Traduction juxta linéaire du texte de Clément Alexandrie Livre II, chapitre VIII - Parfums et couronnes : Εἰ μύροις καὶ στεφάνοις χρηστέον. Si de parfums et de couronnes il faut se servir.

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Dossier élaboré par :

Cécile Daude

Sylvie David

Paulette Garret

Sylvie Pédroaréna

Brigitte Planty

Στεφάνων δὲ ἡμῖν καὶ μύρων
De couronnes pour nous et de parfums

χρῆσις οὐκ ἀναγκαία.
l’usage (n’est pas) nécessaire.

Ἐξοκέλλει γὰρ
Cela fait dériver en effet

εἰς ἡδονὰς καὶ ῥᾳθυμίας,
vers les plaisirs et les laisser-aller,

μάλιστα γειτνιώσης τῆς νυκτός.
surtout la nuit approchant.

[…]

 

Ἐπιτηδεύουσι δὲ καὶ τὸ ἀπὸ κρίνων μύρον
Ιls1 ont l’habitude aussi du parfum (tiré) des lis

καὶ τὸ ἀπὸ τῆς κύπρου,
et de celui (tiré) du henné,

καὶ ἡ νάρδος εὐδοκιμεῖ παρ' αὐτοῖς
et le nard est renommé chez eux

καὶ τὸ ἀπὸ τῶν ῥόδων ἄλειμμα
ainsi que le baume (tiré) des roses

καὶ τὰ ἄλλα,
et les autres aussi

οἷς ἔτι χρῶνται γυναῖκες,
dont encore maintenant usent les femmes,

ὑγρά τε καὶ ξηρὰ καὶ τὰ ἐπίπαστα
parfums2 liquides et secs, ceux (qui sont utilisés) en poudre

καὶ ὑποθυμιώμενα μύρα·
et en fumigations ;

 

ἐπινοεῖται γὰρ αὐτοῖς ὁσημέραι
est conçue en effet pour eux tous les jours

πρὸς τὸ ἄπληστον τῆς ἐπιθυμίας
à la mesure de l’avidité de leur désir

τὸ ἀκόρεστον τῆς εὐωδίας3·
l’insatiabilité de fragrances ;

διὸ καὶ
c’est pourquoi aussi

πολλῆς τινος ἀπειροκαλίας ἀποπνέουσιν.
ils respirent un total manque de goût.

Αἳ̀ δὲ
Et elles (ces femmes)

καὶ τὰς ἐσθῆτας καὶ τὰς στρωμνὰς καὶ τοὺς οἴκους
même leurs vêtements, leurs couvertures et leurs chambres,

ὑποθυμιῶσί τε καὶ καταρραίνουσιν,
elles (les) enfument et (les) inondent,

μονονουχὶ δὲ
et (c’est) tout juste si

καὶ τὰς ἀμίδας
les pots de chambre aussi,

ὄζειν ἀναγκάζει τοῦ μύρου ἡ τρυφή.
leur goût du luxe ne (les) force pas à exhaler le parfum !

 

Εὖ μοι δοκοῦσι
Il me semble que certains4 (font) bien,

σχετλιάσαντες τῇ περὶ τοῦτο σπουδῇ
jugeant misérable le soin apporté à cela,

τοσοῦτο τοῖς μύροις ἀποδιακεῖσθαί τινες
d’avoir tellement d’aversion pour les parfums

τὴν ἀνδρωνῖτιν ἐκθηλύνουσιν,
qui efféminent l’appartement des hommes,

ὡς καὶ τοὺς τεχνίτας αὐτῶν,
que même les fabricants de ceux-ci,

τοὺς μυρεψούς,
les parfumeurs,

τῶν εὐνομουμένων ἀπελαύνειν πόλεων
ils (les) expulsent des cités régies par de bonnes lois

καὶ τῶν ἀνθεινῶν ἐρίων τοὺς βαφεῖς
et que les teinturiers de lainages bariolés,

ἀπελαύνειν καὶ αὐτούς·
ils les expulsent eux aussi ;

οὐ γὰρ θέμις
il est en effet sacrilège

δολερὰ εἵματα καὶ χρίσματα
que des vêtements et des onguents trompeurs

εἰς τὴν ἀληθείας παρεισιέναι πόλιν.
s’introduisent dans la cité de vérité.

