E.C.L.A. : Une lecture analytique en classe de troisième

Proposition de lecture analytique d’un texte grec dans le cadre d’une séquence consacrée à la mort de César.

Séance 1 : Un meurtre au Sénat

►Lecture-compréhension

Assidentem conspirati specie officii circumsteterunt, ilicoque Cimber Tillius […] togam adprehendit : deinde clamantem : « Ista quidem vis est ! » alter e Cascis auersum vulnerat paulum infra jugulum.
Caesar Cascae brachium arreptum graphio trajecit conatusque prosilire alio uulnere tardatus est ; utque animaduertit undique se strictis pugionibus peti, toga caput obvolvit, simul sinistra manu sinum ad ima crura deduxit, quo honestius caderet inferiore corporis parte velata.

D’après Suétone (70-126), Vie des Douze Césars

  • Des conspirateurs

- lâches, rusés ;
- connus de César : Cimber Tillius, alter e Cascis, Marcus Brutus (pas le fils de César !) ;
- blessures : où, avec quoi : infra jugulum, strictis pugionibus (poignards dégainés).

  • Les réactions de la victime

- les paroles au style direct (Cette fois, c’est de la violence ! — Ista quidem vis est !) montrent que César conserve son sens de la réplique et de l’autorité, ce qui dénote un grand sang-froid ;
- la deuxième réaction (César, lui ayant saisi le bras, le transperça de son poinçon — Caesar cascae brachium arreptum graphio trajecit) montre sa vivacité, son courage face à l’adversité ;
- enfin, la dernière action (il enroula sa toge autour de sa tête — toga caput obvolvit) révèle sa pudeur et son sens de la dignité : il ne souhaite être vu ni blessé, ni mourant.

Séance 2 : un cadavre au Sénat

►Traduction juxtaposée

   

Télécharger la fiche élève.

Ces deux premières séances sont prolongées par la lecture en français du texte de Plutarque relatant l’assassinat de César.

Séance 3 : étude du lexique

Cette est consacrée à l’étude du vocabulaire du corps.
Un mot croisé construit à partir de mots dérivés de caput, capitis, n : la tête est proposé aux élèves.

Séance 4 : étude de deux tableaux

Cette séance est consacrée à l’étude des œuvres de Camuccini et de Gérôme

  • La mort de César, Vincenzo Camuccini,1804-1805, Galleria Nazionale d’Arte Moderna e Contamporanea, Rome
  • La mort de César, Jean-Léon Gérôme, 1867, Walters Art Museum, Baltimore

Séance 5 : Honorer ou venger César : les funérailles du dictateur selon les historiens grecs

Les deux textes supports

- Plutarque, Vie de Marc-Antoine
- Cassius Dio, Discours de Marc-Antoine

1. Plutarque (46-126 ap. J-C), Vie de Marc-Antoine

Lorsqu'on porta le corps de César sur le bûcher, Antoine, suivant l'usage, prononça son oraison funèbre, et voyant le peuple singulièrement ému et attendri par ce discours, il mêla tout à coup à l'éloge de César ce qu'il crut de plus propre à exciter la pitié, à enflammer l'âme de ses auditeurs. En finissant, il déploya la robe de César, ensanglantée et percée de coups, et traitant de scélérats et de parricides les auteurs de ce meurtre, il échauffa tellement l'esprit du peuple, que faisant, à l'heure même, un bûcher des bancs et des tables qu'ils trouvèrent sur la place, ils y brûlèrent le corps de César ; prenant ensuite du bûcher des tisons enflammés, ils coururent aux maisons des meurtriers, pour y mettre le feu et les attaquer eux-mêmes.

2. Cassius Dio, historien romain de langue grecque (155-235 ap. J-C.)

« Eh bien ! ce père, ce grand pontife, ce citoyen inviolable, ce héros, ce dieu, il est mort ! Il est mort, ô douleur ! non pas emporté par une maladie, non pas flétri par la vieillesse, non pas frappé dans une guerre au dehors, non pas fortuitement ravi par quelque coup du ciel, mais ici, dans l'enceinte de nos murs, trompé par la perfidie, lui qui avait en sûreté conduit une expédition jusque dans la Bretagne ; victime d'embûches dans la ville, lui qui en avait reculé le Pomœrium ; égorgé dans la curie, lui qui en avait bâti une nouvelle en son nom ; sans armes, lui guerrier illustre ; sans défense, lui pacificateur ; devant les lieux consacrés aux jugements, lui juge ; sous les yeux des magistrats, lui magistrat ; sous les coups des citoyens, lui qu'aucun ennemi ne put tuer, même lorsqu'il tomba dans la mer ; sous les coups de ses amis, lui qui souvent leur avait pardonné.
À quoi t'a servi ta clémence, ô César ? à quoi t'a servi ton inviolabilité ? À quoi t'ont servi les lois ? À ce que toi, qui avais porté plusieurs lois pour empêcher que personne ne fût mis à mort par ses ennemis, tu fusses si cruellement assassiné par tes amis ; à ce que tu sois maintenant là, étendu égorgé dans ce Forum que tu as souvent traversé avec la couronne de triomphateur ; à ce qu'on t'ait jeté percé de blessures au pied de cette tribune d'où tu as souvent harangué le peuple. Ô douleur ! ô cheveux blancs baignés de sang ! ô toge en lambeaux que tu sembles n'avoir revêtue que pour être égorgé dans ses plis ! »

Histoire Romaine, XLIX

Les deux textes en français : télécharger ici la fiche à distribuer aux élèves.

