Tout le monde connaît Hercule, que les Grecs appelaient Héraclès. C’est le plus grand de tous les héros mythologiques, le Superman de l’Antiquité, celui dont les aventures ont inspiré le plus de récits et le plus d’images, des temps homériques (VIIIe siècle avant J.-C.) à notre époque numérique, comme en témoignent par exemple les films ou les jeux vidéo.
Missions impossibles
Rappelons brièvement la tradition mythologique concernant ses exploits : la déesse Héra (Junon) déteste Hercule parce qu’il est né de l’union de son mari Zeus (Jupiter) avec une mortelle, Alcmène. Elle a ordonné au héros qui porte son nom (Héraclès signifie "gloire d'Héra" en grec) de se mettre aux ordres de son cousin Eurysthée, roi d’Argos et de Mycènes dans le Péloponnèse, le temps d’exécuter les missions réputées impossibles que celui-ci lui fixera, avec l’espoir de se débarrasser de lui. En huit ans, Hercule affronte donc les pires épreuves et les monstres les plus redoutables pour accomplir les fameux "douze travaux", dont l’ordre varie parfois, pour certains d’entre eux, selon les sources et les mythographes. Ce n’est qu’à l’époque hellénistique, à partir du IVe siècle avant J.-C., qu’a été fixée la liste canonique de ces travaux, dont l’ordre varie parfois, pour certains d’entre eux, selon les sources et les mythographes. Dans le résumé qui suit, nous citons celui qui est le plus souvent retenu : il est présenté dans la Bibliothèque (livre II, 5, 1-12) attribuée au mythographe Apollodore d’Athènes qui aurait vécu au IIe siècle avant J.-C.
Le grand ménage
Les six premiers travaux d’Hercule se déroulent dans le Péloponnèse, non loin d’Argos même ou au nord de la péninsule. Le fils de Zeus (Jupiter) doit d’abord vaincre un lion monstrueux à la peau invulnérable, nourri par Héra (Junon) dans la région de Némée. Il réussit à l’étrangler puis à le dépecer en utilisant les propres griffes de l’animal : il fait de sa peau un trophée et une sorte de manteau qui devient son principal attribut.
Puis Hercule élimine une espèce de gigantesque serpent d’eau à têtes multiples (cinq, neuf ou parfois même cent, selon les différentes sources légendaires) : l’hydre qui vit dans des marais à Lerne. Puis, à l’issue d’une course épuisante, il capture une biche aux cornes d’or et aux sabots d’airain vivant sur la colline de Cérynie. Il pourchasse ensuite un énorme sanglier qui terrifiait les habitants du mont Érymanthe en Arcadie : il finit par le ligoter et le rapporte sur son dos à Eurysthée.
Pour son cinquième travail, le héros doit nettoyer les étables des troupeaux d’Augias, roi d’Élide, qui les a laissées sans aucun entretien pendant des années : il accomplit sa mission en une seule journée, grâce aux eaux des fleuves Alphée et Pénée qu’il a détournées pour leur faire emporter le fumier accumulé dans les écuries. Au passage, selon le poète Pindare (Odes, Les Olympiques, X, vers 51 à 72), il profite de son exploit pour instaurer sur ce territoire d’Élide des cérémonies sacrées en l’honneur de son père Zeus : non seulement il fonde les premiers jeux olympiques, mais encore il rafle tous les prix car personne n’ose rivaliser avec lui, comme le raconte l’historien mythographe Diodore de Sicile au Ier siècle après J.-C.
Puis Hercule tue à coups de flèche les terrifiants oiseaux qui se nourrissaient de chair humaine aux abords du lac Stymphale, en Arcadie.
Cette première série de travaux a pu être interprétée comme la transposition symbolique de diverses opérations d’assainissement naturel. Par exemple, le combat contre l’Hydre de Lerne dans un lieu connu pour ses marais pestilentiels, ou encore celui contre les oiseaux qui infestent le lac Stymphale, pourrait bien représenter la lutte toujours renouvelée des hommes pour assécher des zones marécageuses ; quant au nettoyage des écuries d’Augias, il relève de ce même souci de régulation pour en quelque sorte "dépolluer" un environnement qu’on ne qualifie pas encore de "durable"...
Jusqu’au bout du monde
Cependant, après avoir remis de l’ordre dans la nature, Hercule quitte le Péloponnèse pour des contrées de plus en plus lointaines : le héros "nettoyeur" se fait aussi "explorateur". Il part d’abord en Crète pour capturer vivant le fabuleux taureau offert par Neptune (Poséidon), le dieu des mers, au roi Minos : il y parvient en sautant sur le dos de l’animal et en le saisissant par les cornes.
Puis Hercule se rend en Thrace, au nord de la Grèce, où il doit s’emparer des juments carnivores du roi Diomède qui les nourrissait de chair humaine : il les apprivoise après leur avoir donné à manger leur maître cruel. Parvenu chez les Amazones, de farouches guerrières qui habitent sur les bords de la mer Noire, il réussit à se procurer le ceinturon de leur reine Hippolytè, convoité par la fille d’Eurysthée.
Pour ses dixième et onzième travaux, c’est la Méditerranée qu’Hercule sillonne jusqu’aux fameuses Colonnes qui porteront son nom (aujourd’hui Gibraltar) : il dérobe d’abord les troupeaux de Géryon, après avoir tué ce redoutable géant doté de trois têtes et trois torses qui vit dans une île fort lointaine, là où le soleil se couche. Puis il réussit à subtiliser les merveilleuses pommes d’or que gardaient les trois Hespérides, filles d’Atlas, dans leur jardin fabuleux situé à la limite occidentale du monde connu.
Enfin, il ne reste plus au héros qu’à accomplir le voyage ultime : celui qui le conduit aux Enfers, d’où il ramène enchaîné comme un vulgaire toutou le chien Cerbère à trois têtes, le féroce gardien du royaume des morts. Au passage, comme le rapportent certains auteurs (en particulier Apollodore, Bibliothèque, livre II, 5, 12), Hercule en profite pour libérer le héros athénien Thésée, retenu prisonnier par Pluton (Hadès), le roi des Enfers.