 

Χρὴ δὲ καὶ μάλα
Il faut d’autre part et surtout

τοὺς μὲν ἄνδρας τοὺς παρ' ἠμῖν
que les hommes proches de nous

μὴ μύρων, ἀλλὰ καλοκαγαθίας ὄζειν,
exhalent l’odeur non de parfums, mais de bonté,

γυνὴ δὲ ἀποπνείτω Χριστοῦ,
et que la femme respire le Christ5,

τοῦ ἀλείμματος τοῦ βασιλικοῦ,
(qui est) le baume royal,

μὴ διαπασμάτων καὶ μύρων,
et non pas les poudres et les parfums,

ἀεὶ δὲ
et qu’en toute occasion

τῷ σωφροσύνης ἀμβροσίῳ χρίσματι συναλειφέσθω,
de sagesse, onguent immortel, elle s’enduise entièrement

ἁγίῳ τερπομένη μύρῳ τῷ πνεύματι.
se délectant, en fait de saint parfum, de l’esprit saint6.

Τοῦτο σκευάζει Χριστὸς
C’est celui-là que prépare le Christ

ἀνθρώποις γνωρίμοις,
pour ses disciples,

εὐωδίας ἄλειμμα,
baume de bonne fragrance,

ἐκ τῶν οὐρανίων συντιθεὶς ἀρωμάτων τὸ μύρον.
composant ce parfum7 à partir de célestes arômes.

Τούτῳ καὶ αὐτὸς ὁ κύριος
De ce parfum8 aussi le Seigneur lui-même

συναλείφεται τῷ μύρῳ,
est entièrement enduit,

ὡς διὰ Δαβὶδ μεμήνυται·
comme par l’entremise de David il est signifié :

«Διὰ τοῦτο ἔχρισέν σε ὁ θεός,
« C’est pour cela que Dieu t’a oint,

ὁ θεός σου,
ton Dieu,

ἔλαιον ἀγαλλιάσεως
d’une huile d’allégresse,

παρὰ τοὺς μετόχους σου·
de préférence à tes compagnons ;

σμύρνα καὶ στακτὴ καὶ κασία
myrrhe et aloès et casse9,

ἀπὸ τῶν ἱματίων σου.»
(s’exhalent) de tes vêtements »10.

[…]

Τοιαύτη δὲ καὶ τῶν στεφάνων ἡ χρῆσις,
Tel est par ailleurs11 aussi l’usage des couronnes,

κωμαστικὴ καὶ πάροινος·
propre aux fêtards et aux gens avinés :

     ἄπερρε· μή μοι στέφανον ἀμφιθῇς κάρᾳ.
« Va-t’en d’ici ! Ne mets pas, je t’en prie, de couronne sur ta tête ! »12

Ἦρος μὲν γὰρ ὥρᾳ
À la saison du printemps, il est vrai,

λειμῶσιν ἐνδρόσοις καὶ μαλακοῖς,
dans les prairies humides de rosée et moelleuses,

ποικίλοις χλοάζουσιν ἄνθεσιν,
bourgeonnantes de fleurs aux couleurs variées,

ἐνδιαιτᾶσθαι καλόν,
il est bon de s’attarder,

αὐτοφυεῖ καὶ εἰλικρινεῖ τινι εὐωδίᾳ
d’une fragrance naturelle et pure,

καθάπερ τὰς μελίττας
comme les abeilles,

τρεφομένους·
se nourrissant ;

 

