Pourquoi l’entrée par la cartographie ?
Au programme de 1ère générale depuis septembre 2019, Mémoires d’Hadrien apparaît souvent d’emblée comme une œuvre « résistante » dans laquelle il est difficile d’entrer.
Face à cette œuvre érudite, où les éléments de reconstitution historique occupent une large place, l’une des premières difficultés est celle de la construction de l’univers de référence : une connaissance déjà relativement fine de la culture gréco-romaine ainsi que des différentes civilisations de l’Antiquité, notamment celles du Moyen-Orient, paraît nécessaire pour véritablement entrer dans ce roman.
Pour les enseignants, le travail de contextualisation historique paraît, par son ampleur, difficile à mener, souvent parce qu’envisagé sous l’angle historique et culturel : comment apporter aux élèves tous les repères historiques, mais aussi toutes les connaissances philosophiques et culturelles, qui leur permettront d’entrer dans l’œuvre et de l’apprécier ?
Du côté des élèves, on retrouve cette difficulté posée par l’univers de référence. Confrontés au chapitre relatant la visite d’Hadrien et Antinoüs chez la devineresse de Canope, à la fin de « Sæculum Aureum », des élèves sérieux butent ainsi, à la première lecture, sur un obstacle tout simple : dans le texte, quels mots font référence à des personnes ? quels mots font référence à des lieux ? De quelles personnes et de quels lieux s’agit-il ? Le nom « Alexandrie » lui-même pose problème : homme ? femme ? lieu ? et si lieu, de quel pays ? Lié à quelle civilisation ? Rien n’est clair.
Ce problème est bien entendu accentué, à l’échelle du roman, par le fait que les noms des lieux ne sont souvent plus en usage de nos jours. Les termes de « Pont-Euxin » ou de « Propontide », pour être compris, doivent ainsi, au minimum :
- être associés à leurs équivalents actuels : « Mer Noire » et « Mer de Marmara »,
- être positionnés sur une carte,
- et être associés à des connaissances sur ce qu’ils représentaient pour les Romains de l’époque d’Hadrien, faute de quoi leurs référents demeureront encore extrêmement abstraits pour la plupart des élèves.
Mémoires d’Hadrien peut, fondamentalement, se lire comme un récit de voyage : voyage à travers l’espace, voyage à travers le temps, voyage à travers une vie. En partant de ce constat, ne pourrait-il pas être efficace d’envisager, en 1ère, la contextualisation sous l’angle de la géographie plutôt que sous celui de l’histoire ? Dans l’élaboration d’images mentales suffisamment précises et exactes, ce sont d’abord les noms de lieux, et leur mise en relation avec les différentes civilisations méditerranéennes de l’époque, qui posent problème. Dans la proposition pédagogique qui suit, nous allons donc voir comment accompagner et soutenir l’entrée dans les Mémoires d’Hadrien par l’élaboration progressive de cartes interactives qui pourront par ailleurs constituer de bons supports de travail et de révision.
Pour ce faire, nous proposons de nous appuyer sur l’une des offres en ligne de l’Éduthèque : IGN Édugéo. Destinée avant tout aux professeurs d’Histoire-Géographie, cette plateforme de cartographie permet de réaliser des cartes interactives, en positionnant des lieux et en leur ajoutant des annotations sous forme de texte ou d’image. Nous allons ici en détourner l’usage, de façon à ce que la carte constitue un complément de l’analyse d’un passage de Mémoires d’Hadrien.
Cette démarche est naturellement transposable avec d’autres outils du même type, notamment, de façon encore plus fluide, avec la plateforme ArcGIS Online d’Esri, actuellement expérimentée par la DANE de l’académie de Versailles.