L'esclavage - Justifications philosophiques

Bibliographie

BEARDSLEY, G. H., The Negro in Greek and Roman civilisation, Baltimore, 1929
BOURGEOIS A., La Grèce antique devant la négritude, Présence Africaine, 1971. Préface de Léopold Sédar Senghor.

Heureux esclaves
Au IVe siècle de notre ère on voit aussi se développer la pensée du bonheur d'être esclave. On sait que certains refusaient d'être affranchis pour ne pas avoir à affronter une vie de pauvreté sans aucun soutien. L'argument est développé par plusieurs écrivains notamment le rhéteur Libanios.

Libanios, Sur l'esclavage, 25, 66-67

À l'argument des "soucis" vient bientôt se joindre l'argument moral : heureux l'esclave qui ne peut être maître de son ventre : en acceptant sa servitude et la frugalité qui
l'accompagne, il est bien plus libre moralement que son maître! Cet argument sera largement repris par les Chrétiens comme Théodoret.

Théodoret, Sur la providence divine, 677
GARNSEY, P., Conceptions de l’esclavage d’Aristote à Saint Augustin, Les Belles Lettres, 1996, 2004
GRIMAL, P., Sénèque, Fayard, 1991

Aristote


C’est Aristote qui, au IVe siècle avant notre ère, donne une justification philosophique de l’esclavage. On remarquera que dans cette justification, il mêle deux plans, le plan social et le plan moral : c’est sur cette base que bon nombre de philosophes développeront, plus tard, l’idée de « l’esclavage volontaire », sans remettre en cause le phénomène social. Cette analyse est présente essentiellement dans son traité La Politique. Aristote,
Politique, I, 1253b.

Ὄτι τοίνυν εἰσὶ φύσει τινὲς οἱ μὲν ἐλεύθεροι οἱ δὲ δοῦλοι, φανερόν, οἷς καὶ συμφέρει τὸ δουλεύειν καὶ δίκαιόν ἐστιν.
Il est donc évident qu’il y a par nature des gens qui sont les uns libres, les autres esclaves, et que pour ceux-ci la condition servile est à la fois avantageuse et juste.


... καὶ ὁ δοῦλος κτῆμά τι ἔμψυχον, καὶ ὥσπερ ὄργανον πρὸ ὀργάνων πᾶς ὑπηρέτης.
de même l’esclave est un objet de propriété animé et tout serviteur est comme un instrument précédant les autres instruments.

 

Caton l'Ancien et Cicéron


Caton est souvent donné comme l'exemple type du Romain de la République. Pour lui l'esclave est un outil qu'il convient d'utiliser au mieux. Aucun sentiment autre que celui du profit

- il faut entretenir l'esclave dans la mesure où il peut fournir un travail et donc être rentable : les malades verront leur ration de nourriture réduite ; on vend les vieux.

- il faut traiter l'esclave selon ce que l'on peut attendre de lui : l'esclave qui développera des capacités deviendra chef d'équipe. Mais il convient, dit-il de  conserver la méfiance la plus grande à l'égard des esclaves.
Chez Cicéron , au contraire, affleure  une véritable réflexion philosophique sur l'esclavage. Cicéron ne croit pas que la nature humaine comporte de différenciations
congénitales qui destineraient  certains à l'esclavage. Il pense que certains hommes déchoient collectivement, par faute morale, d'une nature humaine qui est la même pour tous.
Cicéron, De Republica, III, 36-37

Une étape de l'évolution de la pensée


SÉNÈQUE va beaucoup plus loin et  témoigne dans ses écrits d'une pensée tout autre : "les esclaves sont aussi des hommes". Sénèque, Lettres à Lucilius, 47

Ses arguments sont simples : 

- une commune origine

- une possibilité pour chacun de nous d'être réduits aussi à l'esclavage : il n'y a donc pas un esclavage de nature, mais de condition

- des exemples admirables de courage, de fidélité et d'honnêteté.

Cela ne signifie pas  qu'il convient de renverser l'ordre social : mais il faut faire preuve d'humanité envers ceux qui nous servent; et, pour ce qui nous concerne, ne pas nous rendre esclave de nos passions...

Bibliographie

BEARDSLEY, G. H., The Negro in Greek and Roman civilisation, Baltimore, 1929
BOURGEOIS A., La Grèce antique devant la négritude, Présence Africaine, 1971. Préface de Léopold Sédar Senghor.

Heureux esclaves
Au IVe siècle de notre ère on voit aussi se développer la pensée du bonheur d'être esclave. On sait que certains refusaient d'être affranchis pour ne pas avoir à affronter une vie de pauvreté sans aucun soutien. L'argument est développé par plusieurs écrivains notamment le rhéteur Libanios.

Libanios, Sur l'esclavage, 25, 66-67

À l'argument des "soucis" vient bientôt se joindre l'argument moral : heureux l'esclave qui ne peut être maître de son ventre : en acceptant sa servitude et la frugalité qui
l'accompagne, il est bien plus libre moralement que son maître! Cet argument sera largement repris par les Chrétiens comme Théodoret.

Théodoret, Sur la providence divine, 677
GARNSEY, P., Conceptions de l’esclavage d’Aristote à Saint Augustin, Les Belles Lettres, 1996, 2004
GRIMAL, P., Sénèque, Fayard, 1991

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