Europe, princesse phénicienne séduite et enlevée par Zeus Εὐρώπη

Europe est originaire de "Sidonie" : la région de la ville de Sidon, partie méridionale de la Phénicie antique, qui comprenait les pays des villes de Béryte (actuelle ville de Beyrouth), Byblos (Djebaïl), Tyr (Soûr), Sidon (Saïda), ce qui correspond aujourd’hui au Liban et à la Syrie côtière.

  • Europe a des points communs avec Io : aimée de Zeus, cette princesse d’Argos est métamorphosée en génisse. Fuyant de Grèce jusqu’en Égypte, elle passe par l’Asie et donne son nom au Bosphorede βοῦς (bous), "la vache", et πόρος (poros), "le passage". Les légendes de ces deux jeunes filles errantes conservent sans doute la trace mythologique des grandes migrations des peuples de part et d’autre de la Méditerranée.
  • Il est possible qu’Europe ait désigné simultanément une femme et une partie du monde (terre habitée par les Grecs par opposition à l’Asie et aux îles de l’Archipel). Toutefois, si le rapprochement avec le continent peut être fait a fortiori, les Grecs n’avaient sans doute pas conscience des origines du toponyme. Le mythe d’Europe serait l’illustration poétique et le récit symbolique (la métaphore ?) de la "pénétration" en Occident - via les Phéniciens, la Crète et l’Égée - des cultures et brillantes civilisations du proche Orient antique.
  • D’Europe à l’Europe : un extrait du discours prononcé à Delphes les 22 juillet 2007 par José Manuel Barroso, président de la Commission européenne.
    « En prenant la parole aujourd’hui devant vous, tout près de l'ancien oracle de Delphes, ce lieu d’écoute du destin qui rassemblait autrefois les peuples voisins et les peuples lointains, je ne peux pas m’empêcher d’évoquer la figure mythique d’Europe. Ce qui me frappe surtout dans le récit de l’enlèvement de la belle Europe par Zeus, ce n’est pas la fascination divine pour sa beauté humaine, ce que je trouve normal, en tout cas d’un point de vue humain. Mais c’est le fait que cet enlèvement de la jeune Europe, Phénicienne de naissance, fut à l’origine d’un cheminement qui a tracé une géographie imprécise, à l’image des frontières de l’Europe. Ses frères, partis à sa recherche, auraient fondé plusieurs villes et sont devenus des héros légendaires à qui les Grecs attribuèrent un grand rôle civilisateur. La quête d’Europe aurait ainsi mené à l’édification de notre civilisation. Toujours à la recherche d’une Europe en constant devenir mais dont l’idéal humaniste persiste au fil des siècles, nous devons nous poser des questions importantes auxquelles l’oracle ne saurait pas répondre à notre place : quelle polis, quelle communauté de citoyens voulons-nous construire aujourd’hui dans un monde globalisé et quel rôle voulons-nous jouer sur le nouvel échiquier mondial ? »

Europe est une figure plurielle : tantôt divinité marine et épouse de Poséidon, tantôt princesse phénicienne, fille du noble Phénix ou encore d’Agénor roi de Tyr (ou de Sidon). Elle est surtout connue comme l’une des nombreuses conquêtes de Zeus : métamorphosé en taureau pour la séduire, le roi des dieux l’entraîne en Crète. Enlèvement ou mariage divin ? Souvent représentée au moment où elle quitte sa terre natale, effrayée ou au contraire confiante, Europe est toujours associée au taureau, parfois aussi aux torches nuptiales et aux motifs marins.

Le nom d’Europe (Εὐρώπη en grec) est apparu vers le VIIe siècle avant J.-C. : il est composé de l’adjectif εὐρύς (eurus), large, et d’un nom féminin très ancien, connu sous la forme ὦπα (ôpa), qui désigne l’action de voir, l’œil, le visage ou encore l’apparence. À partir de cette étymologie, diverses interprétations ont été proposées : “grand, large et blanc”, car Europe aurait eu de grands yeux ou un visage large et clair ; on l’appellerait aussi celle “qui voit loin”. Certains spécialistes relient le nom grec à une racine sémitique ‘rb, reconstruite sur l’hébraïque ereb, qui désignerait la terre du couchant ou l’Occident.

L’histoire d’Europe la Phénicienne se dessine à travers de nombreux récits mythologiques, grecs ou latins. Toute jeune princesse, elle a fait une nuit un songe inquiétant : deux terres se disputent à son sujet ; la première est la terre d’Asie, qui l’a mise au monde et a pris soin d’elle ; la seconde est la « terre d’en face », qui a les traits d’une étrangère, dépourvue de nom, mais affirme avec force que la princesse lui appartient.

