’elle a probablement été installée à la fin de l’époque hellénistique, entre le Ier siècle avant J.-C. et le Ier siècle de notre ère. La mosaïque a été découverte dans la cave de l’ancien palais épiscopal de Palestrina, où elle a été entreposée au XVe siècle.
La mosaïque évoque le cours du Nil depuis l’Éthiopie (figurée sur le registre supérieur) vers la mer Méditerranée. Bien que son interprétation générale reste encore problématique, il est tout de même aisé de poser sur cette image une lecture descriptive qui ne laisse que peu de place aux conjectures. Le Nil est représenté sorti de son lit, pendant sa crue annuelle, inondant la campagne adjacente abondamment irriguée et recouverte d’une végétation luxuriante.
L’artiste déploie dans cette œuvre un véritable catalogue de botanique, zoologie, ethnographie (les costumes des populations sont décrits très précisément) et technologique (les différents types de bateaux).
Le message fondamental de cette mosaïque nilotique consiste dans la complexité du répertoire et dans l’imbrication entre nature et paysages humanisés, qui mènent à l’idée de luxuriance, d’abondance, d’exotisme, de paradis terrestre. Elle est la traduction du pouvoir de fascination qu’exerce la civilisation hellénique d’Égypte sur les Romains.
Pour ce qui est de la flore, l’artiste a représenté des palmiers, des roseaux et des fleurs de lotus correspondant à la fève d’Égypte, le Nélumbo ou lotus à fleurs roses.
B. La mosaïque de Palestrina (= Préneste) dans le beau livre de Caylus, Recueil des peintures antiques (1757) :
Présentation de l’ouvrage d’après la notice de Mémoire vive - Patrimoine numérisé de Besançon :
Le comte de Caylus est un amateur éclairé qui a consacré sa fortune à publier le Recueil d’antiquités égyptiennes, étrusques, grecques, gauloises (7 volumes, 1752-1767). Ces livres sont illustrés en couleurs, par des gravures peintes à la main. Grâce à ces reproductions, les motifs des peintures antiques récemment redécouvertes en Italie peuvent se diffuser à travers toute l’Europe, et influencer la décoration intérieure des palais.
En 1757, il publie un recueil somptueux, en exemplaires très peu nombreux, de reproductions de peintures antiques. C’est l’un de ces exemplaires que la Bibliothèque municipale de Besançon a acquis en 2006.
Dans cet ouvrage paru sous le titre Recueil des peintures antiques imitées fidèlement pour les couleurs et pour le trait, d’après les dessins coloriés faits par Pietro Sante Bartoli, la mosaïque de Palestrina occupe une partie à part ; l’explication de la mosaïque est due à l’abbé Barthélémy, qui l’a étudiée sur place lors d’un séjour en Italie.
La mosaïque fait l’objet d’une description détaillée : personnages, bâtiments, animaux, arbres, plantes, bateaux.
Sur le détail de l’ouvrage numérisé, on voit un Égyptien sur une barque en papyrus portant en guise de chapeau une feuille de Nélumbo retournée : le commentaire de l’image fait référence aux explications de l’abbé Barthélémy contenues dans l’ouvrage et s’appuie en outre sur la thèse d’I. Boissel, L’Égypte dans les mosaïques de l'Occident romain : images et représentations (de la fin du IIè siècle avant J.-C. au IVè siècle après J.-C.), 2007, p. 378-385.