Palmyre - La perle du désert, cité touchée en plein coeur Tadmor en arabe

L'oasis : une situation favorable

L’oasis de Palmyre se trouve à peu près à mi-chemin entre la côte méditerranéenne et la vallée de l’Euphrate. Le nom de Tadmor (nom arabe de Palmyre) apparaît dès le XIXe siècle avant J.-C. sur une tablette provenant du comptoir assyrien de Kanesh en Anatolie centrale. L’oasis s’est développée, car c’était un point de convergence de plusieurs pistes dans le désert, entre l’est et l’ouest. Ainsi des marchandises en provenance de l’océan Indien, du Yémen, de l’Inde ou encore de la Chine ont été acheminées à proximité de Palmyre dans les caravansérails établis pour abriter les caravanes marchandes.

Une cité multiculturelle

Peuplée pour l’essentiel d’Araméens parfois mêlés aux Arabes nomades du désert environnant, Palmyre est baignée de culture gréco-romaine. Depuis la conquête d’Alexandre le Grand (fin 333 avant J.-C.), elle est au contact des Grecs de Syrie. Des inscriptions en grec datant de cette époque y ont été retrouvées.  Ce sont probablement les rois grecs qui, les premiers, ont organisé le trafic des marchandises à travers l’oasis qu’ils nommèrent Palmyra, en référence à ses milliers de palmiers.

L’intégration à l’empire romain favorise le développement de la colonie romaine

Vers 17-19 après J.-C. sans doute, Palmyre est annexée à l’empire romain. À cette occasion commence la reconstruction du principal sanctuaire, celui de Bêl, consacré en avril 32, mais dont les travaux se poursuivent jusqu’au milieu du IIe siècle.

À partir de la deuxième moitié du Ier siècle, Palmyre commence à se doter des institutions d’une cité gréco-romaine, elle reçoit une garnison et un poste de douanes romains. Son commerce prospère favorise la rénovation et la construction de nombreux édifices.

D’abord sous la protection de Rome, la ville n’est pas encore une ville libre et doit payer un tribut qu’un fonctionnaire romain demeurant sur place est chargé de percevoir. La position de Palmyre est alors stratégique, car elle défend la frontière orientale de l’Empire romain avec le royaume des Parthes. En 130, l’empereur Hadrien visite la ville, florissante, l’une des plus belles de la Syrie romaine et lui confère le titre d’Hadriana. Vers 212-214, l’empereur Caracalla la hisse au rang de colonie romaine.

De la reine Zénobie au déclin

Pourtant au IIIe siècle, la prospérité de la ville commence à décliner : les caravanes venant de l’Orient se font de plus en plus rares, avec la montée en puissance de la dynastie des Sassanides à l’Est, lesquels lancent des incursions dévastatrices. Au milieu du IIIe siècle, devant la difficulté des empereurs à protéger la province, un puissant notable palmyrénien et sénateur de Rome, Odainath, prend la tête des opérations de défense et parvient à repousser l’ennemi. Après son assassinat en 267, son épouse, la reine Zénobie, entre en conflit en 271 avec l’empereur romain Aurélien. La reine dispose d’une armée puissante, qui est toutefois anéantie en 272. Palmyre est prise et Zénobie capturée. La reine est emmenée à Rome où elle figure dans le triomphe d’Aurélien.

En 325, les listes du Concile de Nicée mentionnent un évêque de Palmyre et les chroniques byzantines font état d’un évêché en 793 et 818, bien après l’arrivée des musulmans (en 636). Dès cette époque, commence le réemploi des matériaux antiques et, au XIIe siècle, le temple de Bêl est transformé en fortin. L’oasis sombre alors dans l’anonymat jusqu’à ce qu’au XVIIe siècle des marchands anglais pénètrent à nouveau dans l’oasis de Tadmor.

Une mobilisation internationale pour faire renaître la cité antique

Au fil du XXe siècle, des archéologues allemands, syriens, français ou encore polonais entreprennent des fouilles du site, en partie enterré sous le sable. Palmyre est inscrite en 1980 sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO.

