Zeus, Amalthée et les dieux de l'Olympe D'après H.S. Brès, Mes beaux contes mythologiques, 1921

Voici ce qu'autrefois les blondes chèvres de la Grèce racontaient à leurs chevreaux en se redressant fièrement...

Notre aïeule, la belle chèvre Amalthée, a été la nourrice du puissant Zeus, Roi des dieux... C’était au commencement du monde, quand le Ciel avait épousé la Terre; ils avaient eu beaucoup d’enfants, tous si grands et si forts que leur père avait peur d’eux et pensait : « Qui sait si un jour ils ne s’uniront pas pour me renverser ? » Dans cette crainte, à mesure que ses fils grandissaient, il tuait les plus robustes, et, soulevant les montagnes, il les enterrait dessous. La mère, affolée de douleur, finit par fabriquer une grande faux d’acier et elle dit à ses enfants encore vivants : « La mort de vos frères remplit mon cœur d’épouvante; ne les vengerez-vous pas ? — Oui ! dit Cronos, l’aîné, donne-moi la faux. »

Alors il faucha le père cruel, comme les épis des moissons, et régna à sa place. Mais, se souvenant qu’il avait tué son père, Cronos à son tour, eut peur de ses enfants et il pensa : « Mieux vaut qu’ils disparaissent tout petits ». — Donc, il se mit à les dévorer dès leur naissance, malgré les cris et les larmes de sa femme Rhéa. A la fin, celle-ci pensa : « Pourquoi n’essayerais-je pas d’emmailloter une grosse pierre? Le soir, je la présenterai à mon mari, il croira voir un nouveau-né, et sa bouche énorme avalera tout ».

La ruse réussit et Rhéa sauva ses enfants : Zeus, Héra, Déméter, Poséidon et Hadès. Tandis que Cronos croyait les avoir mangés, ils étaient bien vivants, cachés dans les montagnes de la grande ile de Crète et tendrement soignés par toutes les déesses des campagnes. Celles des eaux, les Naïades, baignaient les enfants dans leurs frais ruisseaux ; celles des forets, les Dryades, jouaient avec eux à l’ombre de leurs grands arbres ; celles des champs, les Nymphes, veillaient sur leur sommeil. Quand ils avaient soif, Amalthée, la plus superbe chèvre du pays, belle de pelage et de cornes, leur offrait sans se lasser son lait abondant et exquis, car elle ne broutait que des herbes parfumées. Quand ils pleuraient, de peur que Cronos n’entendît leurs cris, les bonnes nymphes dansaient autour d’eux en frappant des cymbales. Amalthée faisait tinter sa clochette et les Faunes, qui sont des petits dieux champêtres, jouaient de la flûte dans les environs. Lorsque les enfants furent grands,  Zeus l’aîné, était le plus beau de tous et le plus intelligent, et il avait apprivoisé un aigle énorme qui lui obéissait.

Un jour l’aigle, qui volait sans cesse à travers le monde, lui raconta ceci : « Ton père Cronos est mort, et des géants énormes, qui sont forts chacun comme cinquante hommes, arrachent les montagnes de leur place et les entassent l’une sur l’autre pour s’emparer du ciel ». Aussitôt, Zeus se leva, disant : « Allons défendre mon héritage ! » Il déclara donc la guerre aux Titans et leur livra des batailles terribles. Quels éclairs flamboyants! Quels tonnerres retentissants! La terre tremblait, craquait, vomissait des flammes ; les océans ébranlés se gonflaient en vagues monstrueuses qui engloutissaient les continents... Enfin, les montagnes accumulées s’écroulèrent et écrasèrent les Titans vaincus.

Titans

La chute des Titans (détail), Jacob Jordaens 1636-1638
© Wikimedia Commons 

Alors, au-dessus des nuages, sur le sommet du mont Olympe, dans une région céleste et toujours pleine de lumière, Zeus triomphant fit paraître un palais magnifique; puis, s’asseyant sur un trône d’or massif avec son aigle à ses pieds, sa main droite pleine d’éclairs éblouissants, il fit venir ses frères et ses sœurs pour partager avec eux l’empire du monde.

Héra devint sa femme et Déméter fut la déesse des moissons. À Neptune il donna le gouvernement des mers, afin qu’il les apaisât et les soulevât à sa volonté; à Hadès, celui des abîmes sous la terre, où se trouve le sombre Royaume des morts. Zeus et Héra habitèrent l’Olympe. Les autres dieux séjournaient plutôt sur la terre, dans quelque demeure favorite : vallées fleuries, fraîches grottes, sombres forets, îles bercées par les vagues... Mais, aux jours d’assemblée, tous les dieux, parés de riches vêtements brodés de belles couleurs, venaient prendre place à la table des festins olympiens, entourée de trônes d’or. La jolie Hébé, déesse de la Jeunesse, allait et venait pour le service, car Héra lui avait dit :  C’est toi, ma fille, qui, dans les festins, veilleras aux soins des hôtes de l’Olympe ; tu verseras dans les coupes et dans la vaisselle d’or le nectar et l’ambroisie qui donnent l’immortalité ». Alors, sans cesse remplies jusqu’au bord de laitage ou de fruits exquis, circulaient les cornes d’abondance, chères à Zeus, car elles lui rappelaient la corne brisée d’Amalthée, sa bonne nourrice, qui la lui avait offerte pleine de fromage gras, le jour où il lui avait dit adieu pour aller combattre les Titans. Mais, un jour, Hébé accrocha sa robe au trône de son père et renversa sa cruche précieuse ; elle en fut si honteuse qu’elle ne voulut plus jamais paraître dans les fêtes, et Héra ne savait qui mettre à sa place. Or Zeus, regardant vers la terre, aperçut le jeune Ganymède qui était admirablement beau. Il gardait les troupeaux de son père et justement il puisait l’eau pour les abreuver, désaltérant d’abord les chèvres et leurs chevreaux, les brebis et leurs agneaux.... « Voilà qui me plaît », pensa Jupiter et il ordonna à son aigle d'enlever Ganymède, qui devint ainsi l’échanson de l’Olympe.

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