Le lendemain, Europe joue au bord de la mer avec ses compagnes et elle aperçoit un magnifique taureau blanc. L’animal se laisse caresser ; il a l’air doux ; mais quand la jeune fille monte sur son dos, il s’élance vers la mer. Les vêtements de la princesse ondulent au vent, comme la voile d’un bateau ; poissons, dauphins et Néréides les accompagnent en un joyeux cortège. Nul ne le sait, mais c’est Zeus qui emmène Europe en Crète. De leur union naissent, sous un platane que la légende situe au sud de l’île de Crète, à Gortyne, trois illustres fils : Minos (futur roi de Crète), Rhadamanthe (juge des Enfers avec son frère) et Sarpédon (tué par Patrocle pendant la guerre de Troie).

Pendant ce temps, le roi Agénor, le père d’Europe, envoie son fils Cadmos à la recherche de sa sœur et le somme de ne pas revenir sans elle. Sur les conseils de l’oracle de Delphes, le jeune homme suit inlassablement une génisse, qui le mène en Thrace, en Macédoine, en Béotie… Mais Europe reste introuvable. Alors Cadmos fonde, là où la génisse se couche enfin, une nouvelle cité, Thèbes : il en sera le roi et il enseignera l’alphabet phénicien à ses sujets.

Princesse venue d’Orient en Occident, Europe donne son nom à la « troisième partie du monde », selon les mots d’Ovide : la terre qui fait face à l’Asie et à l’Afrique et qui est sa « mère » d’adoption. À sa mort, elle aurait été mise au rang des divinités et changée en constellation (comme le taureau).

Ce qu'écrit Ovide :

Te, Sidoni, Juppiter implet,
parsque tuum terrae tertia nomen habet.


"Fille de Sidon, Jupiter te rend mère et tu donnes ton nom à l’une des trois parties du monde."

Ovide, Fastes V, vers 617-618

Europe est originaire de "Sidonie" : la région de la ville de Sidon, partie méridionale de la Phénicie antique, qui comprenait les pays des villes de Béryte (actuelle ville de Beyrouth), Byblos (Djebaïl), Tyr (Soûr), Sidon (Saïda), ce qui correspond aujourd’hui au Liban et à la Syrie côtière.

  • Europe a des points communs avec Io : aimée de Zeus, cette princesse d’Argos est métamorphosée en génisse. Fuyant de Grèce jusqu’en Égypte, elle passe par l’Asie et donne son nom au Bosphorede βοῦς (bous), "la vache", et πόρος (poros), "le passage". Les légendes de ces deux jeunes filles errantes conservent sans doute la trace mythologique des grandes migrations des peuples de part et d’autre de la Méditerranée.
  • Il est possible qu’Europe ait désigné simultanément une femme et une partie du monde (terre habitée par les Grecs par opposition à l’Asie et aux îles de l’Archipel). Toutefois, si le rapprochement avec le continent peut être fait a fortiori, les Grecs n’avaient sans doute pas conscience des origines du toponyme. Le mythe d’Europe serait l’illustration poétique et le récit symbolique (la métaphore ?) de la "pénétration" en Occident - via les Phéniciens, la Crète et l’Égée - des cultures et brillantes civilisations du proche Orient antique.
  • D’Europe à l’Europe : un extrait du discours prononcé à Delphes les 22 juillet 2007 par José Manuel Barroso, président de la Commission européenne.
    « En prenant la parole aujourd’hui devant vous, tout près de l'ancien oracle de Delphes, ce lieu d’écoute du destin qui rassemblait autrefois les peuples voisins et les peuples lointains, je ne peux pas m’empêcher d’évoquer la figure mythique d’Europe. Ce qui me frappe surtout dans le récit de l’enlèvement de la belle Europe par Zeus, ce n’est pas la fascination divine pour sa beauté humaine, ce que je trouve normal, en tout cas d’un point de vue humain. Mais c’est le fait que cet enlèvement de la jeune Europe, Phénicienne de naissance, fut à l’origine d’un cheminement qui a tracé une géographie imprécise, à l’image des frontières de l’Europe. Ses frères, partis à sa recherche, auraient fondé plusieurs villes et sont devenus des héros légendaires à qui les Grecs attribuèrent un grand rôle civilisateur. La quête d’Europe aurait ainsi mené à l’édification de notre civilisation. Toujours à la recherche d’une Europe en constant devenir mais dont l’idéal humaniste persiste au fil des siècles, nous devons nous poser des questions importantes auxquelles l’oracle ne saurait pas répondre à notre place : quelle polis, quelle communauté de citoyens voulons-nous construire aujourd’hui dans un monde globalisé et quel rôle voulons-nous jouer sur le nouvel échiquier mondial ? »
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