Le texte en grec ancien : télécharger ici la fiche du texte grec à distribuer aux élèves.

Les étapes du travail d’analyse proposé aux élèves

  • Lecture expressive du texte en français par le professeur
  • Recueil des premières impressions des élèves
  • Quels sont les procédés pour montrer cela ?

« Eh bien ! ce père, ce grand pontife, ce citoyen inviolable, ce héros, ce dieu, il est mort ! Il est mort, ô douleur !

Ἀλλ᾽ οὗτος ὁ πατήρ, / οὗτος ὁ ἀρχιερεὺς / ὁ ἄσυλος  / ὁ ἥρως / ὁ θεὸς / τέθνηκεν, οἴμοι, τέθνηκεν

► Objectif  : faire repérer le pathétique :

répétition du verbe τέθνηκεν, place de ce verbe en grec quiencadre le οἴμοι.

« Eh bien ! ce père, ce grand pontife, ce citoyen inviolable, ce héros, ce dieu, il est mort ! Il est mort, ô douleur !
non pas emporté par une maladie, non pas flétri par la vieillesse, non pas frappé dans une guerre au dehors, non pas fortuitement ravi par quelque coup du ciel, mais ici, dans l'enceinte de nos murs ».

Ἀλλ᾽ οὗτος ὁ πατήρ, / οὗτος ὁ ἀρχιερεὺς / ὁ ἄσυλος  / ὁ ἥρως / ὁ θεὸς / τέθνηκεν, οἴμοι, τέθνηκεν
οὐ νόσῳ βιασθείς, οὐδὲ γήρᾳ μαρανθείς, οὐδὲ ἔξω που ἐν πολέμῳ τινὶ τρωθείς, οὐδὲ ἐκ δαιμονίου τινὸς αὐτομάτως ἁρπασθείς,
ἀλλὰ ἐνταῦθα ἐντὸς τοῦ τείχους

► Appareillage dont disposent les élèves : soulignement des participes passés grecs.

► En s’appuyant sur le français, les élèves repèrent la négation et la coordination marquant l’opposition (italique).
Ils relèvent le participe passé sur lequel porte la négation en français.

On peut mettre en valeur le suffixe passif des participes aoristes (même si les élèves n’ont pas à connaître cette forme).

► Repérage par les élèves du deuxième niveau d’oppositions
- la répétition du pronom personnel  de la 3ème personne du singulier dans sa forme tonique « lui » ;
- la relative qui le développe et le verbe dont il est le sujet (verbe rose en gras).

Objectif : repérer le passif (ce que César a subi) opposé aux verbes actifs ( les actions de César.

En grec, le texte est déjà appareillé pour les participes aoristes (passifs et actifs)
Les « ὁ καὶ » et les « » ainsi que le « ὃν » sont associés aux « lui qui », « lui » et « lui que »  repérés en français

► Repérage par les élèves des autres oppositions, en remarquant que le pronom « lui » en est toujours la charnière.

► Repérage par les élèves d’une accélération des oppositions
- trois développées avec des participes ;
- deux où l’on oppose seulement des adjectifs ou des substantifs ;
- reprise de l’amplification quand il s’agit de désigner les coupables.

⇒ effet quasi-cinématographique dans la progression :

  • Victime
  • Lieu du crime
  • Criminels eux-mêmes avec une gradation : citoyens (ὑπὸ τῶν πολιτῶν) puis intimes (ὑπὸ τῶν ἑταίρων)
  • Brutus directement visé par ce discours.

► Lecture du dernier paragraphe, repérage des questions rhétoriques, geste d’Antoine, appel à la pitié avec la toge ensanglantée brandie devant la foule (le texte de Plutarque lu en début de séance aide à comprendre le geste). 

Rédaction d'un paragraphe

« Comment Antoine suscite-t-il à la fois la pitié et la colère du peuple pour le pousser à agir, c’est-à-dire à venger César ? »

Prolongement possible

Visualisation des 13 premières minutes du docu-fiction de Fabrice Hourlier : Le destin de Rome, épisode 1 : Venger César.

Le docu-fiction reprend en le simplifiant le discours de Cassius Dio en latin sous-titré, (3 minutes).

 

Besoin d'aide ?
sur