Palmyre, touchée en plein cœur

Mais le conflit qui éclate en Syrie en 2011 met fin aux recherches archéologiques. En 2015, les forces armées de Daesh choisissent le site comme théâtre de nombreuses exécutions et détruisent volontairement plusieurs monuments emblématiques, de même lorsqu’ils reprennent la ville en 2016. Un plan de sauvegarde du patrimoine a été mis en œuvre. Marqueur d’une reconstruction possible, le lion d’Athéna, qui protégeait autrefois l’entrée du temple d'Al-Lât, fortement endommagé en 2015, a été restauré en 2017. Il protège une antilope assise entre ses pattes symbolisant la protection du plus fort envers le plus faible. 

   

L’architecture de Palmyre

Dès son intégration à l’empire romain, les temples de la cité sont rénovés, et les Palmyréniens entreprennent la construction de nombreux édifices.

La ville s’est entourée sans doute au IIIe siècle d’une muraille en forme de tortue, d’une longueur de 6 km, qui intègre des tours rectangulaires défensives. Appelée enceinte de Zénobie, elle a été restaurée par Justinien.

Le temple de Bêl

Consacré au dieu du ciel, protecteur de la cité, ce temple est considéré comme l'un des plus importants monuments religieux du Ier siècle en Orient par sa conception unique. Commencé en 19 et consacré le 6 avril 32, il est  périptère (entouré de colonnes) et encadré d’une immense cour à portiques de 200 m de côté achevée à l’époque d’Hadrien. On entrait dans le sanctuaire par le grand côté ouest, différence notable d’avec les temples hellénistiques dans lesquels l’accès se faisait par le petit côté. La cella  (pièce centrale) au plafond abondamment décoré présente deux niches qui contenaient les statues de Bêl. On lui sacrifiait des animaux. Le temple a été transformé vers le XIIe s. en citadelle musulmane avant d’être endommagé en 2016.

La grande colonnade

La cité s’organise autour d’un decumanus, grand axe Est-Ouest. À Palmyre, il prend la forme d’une allée majestueuse ornée d’une grande colonnade. Mais, à la différence des villes hellénistiques et romaines, où les rues sont tracées au cordeau, cette grande voie dessine deux coudes, masqués pour le premier par un arc monumental, pour le second par un tétrapyle (édife à 4 socles). Splendeurs du site, la colonnade, l’arc et le tétrapyle ont été fortement endommagés par les forces armées de Daesh de 2015 à 2016.

L'Arc monumental reliait le temple de Bêl à la grande colonnade. Composé d'une large porte centrale entourée de deux plus petites, il a été érigé sous l’empereur Septime Sévère, entre 193 et 211, peut-être à l’occasion d’une victoire romaine sur les Parthes, ce n’était pas un arc de triomphe. Ses décorations de plantes et de motifs géométriques constituent un exemple exceptionnel de l’art palmyrénien.

De part et d’autre de la grande colonnade s’organise la cité, pour laquelle on construit, du  Ier au IIIe siècles, des monuments inédits comme des thermes, un théâtre, une agora marchande (place publique), ou encore un bouleutérion (sénat).

Des thermes de Dioclétien il subsiste une piscine entourée d’un péristyle. Une inscription date l’édifice de l’an 300. Certains archéologues y voient l’ancien palais de Zénobie transformé après la conquête romaine en bâtiment public.

L’agora véritable centre de la vie publique et économique de l’oasis était constitué d’un vaste espace à ciel ouvert, bordé d’un portique. À proximité, un grand entrepôt permettait de déposer les marchandises qui transitaient par la ville. C’est là que l’on a retrouvé la stèle qui fixait la taxe municipale sur tous les articles qui entraient ou sortaient de la ville.

Le théâtre romain, construit au IIe siècle, de taille assez modeste, compte douze rangées de gradins. Le somptueux mur de scène en pierre (frons scaenae) dont il ne subsiste que la partie inférieure est composé d’une grande porte centrale au fond d’une niche arrondie. Quatre portes réparties de chaque côté permettaient également l’entrée des acteurs. L’ensemble est orné de frises et de colonnes de style corinthien. Des statues ornaient les différentes niches.  La partie centrale du mur de scène a été détruite en 2016.

Le tétrapyle se dresse  au centre d’une place circulaire. Décoration monumentale des grandes cités de l’Orient romain, c’est un édifice composé de 4 groupes de 4 colonnes à chapiteaux corinthiens coiffés d’un entablement en pierre. Une statue se dressait entre les colonnes. L’une d’elles représentait la reine Zénobie.

