Texte et traduction : " Le Séjour des Bienheureux" et le "locus amoenus ", Lucien

 

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Dossier élaboré par :

Cécile Daude

Paulette Garret

Sylvie Pédroaréna

Brigitte Planty

sous la direction de Sylvie David

Lucien, Histoires vraies, II, 11-16 : le Séjour des Bienheureux

 

11. Τοὐντεῦθεν αὐτομάτων ἡμῖν τῶν στεφάνων περιρρυέντων ἐλελύμεθα καὶ εἰς τὴν πόλιν ἠγόμεθα καὶ εἰς τὸ τῶν Μακάρων συμπόσιον. Αὐτὴ μὲν οὖν ἡ πόλις πᾶσα χρυσῆ, τὸ δὲ τεῖχος περίκειται σμαράγδινον· πύλαι δέ εἰσιν ἑπτά, πᾶσαι μονόξυλοι κινναμώμινοι· τὸ μέντοι ἔδαφος τῆς πόλεως καὶ ἡ ἐντὸς τοῦ τείχους γῆ ἐλεφαντίνη· ναοὶ δὲ πάντων θεῶν βηρύλλου λίθου ᾠκοδομημένοι, καὶ βωμοὶ ἐν αὐτοῖς μέγιστοι μονόλιθοι ἀμεθύστινοι, ἐφ' ὧν ποιοῦσι τὰς ἑκατόμβας. Περὶ δὲ τὴν πόλιν ῥεῖ ποταμὸς μύρου τοῦ καλλίστου, τὸ πλάτος πήχεων ἑκατὸν βασιλικῶν, βάθος δὲ πέντε ὥστε νεῖν εὐμαρῶς. Λουτρὰ δέ ἐστιν αὐτοῖς οἶκοι μεγάλοι ὑάλινοι, τῷ κινναμώμῳ ἐγκαιόμενοι· ἀντὶ μέντοι τοῦ ὕδατος ἐν ταῖς πυέλοις δρόσος θερμὴ ἔστιν.

12. Ἐσθῆτι δὲ χρῶνται ἀραχνίοις λεπτοῖς, πορφυροῖς. Αὐτοὶ δὲ σώματα μὲν οὐκ ἔχουσιν, ἀλλ' ἀναφεῖς καὶ ἄσαρκοί εἰσιν, μορφὴν δὲ καὶ ἰδέαν μόνην ἐμφαίνουσιν, καὶ ἀσώματοι ὄντες ὅμως συνεστᾶσιν καὶ κινοῦνται καὶ φρονοῦσι καὶ φωνὴν ἀφιᾶσιν, καὶ ὅλως ἔοικε γυμνή τις ἡ ψυχὴ αὐτῶν περιπολεῖν τὴν τοῦ σώματος ὁμοιότητα περικειμένη· εἰ γοῦν μὴ ἅψαιτό τις, οὐκ ἂν ἐξελέγξειε μὴ εἶναι σῶμα τὸ ὁρώμενον· εἰσὶ γὰρ ὥσπερ σκιαὶ ὀρθαί, οὐ μέλαιναι. Γηράσκει δὲ οὐδείς, ἀλλ' ἐφ' ἧς ἂν ἡλικίας ἔλθῃ παραμένει. Οὐ μὴν οὐδὲ νὺξ παρ' αὐτοῖς γίνεται, οὐδὲ ἡμέρα πάνυ λαμπρά· καθάπερ δὲ τὸ λυκαυγὲς ἤδη πρὸς ἕω, μηδέπω ἀνατείλαντος ἡλίου, τοιοῦτο φῶς ἐπέχει τὴν γῆν. Καὶ μέντοι καὶ ὥραν μίαν ἴσασιν τοῦ ἔτους· αἰεὶ γὰρ παρ' αὐτοῖς ἔαρ ἐστὶ καὶ εἷς ἄνεμος πνεῖ παρ' αὐτοῖς ὁ ζέφυρος.

13. Ἡ δὲ χώρα πᾶσι μὲν ἄνθεσιν, πᾶσι δὲ φυτοῖς ἡμέροις τε καὶ σκιεροῖς τέθληλεν· αἱ μὲν γὰρ ἄμπελοι δωδεκάφοροί εἰσιν καὶ κατὰ μῆνα ἕκαστον καρποφοροῦσιν· τὰς δὲ ῥοιὰς καὶ τὰς μηλέας καὶ τὴν ἄλλην ὀπώραν ἔλεγον εἶναι τρισκαιδεκάφορον· ἑνὸς γὰρ μηνὸς τοῦ παρ' αὐτοῖς Μινῴου δὶς καρποφορεῖν· ἀντὶ δὲ πυροῦ οἱ στάχυες ἄρτον ἕτοιμον ἐπ' ἄκρων φύουσιν ὥσπερ μύκητας. Πηγαὶ δὲ περὶ τὴν πόλιν ὕδατος μὲν πέντε καὶ ἑξήκοντα καὶ τριακόσιαι, μέλιτος δὲ ἄλλαι τοσαῦται, μύρου δὲ πεντακόσιαι, μικρότεραι μέντοι αὗται, καὶ ποταμοὶ γάλακτος ἑπτὰ καὶ οἴνου ὀκτώ.

