- L’écrasante victoire d’Hannibal restera célèbre comme une belle leçon de stratégie : ainsi Alfred von Schlieffen concevra le même plan de campagne pour les armées allemandes conduites par les généraux Ludendorff et Hindenburg qui remporteront la victoire à la bataille de Tannenberg contre les Russes du 26 au 29 août 1914.
- Au soir de la bataille, Maharbal, le maître de la cavalerie carthaginoise, imagine qu’Hannibal va foncer sur Rome, mais le général en chef préfère attendre, ce qui lui vaut cette célèbre réplique : “Vincere scis, Hannibal, victoria uti nescis.” / “Tu sais vaincre, Hannibal, mais tu ne sais pas profiter de la victoire.” (Tite-Live, Histoire romaine, XXII, 51, 4)
- Après cette terrible défaite, les Romains auraient dû théoriquement capituler, mais leur ténacité finira par porter ses fruits. Après avoir refusé de racheter ses prisonniers (500 deniers pour les cavaliers, 300 pour les fantassins et 100 pour les esclaves), Rome reprend sa tactique de temporisation et reconquiert patiemment le terrain perdu. Hannibal, dont l’armée est trop faible pour faire le siège de Rome, choisit d’occuper pendant plus de dix ans le Sud de l’Italie, avant d’être rappelé en Afrique en 203 avant J.-C.
C’est la quatrième grande bataille qui oppose Romains et Carthaginois en Italie au cours de la deuxième Guerre punique. Elle se déroule près de Cannes (aujourd’hui Canne della Battaglia), sur la rive droite de l’Aufide en Apulie, à quelques dizaines de kilomètres des premières colonies romaines.
Les Romains
• Commandement : le consul Gaius Terentius Varro (Varron).
• 8 légions : 85 000 hommes, soit 76 000 fantassins, romains et alliés, sous les ordres de Geminius et Regulus, placés selon le dispositif traditionnel de l'armée en ordre de bataille et 9 000 cavaliers, divisés en deux ailes, sous les ordres du consul Paul Émile et de Varron.
Les Carthaginois
• Commandement : Hannibal.
• 50 000 hommes : soit 12 000 fantassins gaulois et ibères sous les ordres d’Hannibal ; 28 000 fantassins africains sous les ordres de Magon, le jeune frère d’Hannibal ; 10 000 cavaliers numides, répartis en deux ailes sous les ordres d’Hasdrubal et de Maharbal.
Le déroulement de la bataille
Face au dispositif lourd des légions romaines, qui ont le désavantage d’avoir le vent de face, Hannibal compense son infériorité numérique en déployant son infanterie légère pour former un rideau protecteur en première ligne et en disposant ses troupes sur une seule ligne de front en forme de croissant pointé vers les Romains.
Il fait de l’infanterie lourde africaine l’élément offensif de son dispositif : partagés en deux corps égaux, ces fantassins sont placés de part et d’autre du centre, mais en retrait par rapport à lui. Au centre, l’infanterie gauloise et ibère, rangée par compagnies alternées, forme une cible pour l’adversaire : Hannibal en prend le commandement pour tirer avantage de sa flexibilité potentielle.
Les cavaliers d’Hasdrubal attaquent la cavalerie romaine qui se bat vaillamment mais finit par décrocher. Le combat d’infanterie s’engage : Hannibal, qui connaît bien la tactique romaine, laisse les légions enfoncer le centre de sa ligne de front et poursuivre ses fantassins gaulois et ibères, qui se replient. Les Romains se retrouvent “en fer à cheval”, entre les deux corps de fantassins africains : Hannibal les laisse s’enfermer “dans la nasse”, tandis que Varron croit exploiter un avantage.
De son côté, la cavalerie numide, se montre bien supérieure à celle de l’adversaire : les cavaliers d’Hasdrubal acculent ceux de Paul Émile (aile droite) contre le fleuve puis reviennent soutenir ceux de Maharbal pour mettre Varron et les siens (aile gauche) en déroute. Ainsi prise en tenaille, la cavalerie de Varron se débande.
Après l’effacement, l’encerclement : les cavaliers numides réunis enferment la légion romaine dans la nasse verrouillée sur les côtés par les fantassins africains.
Un désastre pour Rome, le plus grave jamais subi dans toute son histoire et qui aurait pu mettre fin à sa puissance : 45 000 fantassins et 2 700 cavaliers sont morts sur le champ de bataille, dont le consul Paul Émile lui-même, tandis que les Carthaginois ont seulement 6 000 tués. Varron a réussi à s’échapper, mais on compte près de 20 000 prisonniers dans les rangs romains.