Le temple de Baalshamin est consacré à une divinité céleste, maître de la pluie et des nuages. Il constitue avec Bêl l’autre forme de la divinité tutélaire de Palmyre. Baalshamin est souvent associé à Malakbel dieu solaire de la fertilité et Aglibôl divinité lunaire pour former une triade Le temple, bien plus modeste que celui de Bêl a été transformé en église à l’époque byzantine, ce qui l’a préservé de la ruine.

Le temple de la déesse Al-Lât, d’allure gréco-romaine, se trouve à l’ouest de la ville. La déesse, qui ne possède aucune tradition iconographique propre puisque les Arabes ne représentent pas leurs dieux, fut d’abord assimilée à Atargatis et figurée comme une déesse aux animaux, avant de recevoir dans son temple une statue d’Athéna d’inspiration attique après 270. L’entrée du temple était protégée par une statue de  lion dite « d’Athéna ».

La nécropole se trouve à l’extérieur de la cité. Les Palmyréniens se faisaient inhumer en famille, dans des caveaux souterrains, des hypogées, et le plus souvent dans des tours funéraires. Les corps des défunts étaient installés dans des loculi (cavités).Un escalier intérieur permettait d’accéder aux différents étages.

Ce qu’en dit PLINE L’ANCIEN, Histoire naturelle, V,87

Palmyra, urbs nobilis situ, divitiis soli et aquis amoenis, vasto undique ambitu harenis includit agros ac, velut terris exempta a rerum natura, privata sorte inter duo imperia summa Romanorum Parthorumque est prima in discordia semper utrimque cura.

 

Palmyre, est une ville célèbre par sa situation, par la richesse de son sol et par ses eaux agréables. Ses champs sont limités par de vastes étendues de sable qui l’entourent de toutes parts. Et, pour ainsi dire, retranchée des terres habitables par la nature des choses, du fait de son destin particulier entre deux très grands empires, celui des Romains et celui des Parthes, elle est, en cas de conflit, la première préoccupation de l’un comme de l’autre.

Traduction P. C-T.

Le droit d’octroi

On a retrouvé près du mur d'enceinte de la ville une longue stèle datée d’avril 137. Son texte bilingue, grec et palmyrénien, rapporte une décision de la boulè, (assemblée locale) qui réglemente le montant des taxes « douanières » à l’entrée et à la sortie de l’oasis : étoffes, ivoire, moutons, chameaux, esclaves ou prostituées. Ce décret nous renseigne sur l’administration de la ville dirigée par le président de la boulé, secondé par un secrétaire et deux archontes. Enfin, le texte mentionne les autorités romaines, le gouverneur de la région et son représentant à Palmyre, à l’initiative desquelles fut sans doute pris le décret. La stèle est conservée  au musée de l’Ermitage à Saint-Pétersbourg.

Le panthéon de Palmyre

L’originalité du panthéon de Palmyre reflète des influences multiples. On vénère deux formes d’un dieu tutélaire : l’un, honoré par tout le peuple dans son grand temple, se nomme Bêl, d’origine babylonienne, maître du ciel étoilé, très tôt assimilé à Zeus ; l’autre, d’origine cananéenne et araméenne, honoré dans un petit temple, Baalshamin, maître de la pluie et des nuages, «le dieu bon et rémunérateur», est le dieu de la piété personnelle. Associés à Malakbel, Yarhibol et Aglibôl, ils constituent l’un et l’autre une triade sacrée. Bien d’autres divinités sont encore vénérées comme Hercule (figuré sur un relief du temple de Bêl), Apollon, dont le culte était très populaire ou bien Allât, la grande déesse des Arabes du Sud, assimilée à Athéna.

Les cultes

Les sanctuaires les plus importants accueillent non seulement le dieu principal, mais de nombreuses divinités secondaires. Les rites, mal connus, comportent des processions et surtout des banquets, auxquels on accède sur invitation comme en témoignent des milliers de tessères, jetons de terre cuite ou de métal avec la représentation du dieu ou de ses symboles.

Voir aussi sur Odysseum :

En deux mots : 

 

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