14. Τὸ δὲ συμπόσιον ἔξω τῆς πόλεως πεποίηνται ἐν τῷ Ἠλυσίῳ καλουμένῳ πεδίῳ· λειμὼν δέ ἐστιν κάλλιστος καὶ περὶ αὐτὸν ὕλη παντοία πυκνή, ἐπισκιάζουσα τοὺς κατακειμένους. Καὶ στρωμνὴν μὲν ἐκ τῶν ἀνθῶν ὑποβέβληνται, διακονοῦνται δὲ καὶ παραφέρουσιν ἕκαστα οἱ ἄνεμοι πλήν γε τοῦ οἰνοχοεῖν· τούτου γὰρ οὐδὲν δέονται, ἀλλ' ἔστι δένδρα περὶ τὸ συμπόσιον ὑάλινα μεγάλα τῆς διαυγεστάτης ὑάλου, καὶ καρπός ἐστι τῶν δένδρων τούτων ποτήρια παντοῖα καὶ τὰς κατασκευὰς καὶ τὰ μεγέθη. Ἐπειδὰν οὖν παρίῃ τις ἐς τὸ συμπόσιον, τρυγήσας ἓν ἢ καὶ δύο τῶν ἐκπωμάτων παρατίθεται, τὰ δὲ αὐτίκα οἴνου πλήρη γίνεται. Οὕτω μὲν πίνουσιν, ἀντὶ δὲ τῶν στεφάνων αἱ ἀηδόνες καὶ τὰ ἄλλα τὰ μουσικὰ ὄρνεα ἐκ τῶν πλησίον λειμώνων τοῖς στόμασιν ἀνθολογοῦντα κατανίφει αὐτοὺς μετ' ᾠδῆς ὑπερπετόμενα. Καὶ μὴν καὶ μυρίζονται ὧδε· νεφέλαι πυκναὶ ἀνασπάσασαι μύρον ἐκ τῶν πηγῶν καὶ τοῦ ποταμοῦ καὶ ἐπιστᾶσαι ὑπὲρ τὸ συμπόσιον ἠρέμα τῶν ἀνέμων ὑποθλιβόντων ὕουσι λεπτὸν ὥσπερ δρόσον.

15. Ἐπὶ δὲ τῷ δείπνῳ μουσικῇ τε καὶ ᾠδαῖς σχολάζουσιν· ᾄδεται δὲ αὐτοῖς τὰ Ὁμήρου ἔπη μάλιστα· καὶ αὐτὸς δὲ πάρεστι καὶ συνευωχεῖται αὐτοῖς ὑπὲρ τὸν Ὀδυσσέα κατακείμενος. Οἱ μὲν οὖν χοροὶ ἐκ παίδων εἰσὶν καὶ παρθένων· ἐξάρχουσι δὲ καὶ συνᾴδουσιν Εὔνομός τε ὁ Λοκρὸς καὶ Ἀρίων ὁ Λέσβιος καὶ Ἀνακρέων καὶ Στησίχορος· καὶ γὰρ τοῦτον παρ' αὐτοῖς ἐθεασάμην, ἤδη τῆς Ἑλένης αὐτῷ διηλλαγμένης. Ἐπειδὰν δὲ οὗτοι παύσωνται ᾄδοντες, δεύτερος χορὸς παρέρχεται ἐκ κύκνων καὶ χελιδόνων καὶ ἀηδόνων. Ἐπειδὰν δὲ καὶ οὗτοι ᾄσωσιν, τότε ἤδη πᾶσα ἡ ὕλη ἐπαυλεῖ τῶν ἀνέμων καταρχόντων.

16. Μέγιστον δὲ δὴ πρὸς εὐφροσύνην ἐκεῖνο ἔχουσιν· πηγαί εἰσι δύο παρὰ τὸ συμπόσιον, ἡ μὲν γέλωτος, ἡ δὲ ἡδονῆς· ἐκ τούτων ἑκατέρας πάντες ἐν ἀρχῇ τῆς εὐωχίας πίνουσιν καὶ τὸ λοιπὸν ἡδόμενοι καὶ γελῶντες διάγουσιν.