τὸ δὲ
mais le fait de,13

πλεκτὸν στέφανον ἐξ ἀκηράτου
« d’une couronne tressée venant d’une intacte

λειμῶνος
prairie »14

κοσμήσαντας
s’étant ornés,

οἴκοι περιφέρειν
à la maison (la) ramener

οὐ σωφρόνων·
n’(est) pas (le fait de) gens sages :

οὐ γὰρ ἁρμόδιον
il n’(est) pas en effet adapté15

ῥόδων κάλυξιν
avec des boutons de roses

ἢ ἴοις ἢ κρίνοις ἢ ἄλλοις τισὶ τοιούτοις ἄνθεσι
ou des violettes ou des lis ou d’autres fleurs pareilles

χαίτην πυκάζεσθαι
de couvrir abondamment (sa) chevelure

κωμαστικήν,
à la manière des fêtards16,

διανθιζομένους τὴν χλόην.
en déflorant la jeune verdure.

Ἐμψύχει γὰρ χαίτην ἄλλως
Elle rafraîchit en effet la chevelure autrement (qu’il ne faut),

ὁ στέφανος περικείμενος
la couronne qui la ceint,

καὶ δι' ὑγρότητα καὶ διὰ ψυχρότητα.
et à cause de l’humidité et à cause du refroidissement.

Ταύτῃ
De cette façon

καὶ οἱ ἰατροὶ
les médecins aussi,

ψυχρὸν εἶναι φυσιολογοῦντες τὸν  ἐγκέφαλον
observant selon la nature qu’est froid l’encéphale,

μύρῳ χρίεσθαι ἀξιοῦσι
préconisent d’enduire de parfum

τὰ στήθη καὶ μυκτῆρας ἄκρους,
la poitrine et le bord des narines,

ὡς δυνηθῆναι
de façon que puisse

τὴν πυρώδη ἀναθυμίασιν
la brûlante exhalaison,

ἡσυχῇ διοδεύουσαν
doucement se frayant son chemin,

εὐρώστως ἀναθάλπειν τὴν ψυχρότητα.
fortement réchauffer cette froideur.

Πολλοῦ τοίνυν δεῖ
De beaucoup donc s’en faut (qu’on doive)17

τοῖς ἄνθεσιν ἐπιψύχειν αὐτόν,
avec des fleurs le (= le cerveau) rafraîchir davantage,

ὁπότε ἀλεαίνεσθαι ἐθέλει τὸ νευρῶδες.
puisque le système nerveux demande à être chauffé. [...]

 

[...] Στέφανον μὲν γυναικὸς
(Comme) couronne de la femme,

τὸν ἄνδρα ὑποληπτέον,
(c’est) le mari (qu’)il faut considérer,

ἀνδρὸς δὲ τὸν γάμον,
et (comme couronne) de l’homme, le mariage,

ἄνθη δὲ τοῦ γάμου
et (comme) fleurs du mariage

τὰ τέκνα ἀμφοῖν,
les rejetons de tous les deux,

ἃ δὴ τῶν σαρκικῶν λειμώνων
eux que des prairies charnelles

ὁ θεῖος δρέπεται γεωργός.
récolte le divin cultivateur.

 

« Στέφανος δὲ γερόντων
« Et la couronne des vieillards

τέκνα τέκνων,
(ce sont) les rejetons de (leurs) rejetons,

δόξα δὲ παισὶν οἱ πατέρες »,
et la gloire pour les enfants, (leurs) pères »,

φησίν·
dit (l’écriture) ;

ἡμῖν δὲ δόξα ὁ πατὴρ τῶν ὅλων,
et pour nous la gloire, (c’est) le père de toutes choses,

καὶ τῆς συμπάσης ἐκκλησίας
et de l’église tout entière

στέφανος ὁ Χριστός.
la couronne, (c’est) le Christ.

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Cécile Daude

Sylvie David

Paulette Garret

Sylvie Pédroaréna

Brigitte Planty

Notes 

  1. Le sujet de ἐπιτηδεύουσι représente les anciens Grecs qui usaient de parfums ; Clément d’Alexandrie cite les opinions d’Aristippe et de Sémonide d’Amorgos (Cl. Mondésert donne comme référence : fr. 14 Diehl, cité incomplètement dans Athénée XV 690 C).
  2. Prendre μύρα en fin de phrase.
  3. εὐωδία : valeur collective.
  4. Prendre τινες pour sujet de la phrase.
  5. Χριστός signifie « oint ».
  6. ἁγίῳ est en facteur commun à μύρῳ et τῷ πνεύματι. L’expression consacrée pour désigner le saint esprit est τὸ ἅγιον πνεῦμα.
  7. Prendre τὸ μύρον à la fin de la phrase.
  8. Prendre τῷ μύρῳ à la ligne suivante.
  9. Selon E. Rimmel, The Book of Perfumes, London, 1865, 20142, cité en note de La Sainte Bible Polyglotte, F. Vigouroux, t. IV, p. 109-111, la myrrhe est la résine du Balsamodendron myrrha, qui croît en Arabie et en Abyssinie ; d’autre part, il ne faut pas confondre l’aloès employé en médecine avec l’aloès dont parle la Bible : ce dernier est l’Aloexylum agallochum, arbuste qui pousse en Orient et dont on fait des bâtons odorants qui, en brûlant, libèrent leur arôme. La casse (κασία) désigne l’écorce du cinnamomum casia, le « faux cannelier », tandis que le cinnamome (κιννάμωμον) correspond au cinnamomum verum (voir Théophraste, Recherches sur les plantes, IX, 5, 1-3) ; le parfum de la casse est inférieur à celui du cinnamome. La casse de l’écriture Sainte doit être distinguée de la plante purgative du même nom utilisée anciennement en médecine (cf. Le Médecin malgré lui, acte III, scène 3 : Sganarelle à Jacqueline : « votre vue est la rhubarbe, la casse et le séné qui purgent toute la mélancolie de mon âme » ; Le Malade imaginaire, acte I, scène 1 : Argan détaillant la facture de l’apothicaire : « Plus, du vingt-cinquième, une bonne médecine purgative et corroborative, composée de casse récente avec séné levantin et autres, suivant l’ordonnance de Monsieur Purgon, pour expulser et évacuer la bile de Monsieur, quatre livres »).
  10. Il s’agit d’une citation du Psaume 44, 8-9 (éd. de la Septante A. Rahlfs, Stuttgart, 1935, 19652). Ici, Dieu s’adresse à David mais Clément d’Alexandrie, écrivant à la fin du 2e et au début du 3e siècle après J.-C., voit dans David le Christ lui-même.
  11. Dans ce qui précède, il a été question du fait que l’odeur excessive des parfums signale la présence des licencieux.
  12. Vers d’un poète tragique : fragment 108 Adespota éd. Nauck. En l’absence de contexte, l’interprétation de μοι comme datif éthique reste une conjecture.
  13. Pour la traduction, prendre tout de suite οἴκοι περιφέρειν.
  14. Cette citation est tirée d’Hippolyte d’Euripide (vers 73-74) et se rapporte à la couronne qu’Hippolyte offre à Artémis.
  15. D’une part, l’homme rompt l’harmonie de la nature et d’autre part, il adopte pour lui-même une conduite qui n’est ni harmonieuse ni conforme à la santé.
  16. L’adjectif est un attribut résultatif. écho d’un passage du comique Cratinos, fragment 105 éd. Kassel-Austin.
  17. δεῖ a une double valeur : il fait partie de l’expression πολλοῦ δεῖ « loin s’en faut » et en même temps il exprime l’idée d’obligation « il faut », dont dépend l’infinitif ἐπιψύχειν.
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