 

Description de la cité des Bienheureux

11. Dès lors, les guirlandes qui nous entouraient glissèrent d'elles-mêmes ; nous étions libres et on nous conduisait dans la cité au banquet des Bienheureux. La ville même est toute d'or et le mur périphérique d'émeraude. On compte sept portes, toutes faites d'une seule planche de cinname. Quant au pavement de la ville et au sol à l'intérieur du mur, ils sont d'ivoire. Les temples de tous les dieux sont construits en pierre de béryl ; les autels qui s'y trouvent sont très grands, d'un seul bloc d'améthyste, et c'est sur eux que se font les hécatombes. Autour de la ville coule un fleuve du parfum le meilleur : sa largeur est de cent coudées royales1, sa profondeur de cinq, suffisante pour y nager à l'aise. Chez les Bienheureux, les bains sont de grands édifices de verre, chauffés au cinname ; cependant leurs baignoires ne contiennent pas d'eau mais de la rosée chaude.

Mœurs et physiologie des Bienheureux

12. Ils portent pour vêtement de fines toiles d'araignée teintes de pourpre. Eux n'ont pas de corps, ils sont impalpables et sans chair et n'offrent à la vue qu'une forme et une apparence. Bien qu'ils soient incorporels, ils ont une consistance, se meuvent, pensent et font entendre une voix. En somme on a l'impression que leur âme, qui est une âme dépouillée du corps, circule revêtue de la ressemblance de leur corps. En tout cas, à moins de les toucher, on ne saurait prouver que ce qu'on voit n'est pas un corps, car ils sont comme des ombres qui se tiennent debout et ne sont pas noires. Personne ne vieillit et l'on reste à l'âge qu'on avait en arrivant. Il n'y a chez eux ni nuit ni jour tout à fait clair : comme le petit jour à l'approche de l'aurore, avant le lever du soleil, telle est la lumière qui règne sur la contrée. En outre ils connaissent une seule saison dans l'année, car là-bas c'est un printemps perpétuel et là-bas un seul vent souffle, le zéphyr.

Environnement naturel

13. Le pays est couvert de toutes sortes de fleurs, toutes sortes d'arbres de culture qui donnent de l'ombre ; les vignes produisent douze récoltes et portent du raisin chaque mois ; les grenadiers, les pommiers et les autres arbres fruitiers produisent treize fois, à les en croire, car en un seul mois – leur mois de Minos2 il y a double récolte. Au lieu de blé, les épis portent à leur extrémité un pain tout prêt qui ressemble à des champignons. À l'entour de la ville on trouve trois-cent soixante-cinq sources d'eau, autant de miel, cinq cents de parfum (celles-ci plus petites cependant) et sept fleuves de lait et huit de vin.

Le banquet. Ses divertissements littéraires et musicaux. Rire et plaisir

14. Le lieu du banquet est hors ville dans la plaine dite Élysée : magnifique prairie entourée d'un bois aux essences variées et touffu, qui ombrage les convives couchés. Ils ont sous eux une couche faite de fleurs. Ce sont les vents qui font le service et offrent chaque plat, sans toutefois verser le vin car on n'en a nul besoin : il y a autour des convives de grands arbres de verre, du verre le plus transparent, et ces arbres ont pour fruits des coupes variées de forme et de taille. Donc quand quelqu'un arrive au banquet, il cueille une ou même deux coupes et les pose à sa place ; aussitôt elles sont remplies de vin. C'est leur façon de boire. En guise d couronnes, les rossignols et l'ensemble des oiseaux musiciens, dans les prairies voisines cueillent des fleurs de leur bec et les font neiger sur les convives qu'ils survolent en chantant. Et ils se parfument ainsi : des nuages épais ayant pompé le parfum des sources et du fleuve se tiennent au-dessus des banqueteurs et sous la pression légère des vents le font pleuvoir comme une fine rosée.

15. Au repas ils s'adonnent à la musique et au chant. On leur chante surtout les vers d'Homère, qui est présent en personne et festoie avec eux, couché à une place au-dessus d'Ulysse. Il y a des chœurs de jeunes garçons et de jeunes filles ; Eunomos de Locride, Arion de Lesbos, Anacréon et Stésichore les dirigent et les accompagnent de leurs chants. Car c'est bien ce dernier que j'ai vu chez les Bienheureux et Hélène était maintenant réconciliée avec lui. Quand cessent leurs chants, un second chœur se présente, cygnes, hirondelles, rossignols. Et quand ceux-ci chantent à leur tour, c'est à présent l'ensemble du bois qui joue un accompagnement de flûte, sous la conduite des vents.

16. Mais voici leur plus grand avantage pour la joie du banquet. Il y a deux sources près de la table, celle du rire, celle du plaisir. Tout le monde boit à chacune des deux au début du festin et toute la suite se passe dans le plaisir et le rire.

 

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Cécile Daude

Paulette Garret

Sylvie Pédroaréna

Brigitte Planty

sous la direction de Sylvie David

Notes 

  1. La coudée royale est supérieure à la coudée ordinaire de 1/9 et elle mesure environ 50 centimètres.
  2. Mois inventé par l’auteur.
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